Le projet de loi sur la préparation en matière de pandémie progresse aux Communes

OTTAWA — Des députés de l’opposition craignent qu’un projet de loi sur la préparation à la pandémie ne permette au gouvernement d’éviter un examen approfondi de la façon dont il a géré la COVID-19.

Nathaniel Erskine-Smith, un député libéral d’arrière-ban qui lorgne la chefferie du Parti libéral de l’Ontario, est à l’origine du projet de loi d’initiative parlementaire en cours d’examen au Comité permanent de la santé des Communes. Son projet de loi vise à créer une «loi sur la prévention et la préparation en matière de pandémie».

M. Erskine-Smith affirme que le gouvernement doit être tenu responsable régulièrement de ses actes afin que les parlementaires, les experts et la population puissent s’assurer qu’Ottawa en fait assez pour éviter le genre d’épreuve que le Canada a endurée pendant la pandémie de COVID-19.

Il cite l’éclosion de SRAS en 2003: «il y a eu un rapport, il y a eu des recommandations et certaines ont même été mises en œuvre — mais pas toutes», a déclaré M. Erskine-Smith, qui a comparu jeudi devant le comité par visioconférence. «Il n’y avait pas de responsabilité récurrente, alors on a oublié depuis.»

Son projet de loi prévoit que l’Agence de la santé publique du Canada dépose ses plans de préparation à une éventuelle pandémie auprès du Parlement, afin d’améliorer la transparence.

Le ministre de la Santé devrait aussi créer un comité consultatif «chargé d’examiner les mesures prises au Canada en réponse à la pandémie de COVID-19, afin de réduire les risques associés aux pandémies futures et de guider l’établissement d’un plan de prévention et de préparation en matière de pandémie».

Mais les partis d’opposition repoussent cette idée: ils souhaitent plutôt la tenue d’une enquête indépendante complète sur la pandémie de COVID-19.

«J’appuie totalement un plan de préparation et de prévention d’une pandémie, mais je ne pourrais pas être plus opposé à la disposition du projet de loi» sur le comité consultatif, a déclaré le porte-parole néo-démocrate en matière de santé, Don Davies, membre du comité des Communes.

Il soutient que si le ministre de la Santé peut nommer un comité consultatif pour faire un examen de sa conduite, ce serait comme si «l’accusé nomme le juge».

Il faut dire que les partis d’opposition réclament depuis des mois la tenue d’une enquête indépendante sur la manière dont le gouvernement libéral a géré la pandémie de COVID-19.

Contourner l’enquête indépendante?

Lorsque le comité a interrogé le ministre de la Santé au sujet de cette enquête indépendante, en mars dernier, Jean-Yves Duclos a fait référence au projet de loi d’initiative parlementaire de son collègue Erskine-Smith.

«Nous discutons actuellement d’un projet de loi à la Chambre qui souligne également l’importance d’avoir un examen de la COVID-19», a déclaré M. Duclos au comité le 23 mars. Certains ont craint alors que le gouvernement n’utilise le projet de loi du député Erskine-Smith pour éviter la tenue d’une enquête plus indépendante sur la COVID-19.

Le député conservateur Matt Jeneroux, membre du comité, a déclaré qu’il craignait effectivement que le gouvernement n’utilise le projet de loi comme bouclier, même s’il ne croit pas que c’était l’intention du parrain.

M. Erskine-Smith soutient que ce comité consultatif dans le projet de loi n’était pas destiné à empêcher un examen indépendant. Et pour éviter de politiser son projet de loi, il s’est dit d’accord pour que les députés retirent cette mesure et se concentrent plutôt sur la responsabilisation des futurs gouvernements face à d’éventuelles pandémies.

Le néo-démocrate Davies devrait déposer une motion pour retirer ce «comité consultatif» du projet de loi avant qu’il ne soit transmis à la Chambre des communes pour la troisième lecture.

Mais les députés conservateurs et bloquistes au comité ont toujours exprimé des réserves quant à l’adoption du projet de loi avant qu’une enquête indépendante ne soit effectuée, car un tel exercice donnerait des indices sur ce qu’on pourrait demander plus tard à l’Agence de santé publique.

La députée conservatrice Laila Goodridge a déclaré qu’elle n’était pas non plus convaincue que demander à l’Agence de faire rapport au Parlement la rendrait en fait plus responsable de ses actions.

«Vous pouvez avoir un plan absolument et incroyablement brillant, mais si vous ne le suivez pas réellement, à quoi ça sert?», a-t-elle demandé.

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