OTTAWA — Le gouvernement fédéral ne dit «ni oui ni non» quant à une possible contestation judiciaire de la nouvelle loi sur la laïcité du Québec, adoptée par bâillon dimanche tard en soirée.
À l’entrée de la période des questions, lundi, le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, a précisé qu’il allait prendre le temps d’«étudier prudemment» les amendements ajoutés et que son gouvernement allait entamer une «réflexion interne» à ce sujet.
Mais le malaise était palpable parmi ses collègues libéraux, qui choisissaient méticuleusement leurs mots devant les journalistes pour éviter d’exprimer le fond de leur pensée.
Le ministre fédéral de l’Infrastructure, François-Philippe Champagne, estime que le Québec s’engage sur un «terrain glissant».
«La Charte des droits et libertés, ça nous a bien servi au Québec. Je suis toujours un peu prudent quand on décide de choisir quand ça fait notre affaire», a-t-il dit.
La ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, a finalement admis qu’elle avait toujours eu un «inconfort» par rapport à ce projet de loi qui est devenu loi dimanche.
Son collègue Joël Lightbound était plus direct: à son avis, le gouvernement Legault a agi de «façon excessivement cavalière» pour brimer les droits fondamentaux des minorités. Il s’est dit «très attristé» de la situation.
Les libéraux «déconnectés», accuse le Bloc
L’adoption d’une loi sur la laïcité a été déplorée par le député libéral de Mont-Royal, Anthony Housefather, qui a écrit sur Twitter en anglais qu’il s’agissait d’une «journée triste» pour le Québec.
M. Housefather est «complètement déconnecté des Québécois», a rétorqué la députée bloquiste Marilène Gill.
Elle s’est plutôt réjouie qu’il s’agissait d’une «grande journée pour le Québec», puisque l’adoption de cette loi est l’«aboutissement» de plus d’une décennie de débats sur la laïcité.
La loi sur la laïcité du Québec interdit aux fonctionnaires en position d’autorité coercitive, comme les juges, les policiers et les gardiens de prison, de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions. Cette interdiction s’étend aussi aux enseignants du réseau public.
Elle est déjà contestée devant la Cour supérieure par Ichrak Nourel Hak, une étudiante en enseignement qui porte le hijab, qui n’aura pas le droit de pratiquer son métier lorsqu’elle va obtenir son diplôme. La contestation de Mme Hak est soutenue par le Conseil national des musulmans canadien et l’Association canadienne des libertés civiles.