CHSLD: Québec semble incapable d’éliminer les mouvements de personnel

QUÉBEC — Les mouvements de personnel dans les CHSLD sont bannis, et pourtant il y en a encore, menaçant la santé des patients âgés.

Après deux mois et demi de pandémie et des consignes strictes, le gouvernement Legault n’a toujours pas réussi à éliminer les mouvements de personnel d’un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) à un autre.

Et la ministre de la Santé, Danielle McCann, s’est montrée incapable, vendredi, de prédire quand cette pratique, fort risquée sur le plan sanitaire, serait révolue.

«Je n’ai pas de date précise» à offrir, a répondu la ministre à une question à ce sujet du député libéral de Pontiac, André Fortin, vendredi, en commission parlementaire virtuelle.

Par exemple, dans certains CHSLD de la région de Montréal, les infirmières responsables des quarts de nuit peuvent devoir travailler dans plusieurs établissements. Une autre pratique décriée et risquée, mais toujours en vigueur, consiste à passer d’une zone «chaude», où se trouvent des patients contaminés, à une zone «froide», où les bénéficiaires ne le sont pas.  

Le fait que des professionnels de la santé agissent ainsi a pourtant été identifié comme une des causes de la propagation du virus de la COVID-19 dans les CHSLD, voire une des causes du nombre élevé de décès survenus dans ces établissements, devenus l’épicentre de la pandémie au Québec.

Une fois de plus, la pratique a été dénoncée par la ministre McCann lors de cette commission parlementaire virtuelle de deux heures, au cours de laquelle elle a dû répondre aux questions des trois porte-parole en santé des partis d’opposition. Mais elle n’a pu que constater que cette façon de faire était toujours en vigueur, bien qu’exceptionnelle, selon elle.

«Nous voulons que ça cesse complètement», a-t-elle martelé, rappelant que l’arrêté ministériel 007, adopté par son gouvernement en mars, octroyait aux gestionnaires du réseau le pouvoir de réorganiser les horaires de travail du personnel de manière à mettre fin à ce genre de pratique jusqu’au terme de la pandémie.

En remplacement, le gouvernement préconise de créer des «équipes dédiées» à un seul établissement, afin de limiter la propagation du virus.

Malgré cela, la pénurie de personnel est telle que la règle est apparemment difficile à observer. La ministre en donne pour exemple le fait qu’on compte 10 000 employés du réseau qui manquent à l’appel présentement, pour toutes sortes de raisons.

«Nous voulons vraiment que cessent les risques de propagation», a insisté la ministre, affirmant qu’il s’agissait là de sa priorité dans la lutte menée contre le virus.

Mme McCann est même allée encore plus loin, en affirmant que cette nouvelle organisation du travail était là pour rester.

Adieu, donc, aux «postes multi-sites» et aux «équipes volantes» dans le réseau de la santé, même une fois la pandémie derrière nous, a-t-elle annoncé.

«On ne peut pas revenir à ce qui existait avant», selon la ministre, consciente que sa position obligera le gouvernement à embaucher beaucoup plus de personnel afin de prévenir les infections.

Dans le même esprit, Québec verra à recruter davantage de gériatres et de microbiologistes.

1791 appels à l’aide

Par ailleurs, la ministre McCann a dit avoir reçu à ce jour 1791 courriels d’employés du réseau de la santé, depuis qu’elle a leur a lancé le message, à la mi-mai, de dénoncer, sans crainte de représailles, les situations inacceptables qu’ils observaient dans leur milieu de travail.

La réponse ne s’est donc pas fait attendre.

«On peut penser que ça répond à un besoin», a convenu la ministre, en réponse à une question du député solidaire Sol Zanetti.

Parmi les problèmes soulevés, notons les mouvements de personnel d’un CHSLD à l’autre, les transferts d’employés des zones chaudes aux zones froides et le manque d’équipement de protection. 

Les questions et dénonciations expédiées via la plateforme confidentielle «On vous écoute» du ministère de la Santé seront traitées le plus rapidement possible, a-t-elle promis.

Selon elle, cette initiative constitue «un signal fort pour mettre fin à l’omerta» dans le réseau de la santé.