MONTRÉAL — En plus d’être bénéfique pour la santé physique et psychologique, la danse améliore la santé cognitive des aînés, suggère une méta-analyse publiée dans la revue «Arts & Health». Des recherches supplémentaires sont toutefois encore nécessaires pour cerner ce qui distingue la danse des autres activités physiques, nuance un spécialiste.
La méta-analyse, parue en ligne l’été dernier, s’est penchée sur plusieurs études s’attardant aux liens entre la cognition et la danse.
Malgré ses lacunes, notamment sur le fait qu’elle ne se penche que sur cinq études qui mesurent l’association entre la danse et la santé cognitive, cette recherche est intéressante, du fait qu’elle s’ajoute à plusieurs autres qui constatent les effets positifs de la danse chez les aînés, souligne Annie Gauthier, conseillère scientifique à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).
«Globalement, on s’entend pour dire que la danse a des effets positifs sur la santé des personnes âgées, tant sur le plan physique que cognitif», affirme le Dr Louis Bherer, professeur titulaire au département de médecine à l’Université de Montréal, et directeur du Centre ÉPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal.
Le Dr Bherer, qui a participé à plusieurs études sur la question, précise que la seule pratique de la danse ne peut pas garantir la santé d’une personne. Toutefois, «on l’intègre, nous, dans nos recommandations dans une prise en charge globale de la santé».
La danse demeure malgré tout une façon de faire bouger la population. Elle peut aussi aider différentes personnes à gérer leur stress, a conclu une étude à laquelle a contribué le Dr Bherer. La recherche, effectuée notamment en collaboration avec Les Grands Ballets canadiens de Montréal, a comparé un groupe qui effectuait de la danse trois fois par semaine, avec un groupe qui faisait un programme d’exercice physique.
«Après trois mois, les gens qui faisaient le programme de danse avaient une meilleure diminution du cortisol à l’éveil, évoque le Dr Bherer. Par contre, notre groupe de danse n’a pas amélioré sa santé cardio-respiratoire comme l’a fait le groupe d’exercice.
«La danse seule, j’y crois un peu moins que la danse accompagnée avec d’autres activités dans la vie de tous les jours qui font en sorte que je reste en (bonne) santé globale aussi», a-t-il poursuivi.
En ce qui concerne la santé cognitive, la danse permet toutefois de stimuler le cerveau de plusieurs façons, soit cognitive, sensorielle (grâce à la musique) et émotionnelle.
«On peut imaginer que le corps bouge, que le cerveau est stimulé, que les émotions sont positives, et qu’il y a une stimulation sensorielle en même temps», précise le Dr Bherer.
«Il y a aussi le fait que la danse nécessite de développer certaines compétences, puis un certain apprentissage, et ça aussi (…) c’est un facteur de protection pour la santé cognitive», a également affirmé Annie Gauthier.
Selon la conseillère scientifique, le fait de pratiquer une activité de danse en groupe est aussi positif.
«Dans la manière dont elle était proposée aux participants aux études, (la danse) c’était aussi une activité de socialisation, donc qui permet de limiter l’isolement. Et l’isolement, c’est un facteur de risque pour les troubles cognitifs», explique Mme Gauthier.
Quels effets sur le cerveau?
Qu’est-ce qui explique que la danse peut avoir un impact positif sur le cerveau des aînés?
«C’est à travers une action sur le volume cérébral et le nombre de neurones, qui sont plus ou moins importants chez chacune des personnes. Ça peut évoluer tout au long d’un parcours de vie», détaille Annie Gauthier.
Et l’activité physique en général a un impact positif sur ce phénomène.
«Il y a certaines études qui suggèrent qu’un exercice physique complexe combiné à d’autres stimulations, notamment cognitives, va améliorer la connectivité cérébrale, par exemple», fait valoir le Dr Bherer.
«Il y a des études qui suggèrent aussi une meilleure capacité de coordination dans l’environnement au niveau comportemental. Quand les gens font des programmes d’entraînement combinés, avec des gestes moteurs et de l’activité physique, ils vont améliorer leur capacité de faire plusieurs choses en même temps» , a-t-il ajouté.
Cependant, les études disponibles actuellement ne permettent pas de savoir quels éléments de la danse la distinguent des autres activités physiques en matière d’amélioration de la santé cognitive. De plus, il n’a pas encore été statué pendant combien de temps et à quelle intensité il faut pratiquer ce sport pour en voir les bienfaits.
«Est-ce que ça prend une danse qui est physiquement hyper stimulante de sorte que les gens, après le programme de danse, sont en meilleure santé physique? Ou est-ce que c’est la simple stimulation cognitive qui est associée à la danse? Ou est-ce que c’est la complexité de tout ça?», énumère le Dr Bherer.
L’important, c’est surtout de bouger plus, peu importe le sport, souligne le chercheur, déplorant qu’«on n’ait jamais été aussi sédentaire».
Et pour améliorer sa santé cognitive, il n’est jamais trop tard pour agir, souligne Annie Gauthier.
«Il y a quelque chose de malléable dans le cerveau. C’est pour ça qu’il n’est jamais trop tard pour se mettre à agir, bien que plus on agit de bonne heure, plus on peut construire une réserve cérébrale et également agir sur les caractéristiques structurelles du cerveau. Puis, avoir finalement (…) de meilleures capacités de compenser pour les pertes cognitives normales qui arrivent avec l’âge», explique-t-elle.
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Cette dépêche a été rédigée avec l’aide financière de la Bourse de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.