Le gouvernement ontarien rejette un projet d’université francophone à Sudbury

MONTRÉAL — Le gouvernement ontarien refuse d’accorder un financement de plusieurs dizaines de millions $ à un projet d’université entièrement francophone à Sudbury, dans le nord de la province. 

La demande de l’Université de Sudbury, qui veut revenir comme institution universitaire de langue française autonome, a été rejetée par le ministère des Collèges et Universités de l’Ontario. 

La nouvelle est tombée vendredi après-midi, au moment où s’amorce le long week-end de la fête du Canada, dans une lettre signée par le sous-ministre adjoint Denys Giguère, et transmise au recteur et vice-chancelier de l’Université de Sudbury, Serge Miville.

La proposition de l’établissement «ne correspond pas à la demande actuelle et aux tendances relatives aux inscriptions, ni à la capacité actuelle des établissements post-secondaires existants à offrir une programmation en langue française dans le Grand Sudbury et aux quatre coins de l’Ontario», peut-on lire dans la réponse du gouvernement en date du 30 juin. 

M. Giguère énumère aussi les différents facteurs ayant mené à la décision, comme les données du marché du travail en lien avec les programmes offerts et l’intérêt accru des étudiants pour des domaines comme les sciences, la technologie et les métiers.  

M. Miville accueille avec beaucoup d’étonnement et d’incompréhension le refus du ministère. 

«Ça fait plus de six mois que le gouvernement de l’Ontario a le plan d’affaires, et la nature du dialogue qu’on a eue a toujours été très encourageante. La seule rétroaction qu’on obtenait par rapport au plan d’affaires était extrêmement élogieuse», a affirmé le recteur de l’université à La Presse Canadienne, vendredi. 

L’organisation souhaitait notamment obtenir un montant de 60 millions $ sur six ans pour son projet d’université «par et pour» les francophones. L’initiative est née dans la foulée des graves difficultés financières de l’Université Laurentienne, également à Sudbury, qui ont entraîné en 2021 la disparition d’un grand nombre de ses programmes en français. 

«Extrêmement déçus»

Le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario, Fabien Hébert, dénonce le moment choisi par le gouvernement provincial pour annoncer son refus d’appuyer le projet. 

«On est extrêmement déçus d’apprendre la nouvelle. Encore plus déçus de voir que le gouvernement a utilisé la tactique du vendredi après-midi (avant) une grande fin de semaine pour faire une annonce de cette envergure-là», a-t-il déploré en entrevue. 

MM. Hébert et Miville réfutent l’argument comme quoi la demande ne serait pas au rendez-vous pour une université entièrement francopĥone. 

«Il y a clairement un besoin, une demande pour une université de langue française dans le Moyen-Nord, à Sudbury. On a fait un plan d’affaires avec une analyse très rigoureuse des chiffres et des données pour être capable d’arriver avec une offre de programmation qui répondait aux besoins et aspirations des francophones de la région», a soutenu M. Miville. 

S’il croyait que l’offre de programmes proposée par l’Université de Sudbury était inadéquate, le ministère aurait pu s’asseoir avec l’institution postsecondaire pour ajuster le tir, estime M. Hébert. 

«Cela aurait été très facile pour le gouvernement d’avoir une discussion avec l’Université de Sudbury pour qu’il y ait un alignement des programmations avec les besoins de la communauté francophone. Ce n’est pas en annulant le projet qu’on va répondre aux besoins de la communauté francophone, c’est en s’adaptant», fait-il valoir. 

Les deux représentants francophones ont l’intention de continuer à faire pression et d’obtenir des explications auprès du gouvernement ontarien. 

«Pour nous, un refus à ce stade-ci, ça ne clôt pas le dossier. On va retrousser nos manches et poursuivre le travail (…) On ne lâche pas parce qu’on sait qu’utilement, c’est ce qu’il faut dans notre région pour assurer la vitalité du fait français», a déclaré M. Miville. 

La ministre fédérale des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a aussi réagi à l’annonce du gouvernement ontarien, parlant d’«une grande déception». 

«C’est essentiel pour la vitalité de nos communautés francophones en situation minoritaire de pouvoir se doter d’institutions fortes», a-t-elle déclaré dans un gazouillis sur Twitter, vendredi. 

Ottawa avait annoncé au printemps 2022 une contribution de près de 1,9 million $ pour soutenir l’Université de Sudbury dans ses démarches. 

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