Le bruit des transports pourrait accentuer le risque de suicide

MONTRÉAL — Une exposition chronique au bruit de la circulation automobile est associée à une augmentation du risque de suicide, ont constaté des chercheurs de l’Institut suisse de santé publique et tropicale.

Une exposition chronique au bruit du transport ferroviaire augmentait elle aussi le risque de suicide, mais dans une moindre mesure. Aucune association n’a été constatée avec une exposition du bruit du transport aérien.

«On sait que le bruit est un stresseur, c’est ce qui peut expliquer les problèmes de santé mentale, a commenté Richard Martin, qui est conseiller scientifique à la Direction de la santé environnementale, au travail et de la toxicologie de l’Institut national de santé publique du Québec. C’est une charge de stress qui est continuelle.»

Les chercheurs ont étudié des données provenant de quelque 5,1 millions de personnes âgées de 15 ans et plus qui étaient inscrites à la Cohorte nationale suisse entre 2001 et 2015. Ils se sont aussi intéressés à l’exposition de leurs sujets au bruit de la circulation automobile, du transport ferroviaire et du transport aérien.

Ils ont constaté qu’une hausse de 10 dB du bruit moyen de la circulation automobile à la maison était associée à une augmentation de 4 % du risque de suicide. Cette association persistait même après un ajustement pour tenir compte d’une exposition à la pollution de l’air; de la quantité d’espaces verts autour de la maison; et de plusieurs facteurs socio-économiques.

Les chercheurs précisent en revanche que le risque de suicide était moins élevé chez les sujets qui avaient accès à des espaces verts en milieu urbain.

Mais tous n’ont pas le luxe de pouvoir filer au chalet la fin de semaine, a rappelé M. Martin.

«Les chercheurs (suisses) retiennent que les problèmes de santé mentale dans les secteurs fortement exposés au bruit sont un élément qui devrait être davantage considéré dans nos politiques publiques, a-t-il commenté. Il faut faire davantage pour réduire l’exposition au bruit des transports.» 

Le risque de suicide commençait à augmenter dès que l’exposition au bruit atteignait 50 dB, ou même avant, ont écrit les chercheurs, soit une exposition supérieure à celle jugée sécuritaire par l’Organisation mondiale de la santé. Les associations observées étaient plus robustes chez les femmes que chez les hommes.

Le bruit pourrait nuire à la santé mentale en interférant avec la qualité du sommeil, en augmentant les taux d’hormones du stress, en altérant la fonction cérébrale ou en donnant à l’individu l’impression qu’il n’a pas de contrôle sur son environnement, ont dit les chercheurs suisses.

Le cerveau interprète le bruit comme une menace potentielle, et une exposition chronique au bruit peut entraîner une agitation constante et une incapacité à gérer le stress, ont-ils ajouté.

«Nous pensons que nos résultats ne doivent pas être interprétés comme suggérant que le bruit des transports a une influence directe sur le suicide ou le comportement suicidaire, mais plutôt que le suicide, en tant que substitut de troubles mentaux sous-jacents, est associé à l’exposition au bruit des transports», précisent les chercheurs.

L’association entre le bruit et la santé mentale «n’est pas fortuite», a rappelé Richard Martin, et des chercheurs s’y intéressent de plus près depuis une vingtaine d’années.

Ils essaient par exemple de déterminer si des problèmes de santé mentale préexistants pourraient augmenter la susceptibilité au bruit, ou bien si l’exposition au bruit entraîne l’apparition de troubles de santé mentale au fil du temps.

«On est plus sur cette voie-là actuellement, a-t-il dit. On observe davantage (…) de problèmes de santé mentale dans les secteurs qui sont les plus fortement exposés au bruit.»

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal scientifique Environmental Health Perspectives.

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