WILMINGTON, Del. — Les présidents Joe Biden et Vladimir Poutine se sont entretenus pendant près d’une heure jeudi soir dans un contexte d’inquiétude croissante concernant le renforcement des troupes russes près de l’Ukraine. Cette crise s’est aggravée lorsque le Kremlin a renforcé son insistance sur les garanties de sécurité à la frontière et a testé des missiles hypersoniques pour souligner ses exigences.
Joe Biden a réaffirmé la menace américaine de nouvelles sanctions à l’encontre de la Russie en cas d’escalade ou d’invasion, ce à quoi Vladimir Poutine a répondu en avertissant lui-même qu’une telle mesure américaine pourrait entraîner une rupture totale des liens entre les deux pays.
«Ce serait une erreur colossale qui entraînerait de graves conséquences», a déclaré le conseiller de Vladimir Poutine pour les affaires étrangères, Yuri Ushakov, qui a informé les journalistes à Moscou après la conversation téléphonique entre les deux chefs d’État. Selon lui, Vladimir Poutine aurait dit à Joe Biden que la Russie agirait comme les États-Unis si des armes offensives étaient déployées près des frontières américaines.
Les responsables de la Maison-Blanche ont fait une lecture beaucoup plus discrète de l’entretien téléphonique, suggérant que les dirigeants ont convenu qu’il existe des domaines dans lesquels les deux parties peuvent faire des progrès significatifs, mais aussi des différences qui pourraient être impossibles à surmonter.
La porte-parole de la Maison-Blanche, Jen Psaki, a affirmé que Joe Biden avait «exhorté la Russie à désamorcer les tensions avec l’Ukraine» et «précisé que les États-Unis et leurs alliés et partenaires répondraient de manière décisive si la Russie envahissait à nouveau l’Ukraine».
Vladimir Poutine a demandé cet appel, le deuxième entre les deux dirigeants au mois de décembre, avant les entretiens prévus entre les hauts responsables américains et russes les 9 et 10 janvier, à Genève.
Selon des responsables de la Maison-Blanche, l’appel de jeudi a duré 50 minutes et s’est terminé après minuit à Moscou.
La voie diplomatique demeure ouverte
Selon un haut responsable de l’administration Biden, le président américain aurait affirmé à son homologue russe que les deux puissances étaient désormais confrontées à «deux voies»: la diplomatie ou la dissuasion américaine par le biais de sanctions. Selon le fonctionnaire qui a informé les journalistes sous couvert d’anonymat, Joe Biden aurait ainsi mentionné que la voie choisie «dépendra des actions de la Russie dans la période à venir».
La Russie a clairement indiqué qu’elle voulait un engagement écrit selon lequel l’Ukraine ne serait jamais autorisée à rejoindre l’OTAN et que les équipements militaires de l’alliance ne seraient pas positionnés dans les anciens États soviétiques, des demandes que l’administration Biden a rejetées.
Joe Biden a affirmé à Vladimir Poutine que la voie diplomatique restait ouverte, alors que les Russes ont envoyé environ 100 000 soldats en Ukraine et que les responsables du Kremlin ont augmenté le volume de leurs demandes de nouvelles garanties de la part des États-Unis et de l’OTAN.
Les exigences de la Russie doivent être discutées lors des pourparlers à Genève en janvier, mais on ne sait toujours pas ce que Joe Biden serait prêt à offrir au président russe en échange du désamorçage de la crise, le cas échéant.
Les documents de sécurité soumis par Moscou demandent à l’OTAN de refuser l’adhésion de l’Ukraine et d’autres anciens pays soviétiques et de réduire les déploiements militaires en Europe centrale et orientale.
Les États-Unis et leurs alliés ont refusé d’offrir à la Russie le type de garanties sur l’Ukraine que souhaite Vladimir Poutine, invoquant le principe de l’OTAN selon lequel l’adhésion est ouverte à tout pays remplissant les conditions requises. Ils ont toutefois accepté de tenir des pourparlers avec la Russie pour discuter de ses préoccupations.
La proposition de Moscou en matière de sécurité a soulevé la question de savoir si Vladimir Poutine ne formule pas des exigences irréalistes dans l’attente d’un rejet occidental qui lui donnerait un prétexte pour envahir l’Ukraine.
En 2014, les troupes russes ont pénétré dans la péninsule de Crimée, sur la mer Noire, et se sont emparées du territoire ukrainien. L’annexion de la Crimée par la Russie a été l’un des moments les plus sombres pour le président Barack Obama sur la scène internationale.