WASHINGTON — Face à la menace de la COVID-19, les économies entrelacées du Canada et des États-Unis exigent une solution plus sophistiquée qu’une interdiction des voyages non essentiels, affirment des groupes d’entreprises, irrités par la perspective de six semaines de restrictions supplémentaires à la frontière.
Les voyages terrestres impliquant la frontière canado-américaine sont limités aux expéditions commerciales et aux travailleurs essentiels depuis la mi-mars.
Les deux pays ont négocié une interdiction mutuelle des voyages discrétionnaires, comme les vacances et les excursions de magasinage. Il semble maintenant que l’interdiction va se prolonger.
Visites, réunions en personne et réseautage sont devenus presque impossibles, a confié Garry Douglas, PDG de la North Country Chamber of Commerce, établie à Plattsburgh, dans l’État de New York.
«Ça bouleverse de plus en plus un tissu social unique, a dit M. Douglas. Plus ça dure, plus nous risquons de normaliser l’extrêmement anormal.»
L’interdiction de voyager doit expirer le 21 juin. Mais des échos des deux pays suggèrent qu’une nouvelle prolongation de 30 jours est probable.
M. Douglas comprend l’interdiction, mais déplore que le processus «semble désormais motivé par la peur et les sentiments», dit-il.
Il veut voir les détails d’une réouverture progressive fondée sur des faits et un engagement à normaliser les opérations frontalières.
Elise Stefanik et Brian Higgins, deux élus de l’État de New York de la Chambre des représentants des États-Unis et coprésidents du Northern Border Caucus, ont écrit au secrétaire par intérim à la sécurité intérieure, Chad Wolf, et au ministre canadien de la Sécurité publique, Bill Blair.
Ils demandent des directives nuancées au sujet du retour des choses un peu plus vers la normale.
«Nous sommes de plus en plus préoccupés par l’impact à long terme, ont-ils écrit. Il doit y avoir une coordination binationale en vue d’un plan permettant de voyager. Cela en tenant compte des considérations de santé publique, mais en gardant à l’esprit le caractère unique de nos économies interconnectées.»
La vice-première ministre Chrystia Freeland a déclaré que l’interdiction partielle a permis la circulation des biens et services vitaux et préservé les chaînes d’approvisionnement, tout en limitant au minimum le risque de propagation du virus.
Dans la foulée des assouplissements au confinement, il est temps de commencer à faire de même avec les voyages internationaux, croit le Canadian Travel and Tourism Roundtable.
«Nous apprenons à vivre avec le virus, a écrit l’organisme, dans une lettre. Au même titre que nous rouvrons nos maisons et nos entreprises, nous devons rouvrir les portes de nos provinces et nos territoires.»
John LaFalce est également de plus en plus frustré. Le résident de Buffalo a jadis été un membre du Congrès américain.
Comme bien des Américains, il possède des chalets de l’autre côté de la frontière, à Fort Erié. Il ne peut s’y rendre même si pour cela, il ne sera en contact avec personne.
M. LaFalce soupçonne que la Maison Blanche n’est pas pressée d’assouplir les restrictions, car la pandémie permet aux États-Unis d’empêcher les immigrants d’arriver du Mexique.
Le président Donald Trump défend depuis longtemps une ligne dure envers l’immigration.
«Cela a un effet assez néfaste, a dit M. LaFalce. Ceux qui possèdent des biens ou paient des impôts dans les deux pays devraient être autorisés à traverser, à condition de prendre les précautions nécessaires. Il me semble que si le président veut rouvrir les États-Unis, il devrait rouvrir au moins avec le Canada. Et le Canada devrait y être ouvert, avec les restrictions appropriées.»