Justin Bresaw: prison à vie sans libération conditionnelle avant 18 ans

AMOS, Qc — Le juge Étienne Parent, de la Cour supérieure a tranché : Justin Bresaw, aujourd’hui âgé de 43 ans, a été condamné à la prison à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 18 ans. Bresaw avait été reconnu coupable le 17 juin dernier des meurtres non-prémédités de René Deschâtelets, 71 ans, Diane Duhaime, 61 ans, et Jean-Guy Labelle, 57 ans. Le drame s’était déroulé le 17 septembre 2012, au domicile de Mme Duhaime, à Amos, en Abitibi. Bresaw avait ensuite mis le feu à la résidence pour tenter de maquiller les meurtres.

Le tout a commencé avec quelques minutes de retard, puisque Justin Bresaw refusait de sortir de sa cellule pour se rendre au centre de visioconférence. Le juge lui a donné toutes les chances de s’adresser à la Cour après le prononcé de la sentence, mais Bresaw a refusé net. L’audience a donc repris en l’absence de l’accusé, qui, dans un langage quelque peu vulgaire, a indiqué qu’il n’avait rien à dire à la Cour, et qu’il voulait qu’on le laisse tranquille.

Le juge Parent a expliqué dans le prononcé de la sentence que la prison à vie est une sentence automatique pour toute accusation de meurtre prémédité ou non-prémédité. Seule la période d’admissibilité à une libération conditionnelle peut varier. Le juge s’est rendu aux arguments présentés le mois dernier par la procureure du ministère public, Me Geneviève Lamontagne, qui réclamait que l’accusé ne soit pas admissible à une libération conditionnelle avant 18 ans. Elle avait alors basé son argumentation sur le caractère odieux des crimes commis, qui selon elle s’approchaient du meurtre prémédité. Elle s’appuyait aussi sur une volumineuse jurisprudence en pareille matière.

Dans le prononcé de sa sentence, le juge Parent a souligné lui aussi le caractère violent des meurtres. «Je me dois de souligner la cruauté dont a fait preuve l’accusé lors de la commission des actes. L’une des victimes (Jean-Guy Labelle) dormait lorsqu’il a été attaqué. Il s’agit là d’un facteur aggravant dans ce dossier. De plus, lors de sa fuite, l’accusé a menti à propos du véhicule qu’il avait volé à M. Labelle. Le véhicule a été retrouvé sévèrement endommagé près de la frontière américaine (à Havelock, en Montérégie), et l’accusé a tenté d’effacer toute trace de sa présence dans le véhicule.» De ce fait, le juge a souligné le caractère planifié de la commission des crimes, en ajoutant que lorsqu’il a incendié la demeure, Bresaw avait déjà déposé un sac à dos avec ses objets de valeur dans la voiture de M. Labelle.

La famille soulagée

Le juge Parent a rendu sa sentence en anglais, tel que requis par l’accusé. Il a cependant conclu son allocution en français, en s’adressant aux familles des victimes. «Je tiens à souhaiter bon courage aux familles, leur a-t-il dit. Je sais que cette sentence ne ramènera pas vos êtres chers, mais j’espère que vous pourrez maintenant entamer votre processus de deuil.»

La sœur de Diane Duhaime, Monique Duhaime, s’est faite la porte-parole des familles des victimes devant les journalistes présents. «Nous sommes soulagés, a-t-elle dit de façon laconique. Ça fait huit ans que nous attendions ce moment, pour pouvoir enfin faire notre deuil. Ça devenait frustrant à la longue, toutes ces procédures, car il fallait toujours se rappeler de tous les détails.»

De son côté, Me Lamontagne s’est dit somme toute satisfaite de la sentence, qui correspondait à ce qu’elle avait demandé lors du verdict de culpabilité rendu il y a un mois. «Ce fut un long processus, avec différentes requêtes et le désistement de la procureure de l’accusé (Me Julie Bolduc). Il fallait toujours également avoir le bien-être des familles des victimes en tête, tout en respectant les droits de l’accusé. Les familles ont été présentes tout au long des deux procès, je voulais m’assurer qu’elles comprennent bien ce qui se passait.»

Compte tenu du temps qu’il a déjà passé en détention, Justin Bresaw sera admissible à une libération conditionnelle en 2031. Il s’agit de la conclusion d’un processus judiciaire qui aura duré près de huit ans, puisque Bresaw avait été reconnu coupable par un jury lors d’un premier procès, tenu à Val-d’Or en 2015. La Cour d’appel du Québec avait cassé ce jugement, en raison d’un vice de procédure lors de l’adresse au jury à l’époque, et avait ordonné un nouveau procès. Ce second procès avait donné lieu lui aussi à de nombreux rebondissements, puisque l’accusé a tenté de faire valoir à la Cour qu’il ne pouvait être tenu responsable de ses crimes, en raison de sa santé mentale. Le juge Parent a finalement déterminé qu’il était apte à subir son procès.