COVID-19: une crise est imminente dans les refuges pour itinérants de Montréal

MONTRÉAL — Les dirigeants de certains refuges pour itinérants de Montréal font état d’une situation de crise, car la croissance de l’absentéisme du personnel à cause de la COVID-19 menace de causer des bris de service pendant la période la plus froide de l’hiver.  

Du 26 décembre au 1er janvier, des éclosions de coronavirus ont eu lieu dans 27 refuges de Montréal; 110 employés et bénéficiaires ont testé positif à la COVID-19 pendant cette période selon les autorités sanitaires.  

Michel Monette, directeur général de CARE Montréal, affirme qu’une crise humanitaire est aux portes. Dans une entrevue livrée jeudi, il a déclaré qu’environ 30 % de ses employés ne travaillaient pas et que 25 % des usagers avaient testé positif à la COVID-19.  

La fermeture de dizaines de lits sera envisagée si la situation ne s’améliore pas. Déjà, certains services ont été suspendus, notamment ceux d’aide psychosociale.  

« Les abris sont à pleine capacité, » selon M. Monette. « Chaque jour, trois ou quatre employés reçoivent un test positif et ça n’arrête pas. »   

Sam Watts, directeur de la Mission Bon Accueil, rapporte que les 108 lits d’hôtel réquisitionnés par la Ville de Montréal pour héberger des sans-abri sont déjà tous occupés. Sa principale inquiétude est toutefois la pénurie de personnel, en particulier dans les plus petits refuges, plus vulnérables.  

Si les services devaient être interrompus dans l’un ou l’autre des trois principaux refuges de la ville, la situation serait catastrophique, selon Sam Watts.   

Pourtant, il affirme que tous les moyens possibles sont déployés pour protéger le personnel des centres: usage de masques, tests rapides, distanciation et aménagement de cliniques de vaccination de troisième dose. Il assure que le taux de vaccination est élevé parmi son personnel, ce qui a peut-être évité le pire jusqu’ici.  

Nakuset, qui dirige le Foyer pour femmes autochtones de Montréal, signale pour sa part que son organisation a eu de la chance jusqu’ici cet hiver, avec peu de cas de COVID-19. À cause de la poussée du variant Omicron, le Foyer a décidé le mois dernier de ne plus admettre de nouveaux bénéficiaires, une mesure que Nakuset souhaite pouvoir lever dès que possible.  

Cependant, elle déplore que la Ville de Montréal ait déployé moins de ressources d’urgence cette année que l’an dernier, même si les défis sont plus importants. « Il y a plus de cas de coronavirus, plus de sans-abri que l’an dernier, mais moins de services, » a-t-elle dit en entrevue mercredi.  

Nakuset raconte qu’elle a dû mener une souscription pour maintenir ouverte une tente de réchauffement qui avait été aménagée l’an dernier après qu’un homme ait péri de froid dehors après la fermeture d’un refuge dans le centre-ville. Or, elle a appris que six travailleurs de la tente ont contracté la COVID-19.   

« On gère les choses sur une base quotidienne afin de garder le lieu assez sécuritaire pour le personnel et les usagers et ne pas avoir à fermer les lieux. »   

Dans un courriel, une porte-parole du cabinet de la mairesse Valérie Plante a affirmé que les autorités envisageaient la possibilité d’ouvrir d’autres centres d’hébergement d’urgence.  

La note affirme que « Nous n’avons jamais reculé devant notre responsabilité de répondre aux besoins des plus vulnérables et nous ne laisserons personne de côté ». Elle ajoute que la Ville a doublé en 2022 son budget alloué à la lutte à l’itinérance.  

Sam Watts et Marc Monette font toutefois observer que de nouveaux lits ne régleront pas tout; les refuges ont besoin de personnel de supervision.  

M. Watts espère une large réforme sur la fourniture de services aux itinérants dans la ville. Cela devrait comprendre des mécanismes de coordination permettant d’agir selon les besoins différents des usagers et leur état de santé plutôt que d’avoir une addition de ressources sous-financées.  

Le gouvernement du Québec devrait instaurer un système de supplément au loyer qui, selon Sam Watts, permettrait à certains itinérants de quitter la rue et d’être logés convenablement.