MONTRÉAL — Yves-François Blanchet a tendu la main aux militants souverainistes de tous les partis lors de son lancement de campagne à la direction du Bloc québécois, tout en avouant qu’il devait «apprivoiser» les députés de Québec solidaire, qui étaient absents à son événement.
«Patience. Il faudra des années pour que tout ce monde-là se réapprivoise… Le Parti québécois et Québec solidaire ne sont pas encore invités au même souper», a-t-il déclaré devant une centaine de militants du Bloc québécois qui étaient rassemblés samedi après-midi au Cabaret Lion d’Or, à Montréal.
Pendant son discours, M. Blanchet, un ancien ministre du gouvernement péquiste de Pauline Marois, a également admis qu’il s’était senti comme un «corps étranger» lorsqu’il a rencontré récemment le caucus de Québec solidaire.
Yves-François Blanchet peut compter sur le soutien de neuf des dix députés du Bloc québécois, et de plusieurs anciens candidats du Parti québécois aux dernières élections provinciales. L’aspirant-chef a aussi reçu l’appui de la députée péquiste de Marie-Victorin, Catherine Fournier.
Cette course à la direction ressemble de plus en plus à un couronnement, puisque M. Blanchet fait face actuellement à aucun adversaire. Le député bloquiste de Terrebonne, Michel Boudrias, qui semblait désireux de poser sa candidature, a décidé la semaine dernière de ne pas se présenter.
Après des mois de déchirements, le Bloc espère que ses militants s’unissent en vue des élections fédérales de 2019 qui approchent à grands pas. Et plusieurs croient que Yves-François Blanchet est le meilleur pour rallier les troupes.
Il n’y avait toutefois samedi aucune personnalité d’une autre famille souverainiste: Québec solidaire. Une certaine confusion régnait quant à leur présence à l’événement. Le Bloc québécois assurait samedi que les deux porte-parole, ainsi que les députés solidaires avaient été invités.
Cependant, Québec solidaire a affirmé samedi que la co-porte-parole Manon Massé avait été invitée vendredi en fin de journée pour le lancement de samedi. Comme elle avait déjà d’autres engagements, elle n’a pas pu y être, a indiqué la responsable des relations avec les médias du parti, Stéphanie Guévremont. Les neuf autres députés n’ont pas été invités, a-t-elle ajouté.
Tendre la main à tous les souverainistes
Interrogé sur l’absence des députés solidaires en point de presse, M. Blanchet a dit qu’il ne s’attendait pas à les voir à son lancement.
«L’apprivoisement commence, a-t-il indiqué. La conversation va simplement continuer.»
«Le Bloc va faire son offre, et je n’ai pas l’intention de solliciter des appuis des partis politiques à Québec. Ce ne sont pas les dirigeants des partis politiques que je veux interpeller, ce ne sont pas des élus», a-t-il expliqué.
Il a poursuivi en disant qu’il ne voulait pas «jouer la game de la convergence».
«Moi je dis à tout le monde: si vous êtes souverainistes, pour qui que soit que vous votiez à l’Assemblée nationale du Québec, le Bloc est pour vous.»
Malgré cette absence des députés solidaires, des militants bloquistes ont assuré que le projet de refondation du parti voulait tenir compte des souverainistes de toutes les allégeances politiques.
En entrevue, Camille Goyette-Gingras, présidente du Forum jeunesse du Bloc, indique que plusieurs jeunes solidaires sont dans les rangs du Bloc, notamment grâce au message environnemental que le parti veut mettre au coeur de son programme.
«Nous, au Forum jeunesse, on en a des gens de tous les milieux indépendantistes», a-t-elle martelé, ajoutant que les militants solidaires étaient «curieux» de ce que le Bloc a à proposer.
La blessure de 2011
En 2011, l’ancien député de Québec solidaire Amir Khadir avait invité les Québécois à voter pour le Nouveau Parti démocratique, ce qui avait jeté un froid entre les deux partis. Cela avait profondément irrité le chef bloquiste de l’époque, Gilles Duceppe, qui ne semble pas avoir décoléré, depuis.
«Moi, je pense que quand on est souverainiste, on est souverainiste tout le temps, pas de temps en temps», a-t-il indiqué en entrevue.
«Il faut être cohérent. On ne peut pas être pour Hugo Chavez, et être contre le pétrole. Ce n’est pas un producteur laitier, on s’entend-tu?», a-t-il ajouté, faisant référence au défunt dictateur socialiste du Venezuela. Pendant la dernière campagne électorale, les deux partis souverainistes se sont déchirés, le Parti québécois accusant Québec solidaire d’être marxiste et trop proche des idées d’extrême-gauche.
Le député bloquiste Simon Marcil croit toutefois que son parti est passé à autre chose, depuis.
«C’est de l’histoire ancienne. Moi, je n’étais même pas député à ce moment-là, a-t-il soutenu. S’il y en a qui veulent embarquer dans le train, ils embarqueront. Ceux qui ne veulent pas, ils n’embarquent pas.»
Les éventuels candidats ont un mois pour amasser 15 000 $ et 500 signatures dans au moins 15 circonscriptions.
Si personne ne veut se mesurer à Yves-François Blanchet, celui-ci deviendra chef du parti lorsque se terminera la période de mise en candidature le 15 janvier. Dans l’éventualité où il y aurait d’autres candidatures, le chef serait choisi le 24 février.