HALIFAX — Une autre communauté mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse a lancé sa pêche autoréglementée, même si elle a souffert de la décision de la première nation Sipekne’katik de pêcher le homard hors saison.
La cheffe Carol Dee Potter, de la communauté mi’kmaq de Bear River, indiquait dans un communiqué lundi que les Autochtones de Sipekne’katik ne l’avaient pas consultée avant de lancer une pêche hors saison le 17 septembre dernier dans la baie de Sainte-Marie, provoquant une série de manifestations violentes et du vandalisme.
«Au cours des dernières semaines, nos pêcheurs ont été expulsés de cette zone en raison du conflit en cours», a déclaré Mme Potter. «Il est difficile de voir comment on peut progresser (…) alors que tant de gens ont l’intention d’aggraver la situation dans la baie de Sainte-Marie.»
Le chef des Mi’kmaq de Sipekne’katik, Mike Sack, s’est réjoui d’apprendre que la communauté de Bear River organisait sa propre pêche autoréglementée dans la même baie. Mais Mme Potter soutient que la communauté de Sipekne’katik avait causé des dommages collatéraux au cours du mois dernier.
La cheffe Potter rappelle que sa communauté avait travaillé sans relâche pour rétablir les ponts avec les communautés non autochtones après l’arrêt Marshall de la Cour suprême du Canada en 1999. Cet arrêt confirme que les communautés Mi’kmaq, Malécites et Passamaquoddy de l’est du Canada pouvaient chasser, pêcher et se rassembler pour gagner «un moyen de subsistance convenable», en vertu de droits issus de traités.
Des pêcheurs commerciaux allochtones rappellent toutefois que l’arrêt de la Cour suprême avait été suivi d’une clarification selon laquelle les fonctionnaires fédéraux pouvaient réglementer les pêches autochtones pour conserver les stocks, à condition qu’Ottawa puisse justifier ses actions.
Saper des décennies de travail
L’arrêt Marshall avait déjà déclenché de violents affrontements à l’époque, lorsque certaines communautés autochtones ont commencé à faire valoir leurs droits au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.
«Tout ce travail au cours des dernières décennies est rapidement érodé par d’autres qui quitteront bientôt cette zone, nous laissant ramasser les morceaux», a déclaré la cheffe Potter, qui souligne que sa communauté est plus proche de la baie de Sainte-Marie que toute autre Première Nation du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. La communauté de Sipekne’katik est située à l’intérieur des terres, au nord de Halifax, à environ 250 km à l’est de la baie.
Par ailleurs, deux autres communautés mi’kmaq au Cap-Breton — Potlotek et Eskasoni — ont lancé leur propre pêche autoréglementée dans la baie St. Peters le 1er octobre.
Enfin, comme la plupart des autres communautés mi’kmaq, celle de Bear River possède sa propre pêche commerciale au homard et participe régulièrement à une pêche alimentaire, sociale et rituelle, qui n’est pas commerciale. Ces deux pêches ont été mises sur pied avec l’aide d’Ottawa après l’arrêt historique de 1999.
La cheffe Potter appelle à des discussions sur les «pêches de subsistance» avec le gouvernement fédéral, les communautés mi’kmaq voisines et les pêcheurs allochtones. «Nous sommes très préoccupés par le fait que nous ne participons à aucune discussion portant sur la santé et la durabilité des ressources dans notre propre cour», a-t-elle déclaré. «Les obligations de Bear River sont des obligations de conservation, que nous devons au Créateur. Cela a toujours été la façon de faire des Mi’kmaq.»
Pendant ce temps, la communauté de Sipekne’katik a annoncé mardi qu’elle avait trouvé un acheteur pour une partie de ses prises, malgré les affirmations antérieures du chef Sack selon lesquelles les acheteurs et les fournisseurs locaux boycottaient ce homard. M. Sack assure que le nouvel acheteur, qu’il a refusé de nommer, n’achètera pas de homard récolté dans la pêche de subsistance.
Au cours des cinq semaines qui ont suivi l’ouverture de cette pêche, deux entrepôts de homard ont été la cible de vandales, l’une endommagée et l’autre détruite par le feu. Mercredi dernier, la communauté a obtenu une injonction du tribunal interdisant à quiconque de menacer ou de harceler ses membres impliqués dans la pêche ou ceux qui font affaire avec eux.