Le Canada pressé de fournir des fonds à la Cour pénale spéciale en Centrafrique

OTTAWA — Le Canada subit des pressions pour contribuer à combler un déficit de 1 million $ US à la Cour pénale spéciale de la République centrafricaine, afin de lui permettre de continuer son travail dans ce pays ravagé par les violences intercommunautaires et les crimes de guerre.

L’organisme Human Rights Watch a publié mercredi un rapport dans lequel il demande au Canada et à plusieurs pays de contribuer à la préservation de ce tribunal sous-financé, largement considéré comme un élément clé du processus de réconciliation nationale dans ce pays déstabilisé par les violences depuis 2013.

L’auteure du rapport, Elise Keppler, estime que le Canada devrait apporter sa contribution pour un certain nombre de raisons, notamment sa politique étrangère résolument féministe.

Les dernières estimations des Nations unies font état, entre février et juin de cette année, de plus de 60 cas de violences sexuelles liées aux conflits, impliquant plus de 150 victimes. Les affrontements intercommunautaires se sont multipliés dans le pays entre 2013 et 2016 avant le rétablissement d’une paix toute relative, mais la poursuite des violences mine une série d’accords de paix fragiles.

Mme Keppler rappelle aussi que le Canada a fourni l’un des procureurs adjoints à la Cour pénale spéciale, une institution hybride — de compétence nationale, mais avec une aide internationale, car le système judiciaire de la Centrafrique a été en grande partie détruit au cours des années de conflit.

Dieudonné Detchou, un Canadien d’origine camerounaise, est substitut du procureur spécial international auprès de la Cour pénale spéciale de la République centrafricaine. M. Detchou avait été notamment procureur à la section des crimes contre l’humanité et crimes de guerre au ministère canadien de la Justice entre 2007 et 2016.

«Nous souhaiterions que le Canada obtienne un retour sur investissement encore plus important en s’engageant également à apporter une contribution financière à la Cour afin qu’elle dispose des ressources nécessaires pour que justice soit rendue aux victimes en République centrafricaine, où les crimes incluent massacres, viols et autres violences sexuelles à grande échelle», a déclaré Mme Keppler dans une entrevue depuis New York.

Le budget annuel de la Cour pénale spéciale se situe entre 12 et 13 millions $ US, contre 30 millions $ pour le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, a plaidé Mme Keppler.

La République centrafricaine est par ailleurs l’un des pays africains souvent cités comme destination possible pour un déploiement de Casques bleus canadiens, mais Ottawa n’a pas encore pris de décision.

Le rapport de Human Rights Watch exhorte également l’Allemagne, le Japon, la Suisse, la Norvège, le Danemark et la Suède à envisager un soutien financier à la Cour pénale spéciale.