WASHINGTON — Marc Garneau, le premier Canadien à voyager dans l’espace, attend depuis longtemps le jour où il sera rejoint dans le panthéon des explorateurs pionniers par le prochain astronaute qui recevra le titre honorifique de «premier Canadien».
Son attente tire à sa fin: prévue pour décoller dès novembre 2024, Artémis II sera la première mission qui amènera des astronautes en orbite autour de la Lune depuis la dernière mission Apollo, en 1972. Ce sera également la première fois qu’un Canadien s’aventurera au-delà de l’orbite terrestre.
Qui sera l’heureux élu? Le monde l’apprendra lundi, quand la NASA et l’Agence spatiale canadienne présenteront les quatre astronautes ― trois Américains et un Canadien ― qui participeront à la prochaine étape d’un plan ambitieux visant à établir une présence à long terme sur la Lune.
Le corps des astronautes canadiens comprend actuellement quatre personnes, dont David Saint-Jacques, un astrophysicien et médecin montréalais et le seul membre du groupe qui est déjà allé dans l’espace.
M. Saint-Jacques, 53 ans, s’est envolé pour la Station spatiale internationale en 2018. Il a été sélectionné en 2009 aux côtés de l’Ontarien Jeremy Hansen, 47 ans, colonel et pilote de CF-18 dans l’Aviation royale canadienne.
En 2017, deux Albertains ont gonflé les rangs du groupe: le pilote d’essai et lieutenant-colonel de l’Aviation royale canadienne, Joshua Kutryk, 41 ans, et Jennifer Sidey, 34 ans, ingénieure en mécanique et chargée de cours à l’Université Cambridge.
Les astronautes d’Artémis tourneront en orbite autour de la Terre avant de s’élancer dans l’espace pour une manœuvre en forme de 8 autour de la Lune, faisant du Canada et des États-Unis les deux seuls pays à avoir observé la face cachée de la Lune.
«Quand je repense à 1984, quand j’ai volé pour la première fois, nous ne savions pas ce qui pourrait arriver après ça, se remémore Marc Garneau. Avoir maintenant l’opportunité pour le Canada d’être le deuxième pays à envoyer un astronaute en mission lunaire, c’est extraordinaire.»
S’il le pouvait, il retournerait en orbite «en un clin d’oeil». «Ayant volé trois fois, je me considère comme béni au-delà de toute attente raisonnable dans la vie», dit l’ancien astronaute et député québécois à la retraite – à 74 ans, il a finalement renoncé à son siège à la Chambre des communes, il y a à peine trois semaines.
La mission Artémis II, c’est le fruit d’un travail acharné et d’investissements considérables, explique Gordon Osinski, directeur de l’Institut de l’exploration terrestre et spatiale à l’Université Western, en Ontario. Il a passé la majeure partie de la semaine dernière à Houston, participant à des simulations pour mieux comprendre comment mener les travaux géologiques que de futurs astronautes devront effectuer sur la surface lunaire.
«Je peux faire de la géologie de terrain sur Terre avec un instrument qui semble tout droit sorti de Star Trek, qui m’indique la chimie d’une roche. On ne l’imaginait même pas il y a 50 ans», se réjouit-il.
Ensuite, il y a les Canadarms, les télémanipulateurs articulés qui sont devenus un incontournable des missions de la Station spatiale internationale et une source de fierté nationale pour d’innombrables Canadiens.
Les États-Unis nous font assez confiance pour «mettre la vie de leurs astronautes dans nos mains», souligne le Pr Osinski, disant que cela a sûrement été un facteur dans le choix de réserver une place à un Canadien.
La troisième et dernière mission Artémis verra un homme et une femme marcher sur la Lune en 2025, afin de ouvrir la voie pour éventuellement atteindre Mars.
«On retourne sur la Lune. La Lune, ce n’est pas rien, a déclaré la semaine dernière le ministre de l’Innovation, François-Philippe Champagne. C’est le Canada qui fait de grandes choses sur la scène mondiale.»
Cela, en fin de compte, pourrait être le plus grand héritage d’Artémis II pour le Canada: inspirer la prochaine génération d’astronautes, tout comme Apollo l’a fait il y a bien longtemps.
Cette fois, cependant, les images du voyage seront spectaculaires.