La contestation d’un chirurgien concernant le privé en santé est rejetée en C.-B.

VANCOUVER — La Cour d’appel de la Colombie-Britannique a confirmé à l’unanimité le rejet de la contestation de la loi sur les soins de santé de la province par un chirurgien de Vancouver, affirmant que l’interdiction de l’assurance privée ne viole pas la Charte canadienne des droits et libertés.

Le plus haut tribunal de la province a toutefois estimé que le juge de première instance a erré dans son évaluation du droit à la vie. Il affirme dans son jugement que les dispositions de la loi privent certains patients non seulement de leur droit à la sécurité de la personne, mais aussi du droit à la vie.

Toutefois, la Cour a jugé que cette violation peut être annulée par l’article 1 de la Charte, qui stipule que les droits peuvent être limités si leur justification peut se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique.

Le juge en chef Robert Bauman et le juge David Harris ont conclu que l’objectif fondamental de la loi vise à s’assurer que l’accès universel aux soins de santé est basé sur la priorité des besoins et non pas sur la capacité de payer des patients.

Bien que les droits à la vie et à la sécurité de la personne soient axés sur l’individu, les juges affirment ne pas croire que les fondations du système de santé «puissent être prises en otage par le veto d’une personne qui en subit des conséquences négatives».

La cour reconnaît que la loi provinciale sur les soins de santé est «maintenue au coût de réelles difficultés et de souffrances subies par plusieurs patients en raison de l’échec du système à fournir les soins nécessaires en temps opportun», a écrit la juge Lauri Ann Fenlon, qui dans une position divergente conclut que l’article viole la Charte canadienne, mais peut être justifiée par l’article 1.

Le ministre de la Santé britanno-colombien Adrian Dix a salué la décision en soulignant que cettl oi mettait l’accent sur l’importance du système public qui constitue «une pierre angulaire de notre identité canadienne».

«Nous allons continuer de défendre vigoureusement notre système de santé financé et géré publiquement, qui valorise l’équité et la justice avant les profits», a-t-il réagi par voie de communiqué.

La Cour d’appel justifie sa décision en citant plus de 33 000 patients adultes qui étaient en attente de soins médicaux en Colombie-Britannique en date de mars 2018 et dont le délai de prise en charge avait dépassé la norme prévue. Plusieurs d’entre eux souffraient d’importantes douleurs; risquaient des séquelles permanentes; ou avaient des conditions où la rapidité d’intervention est cruciale comme des cancers.

Le Dr Brian Day a ouvert le Centre de chirurgie Cambie en 1996 en disant vouloir fournir plus de temps en salle d’opération aux chirurgiens qui ne parvenaient pas à obtenir de place dans les hôpitaux.

Puis, le Dr Brian Day s’est tourné vers les tribunaux pour contester la validité du «Medicare Protection Act», puisqu’il estime qu’empêcher des patients de payer pour des soins au privé afin d’éviter les délais du système public va à l’encontre de leurs droits.

Le Dr Day a lancé sa contestation en 2009, puis le dossier a escaladé jusqu’à la Cour suprême de la Colombie-Britannique en 2016. Il est accompagné de quatre patients en tant que codemandeurs.

Au terme d’un procès de quatre ans, la Cour suprême de la province a statué, en septembre 2020, que les avocats de M. Day et des autres plaignants n’avaient pas réussi à démontrer que les droits des patients étaient violés par la loi provinciale.

Le juge John Steeves a déterminé que les preuves soumises par les experts durant le procès avaient démontré que la duplication du système avec des services privés ne réduirait pas le temps d’attente dans le secteur public.

Par ailleurs, dans un communiqué signé par sa présidente Katharine Smart, l’Association médicale canadienne (AMC) souligne que tous «s’attendent à avoir accès en temps opportun (aux) soins de santé qu’ils méritent, lorsqu’ils en ont besoin, peu importe où ils vivent au pays», et ce, «peu importe leur capacité de payer».

Elle ajoute cependant que «le système de santé est en crise» et que l’AMC réclame «un financement accru et une meilleure collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux» pour redresser la barque.

Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, a lui aussi réagi favorablement à la décision du tribunal. 

«Cette décision prouve la justesse de notre croyance que toute Canadienne et tout Canadien ayant besoin de soins médicalement nécessaires devrait pouvoir recevoir ces soins en fonction de leur nécessité médicale, sans égard pour sa capacité ni sa volonté de payer», peut-on lire dans la déclaration du ministre Duclos.