MONTRÉAL — Une étude portant sur l’impact des restrictions de voyage et du contrôle des voyageurs aux frontières en Chine démontre que de telles mesures ont vraisemblablement ralenti l’exportation de la COVID-19 depuis la Chine, mais qu’elles sont insuffisantes pour contenir la propagation globale de la maladie puisque la majorité des personnes porteuses arrivent à destination alors qu’elles n’ont pas encore de symptômes.
L’équipe dirigée par le chercheur Chad Wells, du Centre de modélisation et d’analyse des maladies infectieuses de l’Université Yale (Center for Infectious Disease Modeling and Analysis, Yale School of Public Health), au Connecticut, s’est penchée sur les données de propagation du virus en fonction de l’implantation des mesures imposées en Chine et des liaisons aériennes entre ce pays et le reste du monde.
Les chercheurs ont notamment évalué l’efficacité des mesures frontalières pour contenir la propagation de la maladie — dont l’interdiction de voyager, le pistage des contacts à l’épicentre de la pandémie et le dépistage à l’aéroport d’arrivée. La Chine a placé la ville de Wuhan en quarantaine le 23 janvier et 15 autres villes de la province de Hubei le lendemain. Parallèlement, les pays ayant des liaisons aériennes avec la Chine implantaient des contrôles aux douanes pour les passagers en provenance de ce pays.
Selon les évaluations des chercheurs, qui rappellent que la période d’incubation présymptomatique est de 5,2 jours en moyenne mais peut s’étendre à 12 jours chez certains individus, environ 64 % des cas exportés étaient en période d’incubation présymptômatique à leur point d’arrivée, ce qui laisse croire que le dépistage à l’aéroport d’arrivée n’est pas susceptible de prévenir l’importation du virus à lui seul.
Par contre, au point de départ, ils ont déterminé que les interdictions de voyage ont réduit le taux d’exportation du virus de 81 % et ont permis de contrer l’importation de 71 % des cas entre le moment de l’implantation des mesures en Chine en janvier et le 15 février 2020, comparativement à un modèle où il n’y aurait eu aucune restriction.
Ils en concluent qu’il est improbable que les mesures de contrôle frontalier réussissent à contenir la propagation, mais qu’elles sont susceptibles de retarder l’importation de cas de COVID-19 dans les premiers moments de l’épidémie.
Les auteurs estiment, à partir des chiffres de voyage et des modèles de propagation, que sans les restrictions de voyage, 779 cas de COVID-19 auraient été exportés en date du 15 février 2020. Leur modélisation conclut que, dans les faits et avec l’ensemble des mesures mises en place, ce nombre se situe plutôt à 234.
Quant aux cas exportés, ils évaluent que près des deux tiers étaient présymptômatiques à leur arrivée à destination, ce qui limitait considérablement la possibilité de les dépister par des contrôles à l’aéroport d’arrivée.
Les chercheurs estiment que d’autres mesures, notamment un pistage rapide des contacts à l’épicentre de l’éclosion et le fait, pour les voyageurs, de signaler à leur arrivée s’ils ont été exposés au virus et de s’isoler pourraient avoir un impact important pour ralentir et limiter une propagation globale.