Alexandre Bissonnette écope d’une peine de 40 ans de prison

QUÉBEC — Le 29 janvier 2017 est «une date qui demeurera à jamais inscrite en lettres de sang dans l’histoire de cette ville, de cette province, de ce pays», a déclaré vendredi le juge François Huot, de la Cour supérieure, en condamnant le tireur de la mosquée de Québec à une peine de prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 40 ans.

Alexandre Bissonnette a abattu six hommes lorsqu’il a fait irruption, armé d’une carabine semi-automatique et d’un pistolet, dans la salle de prière de la mosquée, blessant aussi plusieurs personnes par ses balles. Il a fait six veuves et 17 orphelins lors de cette froide soirée de janvier — en moins de deux minutes.

«Par votre haine et votre racisme, vous avez détruit la vie de dizaines et de dizaines de personnes», a ajouté le juge vendredi après-midi dans une salle comble du palais de justice de Québec, après près de six heures de lecture de sa décision.

La Couronne réclamait pour Bissonnette une peine de prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 150 ans.

Dans sa décision de 246 pages, le juge Huot a déclaré que cette suggestion de la Couronne était déraisonnable. Pour lui, une peine dépassant l’espérance de vie est «absurde». Mais la demande de la défense, qui souhaitait que Bissonnette, qui a maintenant 29 ans, ait la possibilité de réintégrer la société après 25 ans, n’était pas non plus adéquate.

Comme il a plaidé coupable à six accusations de meurtre prémédité, il écopait automatiquement d’une peine de prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Le juge pouvait toutefois imposer une durée plus longue.

Après avoir énoncé que selon lui, une période d’inadmissibilité de 35 à 42 ans serait juste et appropriée, le magistrat a finalement tranché pour 40 ans.

Ce qui ne veut pas dire que Bissonnette pourra sortir de prison après cette période de temps, mais plutôt qu’il pourra formuler cette demande à la Commission des libérations conditionnelles, qui pourra lui dire non, et le garder derrière les barreaux.

Il sera âgé de 67 ans lorsqu’il pourra présenter sa première demande de libération.

Bissonnette a reçu la plus longue peine à avoir été décernée dans l’histoire récente du Québec.

La décision du magistrat a été accueillie dans le silence. Bissonnette est resté impassible, tout comme ses parents, assis non loin du box de l’accusé. Les nombreux membres de la communauté musulmane qui étaient présents dans la salle sont aussi restés silencieux.

Pourtant, au cours de la journée, plusieurs femmes pleuraient doucement lorsque les victimes étaient évoquées. Certaines avaient éclaté en sanglots et dû quitter la salle.

Aymen Derbali s’est dit surpris de la peine imposée. «On aurait aimé que justice soit rendue à toutes les victimes», avec une peine à la hauteur du crime commis, a déclaré l’homme qui a été gravement blessé lors du carnage et qui sera pour toujours confiné à son fauteuil roulant.

Déception et surprise, a ensuite résumé Boufeldja Benabdallah, le président du Centre culturel islamique de Québec, où se trouvait la mosquée frappée par le drame. Il a été avare de commentaires, mais trouve que l’accent a été plus mis sur la préservation de la dignité de Bissonnette que de celle des victimes.

Ceux qui sont morts sous ses balles sont Mamadou Tanou Barry, âgé de 42 ans, Abdelkrim Hassane, 41 ans, Khaled Belkacemi, 60 ans, Aboubaker Thabti, 44 ans, Azzeddine Soufiane, 57 ans, et Ibrahima Barry, 39 ans.

Le juge parle à Bissonnette

Vers 15 h 30, le juge Huot a demandé à Alexandre Bissonnette de se lever, et s’est adressé directement à lui, lui signalant qu’il s’apprêtait à recevoir une «peine exemplaire».

«De manière à décourager ceux qui, partageant votre vision sectaire, ambitionneraient de suivre vos traces. L’intolérance et le racisme pourrissent notre tissu social. Il est du devoir des tribunaux de les réprimer fermement lorsqu’ils se matérialisent en actes criminels.»

Le magistrat a dit prendre en compte dans le choix de sa peine «le haut degré de préméditation et la planification de l’attentat», la violation d’un lieu de culte, le nombre de victimes et l’«indéfinissable violence» commise à leur égard.

