OTTAWA — Malgré de longues consultations avec trois grandes associations, le projet de loi sur les langues autochtones déposé mardi par le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, ne fait pas l’unanimité.
Il s’agit d’un acte manqué, selon l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) qui aurait voulu que l’inuktut obtienne le statut de langue officielle au même titre que le français et l’anglais.
«L’absence de contenu spécifiquement inuit suggère que ce projet de loi est une autre initiative élaborée derrière des portes closes par un système colonial, puis imposé aux Inuits», a déclaré le président de l’ITK, Natan Obed, par voie de communiqué.
Le projet de loi C-91 prévoit un financement «adéquat, stable et à long terme» pour «la réappropriation, la revitalisation, le maintien et le renforcement» des 90 langues autochtones parlées un peu partout au pays. Il incite également les institutions fédérales à traduire certains de leurs documents et à offrir des services d’interprétation.
Le poste de commissaire aux langues autochtones serait créé pour promouvoir ces langues, agir en tant que médiateur en cas de différend et surveiller l’efficacité du financement fédéral.
«C’est un socle sur lequel on peut bâtir un avenir solide pour les peuples autochtones, pour les enfants, les petits enfants, a déclaré le ministre Rodriguez. C’est un pas essentiel vers la guérison et ça on le fait ensemble.»
Il a souligné que son projet de loi faisait écho à trois des 94 recommandations de la Commission vérité et réconciliation sur les pensionnats autochtones et qu’il démontrait l’engagement du gouvernement envers la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
M. Rodriguez est toutefois demeuré vague sur le financement qui serait accordé pour assurer la survie de ces 90 langues et les initiatives qui seront mises de l’avant par les associations qui représentent les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
«J’espère que ça va donner une fierté aux peuples autochtones pour dire qu’ils sont des citoyens canadiens à part entière», a réagi le député libéral d’origine crie Robert-Falcon Ouellet.
Le projet de loi a été salué par les deux autres associations qui ont participé à cet effort conjoint, soit l’Assemblée des Premières Nations et le Métis National Council. La représentante de l’association métisse, Clara Morin-Dal Col, a parlé «d’une journée historique» qui permettrait d’assurer la pérennité de leurs langues dont la survie est menacée.
«J’espère que tout le monde se souvient que lorsque les conservateurs sont arrivés au pouvoir en 2006, un des premiers gestes qu’ils ont posés c’est vraiment de retrancher complètement un budget de 60 millions $ pour les langues autochtones qui normalement devait s’échelonner sur une dizaine d’années», a rappelé le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard.
Ce montant qui avait été accordé en l’absence d’une loi devrait être ajusté, selon lui, «parce qu’il y aura énormément de travail sur le plan national, mais sur le plan régional aussi».
Dans l’opposition le projet de loi libéral a été bien accueilli. Il s’agit «d’un pas dans la bonne direction», selon le député néo-démocrate Romeo Saganash. À son avis, cette nouvelle législation aurait pu accorder un statut spécial aux langues autochtones sans toutefois les élever au rang de langues officielles.
«On aurait dû reconnaître qu’elles ont un statut spécial au Canada dans notre histoire», a-t-il souligné.
Le Nouveau Parti démocratique (NPD) prévoit déjà déposer quelques amendements.
La députée bloquiste Marilène Gill, dont la circonscription compte 15 000 Innus, a indiqué que son parti allait soutenir le projet de loi libéral. Les conservateurs se disent en accord avec le principe, mais veulent prendre davantage de temps pour l’étudier avant de prendre position.
Le gouvernement doit donner confiance. Les précédents ont fait le contraire.
Les Inuits, les Indiens sont Canadien depuis 1920. Ils ont eu droit de vote en 1960… Les choses prennent 40 ans ou plus à se faire. Promesses, traités, etc.