OTTAWA — Des soldats canadiens seront à l’ouvrage dans les CHSLD du Québec au moins jusqu’au 26 juin. Après cette date, Ottawa voudrait les remplacer «progressivement» par des employés de la Croix-Rouge canadienne.
«On est en train de travailler avec la Croix-Rouge canadienne pour avoir des gens bien payés, bien formés, qui vont prendre la relève des militaires pour s’assurer que, jusqu’au 15 septembre, le Canada demeure là pour aider dans ces CHSLD», a précisé le premier ministre Justin Trudeau, vendredi avant-midi, en faisant cette annonce.
À Québec, la nouvelle a été mal accueillie par l’Assemblée nationale.
«Que l’Assemblée nationale rappelle que les Québécois contribuent à la hauteur de près de 4 milliards $ par année pour financer l’armée canadienne à même nos taxes et nos impôts; qu’elle demande au gouvernement canadien de prolonger la mission des militaires déployés dans les CHSLD du Québec jusqu’au 15 septembre 2020», déclare la motion rédigée par la députée indépendante Catherine Fournier et adoptée à l’unanimité.
Au bureau de la vice-première ministre Geneviève Guilbault, on a choisi la retenue.
«Nous accueillons avec ouverture le plan du gouvernement fédéral pour aider à soutenir nos CHSLD, mais il reste des éléments à clarifier», a écrit à La Presse canadienne le porte-parole de Mme Guilbault, Jean-François Del Torchio.
«Nous souhaitons arriver rapidement à une entente», a-t-il poursuivi, ajoutant que la demande d’aide jusqu’en septembre était maintenue, et que le gouvernement Legault ne ferait pas plus de commentaires pour le moment.
«Les 1000 personnes qui pourraient aider, c’était des soldats au début, dans les moments d’urgence; mais ça pourrait très bien aussi être des gens de la Croix-Rouge canadienne, bien formés, bien payés qui vont pouvoir prendre la tâche sans avoir ce « background » militaire qui n’est pas nécessaire aux services qu’on offre dans les CHSLD», a insisté M. Trudeau.
Le gouvernement fédéral assurerait le paiement de la facture jusqu’en septembre; «des dizaines de millions $», a suggéré une source au gouvernement Trudeau.
1000 militaires
«Je n’ai toujours pas eu de réponse à savoir qu’est-ce qu’il y a de plus urgent au Canada ou à l’étranger que de s’occuper de nos aînés dans les CHSLD», disait encore François Legault, jeudi.
Selon M. Legault, ils ne sont plus que 750 militaires au Québec, dont seulement 400 qui travaillent dans les CHSLD, les autres étant affectés à la supervision de l’opération, un «ratio» que M. Legault a également dénoncé.
«Je veux être clair: les 1400 membres des Forces armées de l’Opération LASER sont toujours au Québec et sont actuellement en train d’être redéployés dans des CHSLD qui en ont plus besoin», a déclaré M. Trudeau.
Invité à expliquer la différence entre les chiffres de Québec et ceux d’Ottawa, M. Trudeau a répondu que les militaires peuvent être en train de changer de CHSLD. «C’est pour ça que les (nombres) fluctuent un petit peu maintenant», a-t-il suggéré.
Plus tôt dans la journée, le chef par intérim du Parti conservateur s’est rangé résolument dans le camp du premier ministre Legault dans ce dossier.
«M. Legault a une requête raisonnable», a suggéré Andrew Scheer, en point de presse, vendredi matin. «Nous sommes (du) côté du premier ministre provincial qui a besoin de ressources additionnelles et c’est le gouvernement fédéral qui laisse tomber les provinces, qui laisse tomber les aînés», a-t-il accusé.
Par ailleurs, comme il le fait aux deux semaines, le ministère de la Défense nationale a mis à jour le nombre de cas de la COVID-19 chez ses soldats déployés en CHSLD. Au Québec, en date du 11 juin, 14 militaires présentaient des symptômes de la maladie, 22 autres en avaient été guéris. En Ontario, où un plus petit nombre de militaires oeuvrent dans les centres de soins pour aînés, on compte quatre cas encore actifs et 10 cas guéris.