Mais il indique aussi avoir tenu compte de son état mental: «Je ne peux vous punir comme je l’aurais fait à l’égard d’un homme en pleine possession de toutes ses facultés». Les problèmes de santé mentale étaient omniprésents: troubles anxieux, attaques de panique et dépression. Il avait d’ailleurs tenté de s’enlever la vie auparavant.

Le juge a aussi noté favorablement ses perspectives de réhabilitation et les remords qu’il a exprimés, «deux fois plutôt qu’une, dans cette même enceinte». Son risque de récidive a été qualifié de «modéré» par les experts qui ont témoigné.

Pour imposer une période d’inadmissibilité de 40 ans, le juge a dérogé aux prescriptions de l’article 745.51 du Code criminel. Celui-ci permet le cumul de périodes d’inadmissibilité de 25 ans dans le cas de meurtres multiples, de sorte que le juge au dossier peut imposer 25 ans, 50 ou 75 ans avant qu’une personne puisse demander à être libérée conditionnellement — mais rien entre ces chiffres.

Il a déclaré que cet article, tel que rédigé, viole la Charte canadienne des droits et libertés, dont le droit à la vie et le droit pour un citoyen de ne pas subir de traitements et de peines cruels et inusités.

Le juge Huot n’a toutefois pas jugé nécessaire de déclarer l’article invalide, mais l’interprète et le réécrit de façon à redonner un véritable pouvoir discrétionnaire au juge qui tente de déterminer la peine juste et appropriée pour chaque cas précis.

Le procureur de la Couronne, Thomas Jacques, a déclaré peu après le prononcé de la peine qu’il devait prendre le temps d’étudier le très long jugement avant de décider s’il sera porté en appel. Des propos similaires ont été tenus par l’un des avocats de la défense, Charles-Olivier Gosselin.

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Facteurs aggravants retenus par le juge

1. La planification et la préméditation de l’attentat

2. Le nombre de victimes (six morts et cinq blessés)

3. Le lieu de l’infraction (un lieu de culte)

4. La vulnérabilité des victimes

5. Le jeune âge de quatre victimes (des enfants présents à la mosquée ce soir-là)

6. Le degré de violence

7. Les motivations du crime (haine et racisme)

8. Séquelles physiques et psychologiques des victimes de tentative de meurtre

9. Séquelles subies par les proches et la société

Circonstances atténuantes retenues par le juge

1. Absence d’antécédent judiciaire

2. Collaboration avec les autorités

3. Les plaidoyers de culpabilité (qui évitent un pénible procès aux proches des victimes)

4. Les remords exprimés

5. La vulnérabilité de l’accusé

6. L’état mental de l’accusé

7. Le support familial

8. Les perspectives de réhabilitation

9. Le risque de récidive (modéré)

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Le nom du « juge » François Huot, aussi, passera à la postérité, pour les mauvaises raisons, comme celui de Pilate, ou plus bassement, d’un Fouquier-Tinville. Car, ce procès est hautement politique. En effet, à parcourir son jugement, on s’aperçoit rapidement de son caractère arbitraire, voire fabriqué, comme ceux des Socrate, Charles Ier, Louis XVI, Riel, Nuremberg, entre autres! En premier lieu, sa relation des faits ne tient aucun compte du cafouillis des témoignages du départ: DEUX individus cagoulés font irruption dans la Mosquée et le massacre s’ensuit. De plus, immédiatement, le mongol à Trudeau fait pression auprès de la « Fox News », pour exonérer Mohammed Belkhadir, le deuxième cagoulé… De sorte que l’accusation de racisme est hautement ébranlée, au point de réduire l’intention à la simple vengeance, comme le Dr. Turcotte, qui n’a écopé que de 17 ans… D’un autre côté, la peine est loufoque. Car, ou bien on cumule les crimes, ou bien on juge pour le crime, en général: c’est 25 ans ou 150 ans. Couper la poire en deux revient à permettre à un Dandin, des « Plaideurs », de juger de la Constitution, ce que la science juridique, avec un Beccaria, a toujours dénoncé. C’est pourquoi, une peine de 25 ans, à mon avis aurait été amplement suffisante, compte tenu de la jurisprudence « Turcotte », pour vengeance, parce que l’établissement des faits est encore très nébuleux, et qu’un casuiste n’a pas à juger de la loi. En résumé, comme les procès de Moscou, au XXe siècle, le pouvoir, en l’occurrence le multiculturalisme « canadian », recherche l’autocritique, cette fois, par contre, d’un peuple entier : les canadiens-français…