QUÉBEC — Le gouvernement caquiste a eu recours aux ressources de l’Assemblée nationale à des fins partisanes et électorales.
C’est ce que conclut un rapport de la Commissaire à l’éthique et à la déontologie de l’Assemblée nationale déposé jeudi. Également, elle met en garde les caquistes concernant l’usage de la Coaliste, la plateforme multifonctions du parti.
La commissaire Ariane Mignolet blâme le whip en chef du gouvernement et député d’Arthabaska, Éric Lefebvre, mais ne recommande pas de sanction.
Ironiquement, le whip est responsable de la discipline dans une formation politique: il doit «faire preuve d’une sensibilité éthique et déontologique élevée», souligne-t-elle.
C’est le député libéral Marc Tanguay qui s’est étonné en novembre 2021 que sept employés du cabinet du whip du cabinet occupaient des fonctions liées au «développement».
On reproche à M. Lefebvre d’avoir eu recours aux ressources de l’Assemblée nationale pour faire des formations au bénéfice de son parti, la Coalition avenir Québec (CAQ).
Or il ne pouvait faire usage des biens et services de l’État à des fins autres que celles liées à l’exercice de sa charge de whip.
Pourtant, en novembre, François Legault avait laissé entendre que la démarche menée par le whip était tout à fait «normale».
«Amis Facebook» et sympathisants
Une des formations fixait clairement des «objectifs électoraux», peut-on lire dans le rapport, des «amis Facebook» à contacter, de «sympathisants à attirer», des «membres à attirer et du financement à recueillir».
Les témoins ont reconnu qu’une des présentations visait à préparer la campagne électorale.
On apprend même qu’une formation donnée le 11 juin dernier par la directrice générale et organisatrice en chef de la CAQ, Brigitte Legault, n’avait pas été enregistrée parce que son contenu était jugé «trop sensible».
Dans l’introduction d’une des formations, elle dit qu’elle va «repasser à travers les processus de sélection des produits de communication», qui vont «évoluer avec le temps pour aller vers des produits beaucoup plus électoraux».
Pour sa part, M. Lefebvre a affirmé qu’il ne considérait n’avoir commis aucun manquement, mais il a reconnu que plusieurs volets de la formation étaient «partisans», peut-on lire.
Il a dit que s’il avait vu à l’avance le plan de la formation, il aurait «assurément émis des réserves».
Mme Mignolet conclut que le whip a commis un manquement «en ne s’assurant pas que le matériel et les adresses courriel des membres de son personnel, ainsi que leur temps de travail, soient uniquement utilisés pour des activités liées à l’exercice de sa charge de whip en chef du gouvernement» à l’occasion d’une des formations.
Toutefois, comme le whip a collaboré à l’enquête et qu’il s’est engagé à prendre des mesures appropriées, la commissaire considère qu’il n’est «pas opportun» de recommander une sanction.
Coaliste
En outre, la commissaire s’inquiète du recours au logiciel du parti Coaliste par le personnel des bureaux de circonscription, des employés payés par l’Assemblée nationale et censés être non partisans.
Ils s’en servent autant pour des commandes de publicités concernant des activités touchant tous les citoyens que pour des événements partisans.
«J’invite tous les députés utilisant Coaliste dans l’exercice de leur charge, ou ceux dont les membres du personnel l’utilisent, à la plus grande prudence», écrit Mme Mignolet.
«D’aucune façon, les renseignements concernant des citoyens, ou toute autre information qui n’est généralement pas à la disposition du public, obtenus dans l’exercice de leur charge de membre de l’Assemblée nationale, ou d’une fonction parlementaire particulière, ne devraient être saisis dans Coaliste dans le but de les utiliser de manière à favoriser des intérêts personnels, ou tout autre intérêt, notamment celui d’un parti politique», conclut-elle.