Des scientifiques canadiens célèbrent l’envolée historique du télescope James Webb

MONTRÉAL — Alors que partout dans le monde, des téléspectateurs ont suivi le décollage de la fusée qui transporte le télescope spatial James Webb le matin de Noël, des scientifiques canadiens qui ont joué un rôle crucial dans sa création étaient émus.

Le télescope, qui est une création de la NASA, de l’Agence spatiale canadienne (ASC) et de l’Agence spatiale européenne, s’est envolée samedi de la Guyane française sur la côte nord-est de l’Amérique du Sud, transporté par une fusée Arianne.

L’astrophysicienne Nathalie Ouellette, qui est la coordonnatrice scientifique canadienne du télescope, assistait avec sa famille au lancement tant attendu.

« Voir le télescope quitter la Terre… quelle joie pour Noël », a déclaré Ouellette en entrevue samedi.

«J’ai pleuré. Nous avons pris une vidéo pour commémorer ce moment. Le lancement s’est parfaitement déroulé.»

Le télescope recherchera des détails sans précédent sur les premières galaxies créées après le Big Bang et sur le développement de planètes potentiellement favorables à la vie au-delà de notre système solaire.

Pour Lisa Campbell, présidente de l’Agence spatiale canadienne, le lancement était l’aboutissement d’un rêve vieux de 30 ans.

«Quelle journée exceptionnelle», s’est exclamée Lisa Campbell.

«C’est l’observatoire spatial le plus puissant et le plus complexe jamais construit.»

Le Canada travaille sur le télescope spatial James Webb presque depuis le début et sera parmi les premiers pays à étudier ses découvertes, a-t-elle déclaré.

«C’est une nouvelle étape dans l’astronomie, dans la compréhension de l’univers et de notre place dans celui-ci», a ajouté la présidente de l’ASC.

« Et ces découvertes scientifiques seront possibles grâce à l’expertise du Canada en astronomie.»

Au moins la moitié des 600 scientifiques de la Société canadienne d’astronomie ont participé à la création du télescope et des dizaines d’ingénieurs font partie de son équipe de conception.

Nathalie Ouellette a noté que le travail du télescope ne fait que commencer.

La plupart des gens connaissent le télescope spatial Hubble – qui a été lancé en 1990 – mais Webb devrait être 100 fois plus puissant, a-t-elle déclaré.

«Nous parlons souvent de Webb comme du successeur de Hubble», a-t-elle expliqué.

«Webb est beaucoup plus gros, il capturera des objets plus éloignés avec une faible luminosité et approfondira l’histoire de l’univers.»

Le télescope de 10 milliards de dollars a commencé à foncer vers sa destination à 1,6 million de kilomètres, soit plus de quatre fois au-delà de la lune. Il faudra un mois pour y arriver et encore cinq mois avant que ses yeux infrarouges soient prêts à commencer à balayer le cosmos.

Pour y parvenir, le télescope utilisera un détecteur qui le guidera avec une extrême précision et un imageur et spectrographe sans fente dans le proche infrarouge, un instrument qui permettra aux astronomes d’observer des galaxies lointaines et d’étudier l’atmosphère d’exoplanètes.

Ces deux instruments ont été conçus et construits au Canada.

«Nous sommes les yeux du télescope, ce sont les yeux canadiens qui permettent toutes les observations», a déclaré Nathalie Ouellette.

« Le Canada n’avait jamais été impliqué à ce niveau dans ce genre de projet».

Le ministre de l’Innovation, François-Philippe Champagne, a publié une déclaration pour féliciter l’expertise canadienne, affirmant que les investissements passés dans les technologies spatiales ont permis au pays d’être « un partenaire actif dans cette mission passionnante ».

«Une fois de plus, le secteur spatial canadien repousse les limites de la science et, qui plus est, de l’astronomie », a déclaré M. Champagne. « Le télescope Webb est la plus grande mission spatiale scientifique des 60 ans du programme spatial canadien. »

Pour Daryl Haggard, professeur de physique à l’Université McGill de Montréal et co-chercheur pour le télescope spatial James Webb, l’appareil est une source de fierté indéniable.

«Nous regardions la vidéo du lancement, et mon mari faisait remarquer qu’il pouvait voir le logo de la NASA, mais aussi de l’Agence spatiale canadienne, juste là sur la fusée», a-t-elle déclaré, la voix brisée par l’émotion.

«C’est assez génial.»

Daryl Haggard a déclaré qu’elle espère que le projet mettra le Canada sur la carte pour son expertise astronomique.

Les gens se réfèrent généralement au bras spatial canadien, mais ce pays fait bien plus que cela, a-t-elle déclaré. Le bras robotique a participé à des missions de la navette spatiale américaine pendant environ 30 ans à partir de 1981.

En échange de sa contribution au télescope, le Canada est garanti d’avoir au moins cinq pour cent du temps d’observation du télescope, une fois que les données commenceront à arriver dans environ six mois.

Lisa Campbell a déclaré que cela permettrait aux scientifiques canadiens de poursuivre leurs études sur les exoplanètes et les trous noirs, entre autres.

«Nous pourrons voir des phénomènes à l’origine de la création de notre univers, son histoire», a-t-elle déclaré.

«Nous nous demandons souvent pourquoi nous explorons l’espace, mais cela nous en dira tellement.»

Avec la collaboration de l’Associated Press et de Bob Weber à Edmonton