MONTRÉAL — Les jeunes n’ont pas augmenté leur consommation de produits de vapotage depuis le début de la pandémie, mais ils n’ont pas non plus profité de l’occasion pour la réduire, démontrent de nouvelles données dévoilées par Statistique Canada.
La première Enquête canadienne sur le tabac et la nicotine avait été réalisée en 2019. La nouvelle étude a été menée en décembre 2020 et en janvier 2021, ce qui donne un aperçu de l’impact de la pandémie sur la situation.
On constate par exemple que 14 % des participants âgés de 15 à 19 ans ont rapporté avoir vapoté au cours des 30 derniers jours, comparativement à 15 % lors de l’étude précédente; ces taux sont respectivement de 13 % et de 15 % chez les 20-24 ans.
Trois pour cent des jeunes de 15-19 ans et 8 % des jeunes de 20-24 ans ont dit avoir fumé la cigarette traditionnelle au cours des 30 derniers jours, comparativement à 5 % et 13 % lors de l’enquête précédente.
«Pour moi, voir des taux qui se stabilisent, oui c’est une bonne nouvelle, mais c’est une mauvaise nouvelle dans le sens qu’on n’a vraiment pas réussi à s’attaquer à ce problème-là», a commenté le docteur Nicholad Chadi, qui est pédiatre et clinicien-chercheur spécialisé en médecine de l’adolescence et toxicomanie au CHU Sainte-Justine.
Plus du tiers des jeunes âgés de 15 à 19 ans ont révélé avoir essayé le vapotage à au moins une reprise pendant leur vie, et 43 % des jeunes de 20-24.
Les raisons les plus souvent citées par les jeunes Canadiens de 15 à 19 ans étaient parce qu’ils aimaient vapoter (27 %), parce qu’ils voulaient l’essayer (26 %) et pour réduire leur stress (23 %).
En comparaison, ceux de 20 à 24 ans étaient plus susceptibles de déclarer avoir vapoté parce qu’ils aimaient vapoter (24 %), pour réduire leur stress (24 %) ou pour réduire l’usage du tabac ou arrêter de fumer (22 %).
Le vapotage pour réduire le stress a légèrement augmenté chez les 15 à 19 ans. Par contre, chez les personnes de 20 à 24 ans, cette utilisation a bondi de 14 % en 2019 à 24 % en 2020.
«Il y a des petites choses dans ces données-là qui nous disent qu’il y a des grands besoins d’éducation du public, a dit le docteur Chadi. Même si le public commence à prendre conscience de certains risques des produits de vapotage, nous ne sommes pas rendus au point de diminuer la courbe comme on a réussi à le faire avec les produits du tabac.»
Plusieurs experts s’étaient inquiétés de l’impact que pourrait avoir la pandémie sur le vapotage et le tabagisme des jeunes, d’autant plus que le confinement les rendait plus difficiles à rejoindre avec un message de santé.
«La bonne nouvelle est qu’il ne semble pas y avoir un grand groupe de nouveaux vapoteurs, a ajouté le docteur Chadi. On sait qu’avec le confinement il y a eu moins d’opportunités de socialiser et d’avoir accès à ces produits-là. Mais on aurait aussi pu se dire que dans ce contexte-là, comment se fait-il qu’il n’y a pas moins de jeunes qui fument ou qui vapotent?
«C’est un peu un statu quo qui n’en est pas un, des bonnes nouvelles qui n’en sont pas.»
Reste maintenant à voir ce qui se produira au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
Il serait navrant, a dit le docteur Chadi, de constater un «effet rebond (…) en post-pandémie» parce que des jeunes qui auront l’impression de s’être privés décideront de rattraper le temps perdu et de profiter d’un accès plus facile ces substances.
L’équilibre à atteindre entre un produit encadré trop strictement qui pousse les utilisateurs vers le marché noir et un produit dont la disponibilité est trop grande est fragile, poursuit-il.
«Mon interprétation de la chose, c’est qu’il va falloir trouver des méthodes plus efficaces pour attaquer le problème du vapotage, a conclu le docteur Chadi. Ce n’est pas en laissant les choses aller ou en laissant les réglementations ou les politiques de santé publique inchangées qu’on va réussir à faire diminuer les taux d’utilisation du vapotage.»