Fièvre des voyageurs
Pendant des mois, la ministre fédérale de la Santé, Patty Hajdu, a assuré que la prise de température n’était pas un moyen efficace de prévenir la propagation du coronavirus. La ministre Hajdu se basait sur l’expérience vécue pendant l’épisode du SRAS, le syndrome respiratoire aigu sévère.
Voilà que le gouvernement fédéral change d’avis.
On vérifiera donc la température de tous les passagers qui prendront l’avion en direction du Canada. La mesure sera mise en place d’ici la fin du mois de juin. Puis, on étendra la pratique à ceux qui s’envolent du Canada vers l’étranger; ce sera fait d’ici la fin du mois de juillet. Enfin, d’ici la fin septembre, tous les passagers aériens à l’intérieur du pays seront soumis à cette vérification.
Tout passager fiévreux ne sera pas admis à bord d’un vol. On l’invitera à se réserver un départ 14 jours plus tard. «On travaille avec les compagnies aériennes pour qu’il n’y ait pas de pénalité dans le prix qu’ils seraient obligés de payer pour leur vol de remplacement», a indiqué le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau.
On vérifiera également la température du personnel dans les avions et des employés qui oeuvrent dans les sections restreintes des aéroports.
«Notre gouvernement prend note des nouvelles pratiques exemplaires qui sont en vigueur ailleurs dans le monde pour protéger les gens», a expliqué M. Trudeau, lors de son point de presse de vendredi.
Quant au temps que ça lui a pris pour arriver à cette «pratique exemplaire», M. Trudeau s’est justifié en rappelant que les vols internationaux avaient, de toute manière, presque tous été stoppés.
«On n’en avait pas besoin, mais maintenant, quand on commence à regarder la réouverture de l’économie, on commence peut-être à voir plus de gens venir au Canada dans les semaines à venir, on serait bien de faire comme beaucoup d’autres pays font et ajouter cette mesure additionnelle, qui n’est pas une mesure garantie (…) mais qui est une autre couche raisonnable», a offert le premier ministre.
«Ce n’est pas un test qui est aussi utile que ça, mais c’est une couche additionnelle pour encourager les gens qui sont malades de ne pas voyager», a conclu M. Trudeau.
Le ministre Garneau qualifie la chose de «mesure nationale de sécurité». Son coût n’est pas encore connu, mais, selon le ministre, il sera «modeste» et sera pris à même le budget de l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien.
Nombre de cas
Il y a eu plus de 2 028 000 tests administrés au Canada depuis le début de la pandémie. Environ 2 % d’entre eux ont détecté la maladie. On fait passer en moyenne 33 000 tests par jour au Canada.
Jusqu’à maintenant, on a recensé 97 943 cas confirmés ou probables dans l’ensemble du pays. La COVID-19 a provoqué la mort de 8049 Canadiens.
Distribution des cas au pays, selon les plus récents bilans provinciaux et territoriaux: 53 666 cas au Québec, dont 5148 décès; 31 726 cas en Ontario, dont 2498 décès; 7346 cas en Alberta, dont 149 décès; 2709 cas en Colombie-Britannique, dont 168 décès; 1061 cas en Nouvelle-Écosse, dont 62 décès; 663 cas en Saskatchewan, dont 13 décès; 301 cas au Manitoba, dont sept décès; 261 cas à Terre-Neuve-et-Labrador, dont trois décès; 154 cas au Nouveau-Brunswick, dont un décès; 27 cas à l’Île-du-Prince-Édouard, tous guéris; 11 cas au Yukon, tous guéris; cinq cas dans les Territoires-du-Nord-Ouest, tous guéris; aucun cas au Nunavut.
À ces bilans provinciaux et territoriaux s’ajoutent les 13 cas, tous guéris, chez les passagers rapatriés du navire de croisière Grand Princess le 10 mars.