WINDSOR, Ont. — Quelques minutes seulement après avoir happé avec sa camionnette une famille musulmane sur un trottoir de London, en Ontario, Nathaniel Veltman s’est précipité dans un stationnement, s’est garé près d’un taxi et a demandé au chauffeur d’appeler le 911, affirmant qu’il avait intentionnellement frappé plusieurs personnes, a-t-on entendu mardi à son procès.
Veltman est ensuite sorti de sa camionnette, s’est agenouillé et a mis ses mains derrière la tête lorsque la police est arrivée, en demandant au chauffeur de taxi de filmer son arrestation.
Des éléments de ce qui s’est passé immédiatement après l’attentat du 6 juin 2021 ont été présentés au tribunal mardi. Les jurés ont ainsi visionné cette vidéo de l’arrestation et écouté l’appel au 911 dans lequel l’accusé soutient qu’il a intentionnellement happé des gens. Les jurés ont aussi entendu le témoignage du chauffeur de taxi.
Les procureurs accusent Veltman d’avoir commis un acte terroriste en happant délibérément avec sa camionnette cinq membres de la famille Afzaal qui se promenaient tranquillement sur un trottoir de London le soir du 6 juin 2021.
Salman Afzaal, 46 ans, son épouse Madiha Salman, 44 ans, leur fille Yumna, 15 ans, et sa grand-mère de 74 ans, Talat Afzaal, ont été tués dans l’attentat. Le fils du couple, âgé de neuf ans, a été grièvement blessé, mais il a survécu.
Veltman, âgé de 22 ans, a plaidé non coupable de quatre chefs d’accusation de meurtre au premier degré et d’un chef de tentative de meurtre.
Le jury au procès a aussi visionné mardi une vidéo de Veltman roulant à toute allure au volant de sa camionnette, dont l’avant était lourdement endommagé, jusqu’à un stationnement presque désert d’un centre commercial, quelques minutes après l’attentat. L’accusé se gare finalement à côté d’un taxi.
Un montage d’images captées par des caméras de surveillance du centre commercial montre ensuite trois autopatrouilles qui arrivent au stationnement environ deux minutes plus tard, suivies par d’autres véhicules de police quelques minutes après.
On voit alors l’accusé descendre de son camion et faire quelques pas avant de s’agenouiller et de poser ses mains sur la tête, alors que les policiers s’approchent.
Le chauffeur de taxi témoigne
Appelé à la barre mardi par la Couronne, le chauffeur de taxi Azzeddin Jahanghiri a raconté que Veltman portait un casque de style militaire et un gilet pare-balles, et qu’il semblait calme.
L’accusé lui a ensuite demandé de filmer son arrestation et lui a demandé à nouveau de faire une vidéo après son arrestation, a raconté le chauffeur.
«Ils l’ont emmené dans une autopatrouille, et alors qu’il passait à côté de moi, (Veltman) m’a encore dit: ‘Je t’ai demandé de faire une vidéo’», a déclaré M. Jahanghiri.
Le chauffeur de taxi a également déclaré au tribunal qu’il avait vu du sang et des tissus corporels à l’avant de la camionnette, près des phares.
La poursuite soutient que Nathaniel Veltman était motivé par le «suprémacisme blanc».
Un exposé conjoint des faits déjà présenté au jury indiquait que Veltman conduisait sa camionnette dans une rue de London ce soir-là et lorsqu’il a vu les Afzaal, il a fait demi-tour pour revenir vers eux.
Alors qu’il s’approchait de la famille, il a accéléré. Les données de navigation de son camion montrent qu’il s’est dirigé vers la droite, dans le but de frapper les Afzaal, cinq secondes avant de les happer.
L’exposé conjoint des faits indique que pendant ces cinq secondes, la pédale de frein n’a jamais été touchée. Veltman a frappé les victimes avec son camion et au moins un membre de la famille a été projeté en l’air.
«Motifs politiques»
Dans sa déclaration d’ouverture, lundi, la procureure fédérale Sarah Shaikh a déclaré aux jurés que Veltman aurait planifié son attentat pendant trois mois.
Me Shaikh a souligné aux jurés qu’après son arrestation, Veltman a déclaré aux enquêteurs que ses motivations étaient politiques, qu’il était parti de chez lui ce jour-là à la recherche de musulmans à tuer, et qu’il avait utilisé un camion pour envoyer un message aux autres: un véhicule peut être utilisé pour attaquer des musulmans.
La juge Renée Pomerance, de la Cour supérieure de l’Ontario, a déclaré que le procès devrait durer environ huit semaines.
La sélection de 14 jurés pour ce procès, qui se déroule à Windsor et non à London, s’est terminée la semaine dernière. La juge Pomerance avait statué l’année dernière qu’un changement de lieu était justifié dans cette affaire.