Air Canada suspend 30 lignes régionales et ferme huit escales à des aéroports

MONTRÉAL — Évoquant l’«impact dévastateur» de la crise sanitaire sur ses activités, Air Canada a décidé de suspendre indéfiniment 30 liaisons régionales en plus de mettre fin à huit escales à des aéroports régionaux au pays, dont quatre au Québec.

Le plus important transporteur aérien au pays a attribué ces réductions de service, annoncées mardi, à la «faiblesse constante» de la demande dans le marché d’affaires et celui du loisir, en raison des restrictions de voyages et des fermetures de frontières liées à la pandémie de COVID-19.

Dans une déclaration envoyée par courriel, une porte-parole d’Air Canada, Pascale Déry, a affirmé que la société perdait quotidiennement environ 20 millions $, ajoutant que des mesures draconiennes étaient nécessaires pour traverser la crise actuelle.

«Face à cette situation insoutenable, Air Canada n’a d’autres choix que d’adopter des mesures décisives pour alléger sa structure de coûts et ralentir l’épuisement de sa trésorerie», a-t-elle écrit.

Au Québec, les aéroports touchés sont ceux situés à Gaspé, Baie-Comeau, Mont-Joli ainsi que Val-d’Or. Deux autres sont situés en Ontario (Kingston et North Bay), en plus d’un au Nouveau-Brunswick (Bathurst) et un à Terre-Neuve-et-Labrador (Wabush).

À compter de mercredi, Air Canada offrira deux vols par jour vers les Îles-de-la-Madeleine, mais cette mesure sera temporaire.

«Le service se prolongera jusqu’au 7 septembre (jusqu’à la fête du Travail), après quoi cette liaison sera suspendue indéfiniment», a précisé Mme Déry.

D’autres changements, dont de possibles suspensions de service, sont également à prévoir, puisqu’Air Canada a prévenu qu’elle continuerait à évaluer la situation au cours des prochaines semaines.

Plus tôt cette année, la compagnie a sabré 20 000 postes, soit plus de la moitié de son personnel, dans le cadre de son plan pour réduire ses coûts. 

Air Canada a précisé que la capacité de l’ensemble de son réseau était en baisse d’environ 85 % au deuxième trimestre, par rapport à la même période l’an dernier. La société s’attend en outre à ce que sa capacité soit en baisse de 75 % au troisième trimestre par rapport au troisième trimestre de l’an dernier.

Les régions «mangent le coup»

Selon l’Union des municipalités du Québec (UMQ), cette suspension arrive «à un bien mauvais moment», surtout dans un contexte où les régions du Québec «tentent par tous les moyens de relancer leur économie et d’attirer des visiteurs cet été».

«Nos aéroports régionaux sont des outils précieux de développement économique. Si les avions n’y atterrissent plus, c’est la vitalité de nos régions qui en paye le prix», a soutenu par communiqué la présidente de l’UMQ et mairesse de Sainte-Julie, Suzanne Roy.

«Le quasi-monopole des liaisons aériennes régionales génère aujourd’hui un enclavement partiel de nos régions», a-t-elle ajouté.

Selon Daniel Côté, premier vice-président de l’UMQ, le retrait d’Air Canada pourrait également être l’occasion «de revoir nos façons de faire en matière de transport aérien régional, et cela, avec tous les acteurs du milieu».

La Fédération québécoise des municipalités (FQM) a pour sa part demandé au ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, une intervention d’urgence pour empêcher Air Canada de mettre fin à «ces dessertes essentielles pour l’économie des territoires affectés».

Le Réseau québécois des aéroports interpelle les gouvernement fédéral et provincial, en signalant que «le service aérien en région est plus que jamais menacé».

Dans un communiqué transmis mardi soir, le regroupement d’aéroports se demande même si les opérations pourront reprendre, le moment venu.

Le porte-parole du Parti québécois en matière de transports et député des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau, affirme pour sa part que «l’annonce d’Air Canada est lourde de conséquences».

«La ville de Gaspé se retrouve sans liaison commerciale, alors que les dessertes aériennes de Mont-Joli, de Baie-Comeau et de Val-d’Or seront considérablement réduites. Or, pour les régions du Québec, pour l’occupation, le développement du territoire et la relance économique, le transport aérien est primordial», a-t-il fait valoir dans un communiqué.

À Ottawa, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a réclamé une «intervention réglementaire» qui obligerait les transporteurs, et en particulier Air Canada, «à offrir un service décent, partout là où c’est nécessaire, et en particulier en période de sortie d’une crise grave».

C’est encore une fois l’est du Québec, et «les régions dont Montréal est éloignée», qui «mangent le coup», selon lui.

«Il y aura des Québécois dans les régions (…) qui auront le proverbial « pompon » de se faire avoir», a déclaré M. Blanchet.

«Ça prend juste une colonne vertébrale», a ajouté le chef du Bloc, prévenant le premier ministre Justin Trudeau qu’il pourrait payer le prix de l’abandon des régions au Québec lors des prochaines élections.

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Liaisons touchées au Québec:

— Baie-Comeau-Montréal

— Baie-Comeau-Mont-Joli

— Gaspé-Les Îles-de-la-Madeleine

— Gaspé-Québec

— Sept-Îles-Québec

— Val-d’Or-Montréal

— Mont-Joli-Montréal

— Rouyn-Noranda-Val-d’Or 

 

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