Budget Girard: les patrons satisfaits; les syndicats restent sur leur faim

QUÉBEC — Le milieu des affaires salue les priorités du deuxième budget Girard, sauf pour les investissements en main-d’oeuvre, jugés insuffisants dans un contexte de difficultés de recrutement et de rétention.

Yves-Thomas Dorval, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec, se réjouit particulièrement des investissements dans la santé, l’énergie, les infrastructures, l’éducation, l’adaptation aux changements climatiques.

Mais en matière d’employabilité, «c’est mince» dans un contexte de rareté de main-d’oeuvre dans bien des secteurs. «Les enjeux sont tels qu’il faut changer les paradigmes. Or, rien sur l’immigration ou pratiquement rien. Ce n’est pas ça qui va faire la différence», a déploré M. Dorval en entrevue.

Véronique Proulx, présidente-directrice générale des Manufacturiers et exportateurs du Québec, voit aussi là «un bon budget équilibré», notamment pour accompagner les industriels dans la transition énergétique.

Mais pour la formation, «c’est décevant; c’est très peu, sachant que la pénurie de main-d’oeuvre, c’est l’enjeu numéro un de tous les employeurs au Québec».

À la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le président Michel Leblanc applaudit également à ce «budget intelligent, qui cible les bonnes priorités», comme la transition énergétique et la technologie, souligne-t-il.

«Le gouvernement met les bons incitatifs pour que ça se fasse le plus rapidement possible. Les entreprises vont s’en servir», juge M. Leblanc.

Travailleurs

Du côté syndical, les acteurs trouvent généralement que les réinvestissements dans les services publics ne sont pas suffisants, compte tenu de ce qui a été amputé lors des années passées.

«En éducation la hausse est de 4,5 pour cent, mais l’an passé c’était 6,7 pour cent. Donc on va dépenser 2,2 pour cent de moins que l’an passé. Or, est-ce que ça va mieux en éducation? Ben non, ça ne va pas mieux en éducation! Il aurait fallu à tout le moins dépenser le même montant que l’an passé, sinon plus. Même chose en santé», a lancé le président de la FTQ, Daniel Boyer, en entrevue.

En matière de formation aussi, M. Boyer est déçu. «Il faut permettre aux travailleurs et travailleuses de suivre le rythme de la modification des emplois et d’acquérir les compétences des emplois de demain.»

À la CSN aussi, le président Jacques Létourneau déplore que les réinvestissements en santé et en éducation ««ne sont pas à la hauteur de ce qu’on souhaitait».

Il donne une bonne note aux investissements en transport collectif, mais aurait souhaité lui aussi plus de fonds en formation.

Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques, s’étonne aussi du peu d’investissement en formation de la main-d’oeuvre. «Vingt-neuf millions de dollars sur cinq ans, qu’est-ce que vous voulez qu’on fasse avec ça?» s’est-il exclamé.

Éducation

Sonia Éthier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec, juge «insuffisant» le réinvestissement en éducation, ce «rendez-vous manqué».

«Il y a très peu de classes pour les élèves en besoins particuliers, mais des classes spéciales pour les élèves doués», déplore-t-elle. «C’est contraire à ce qu’on réclame depuis longtemps, parce que la mixité, c’est gage de succès», a déploré Mme Éthier.

Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l’enseignement, se dit «très déçu» des investissements en éducation. «On nous dit: « continuez à faire plus avec moins », alors qu’on est en pénurie de personnel et qu’il y a augmentation de la population scolaire. Une chance que l’éducation c’est sa priorité! Ça serait quoi autrement?» s’est-il exclamé.

Santé

Andrée Poirier, présidente de l’APTS (Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux), applaudit au moins aux réinvestissements en protection de la jeunesse, en services sociaux.

«On a l’impression d’entendre que la santé publique et les services sociaux redeviennent des acteurs-clés de la santé globale de la population du Québec. Mais est-ce qu’on va être capable d’aller chercher du personnel pour aller travailler dans le réseau de la santé et des services sociaux? C’est plus la préoccupation qu’on a», a-t-elle résumé.

Écologistes

Du côté de Greenpeace, Patrick Bonin estime que le budget Girard rate le bateau en matière environnementale, est trop timide.

«Ce budget présente des investissements supplémentaires en transport collectif et dans la lutte contre les changements climatiques, mais c’est loin d’être à la hauteur de ce qui est requis, de la structuration et du virage drastique économique qu’on doit faire dans tous les secteurs», a-t-il argué.