QUÉBEC — Les 11 députés élus sous la bannière de Québec solidaire (QS) le 3 octobre vont refuser mercredi de prêter serment d’allégeance au roi Charles III, selon ce qu’a appris La Presse Canadienne mardi.
Ils vont donc défier la Constitution de 1867, en choisissant de boycotter un des deux serments obligatoires pour siéger à l’Assemblée nationale. Ils prêteront uniquement serment de loyauté «au peuple du Québec».
On savait depuis des années que les solidaires, comme les péquistes, détestaient l’obligation d’afficher leur «vraie» allégeance à la couronne britannique pour siéger au parlement, mais c’est la première fois qu’ils vont au bout de leur logique pour refuser de prononcer le serment controversé.
Le porte-parole de Québec solidaire et député réélu de Gouin, Gabriel Nadeau-Dubois, a expédié mardi une lettre aux chefs des autres partis représentés à l’Assemblée nationale dans le but de convoquer une rencontre le plus tôt possible visant à dénouer «l’impasse» entourant l’assermentation des élus, en lien avec la couronne britannique.
Seule «une rencontre transpartisane» permettra de «sortir du cul-de-sac» dans lequel se trouve l’Assemblée nationale «et de trouver une voie de passage», a commenté M. Nadeau-Dubois, en entrevue téléphonique, en fin de journée.
«La balle est dans notre camp», celui des élus, a ajouté le chef parlementaire solidaire, persuadé que la solution sera politique et que si tous les groupes parlementaires se parlent il y aura moyen de «respecter la liberté de conscience» des élus qui s’objectent au serment à la couronne britannique tout en s’y soumettant contre leur gré depuis des années.
«Cette rencontre pourrait réunir rapidement, dès la semaine prochaine, des représentant-es de nos formations politiques respectives», écrit-il dans sa missive expédiée mardi au premier ministre François Legault, à la cheffe de l’opposition officielle, Dominique Anglade, et au chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon.
Le fait que les parlementaires ne seront appelés à siéger qu’à la fin du mois de novembre donne aux élus tout le temps requis pour trouver une solution, temporaire, comme une motion, ou permanente, qui pourrait prendre la forme d’une loi, a fait valoir M. Nadeau-Dubois.
Bien que la prochaine session parlementaire ne durera que quelques jours, il se dit convaincu que «tout est possible» si tous les groupes parlementaires sont d’accord sur le principe.
Québec solidaire fait donc écho à la démarche entreprise plus tôt par le chef du Parti québécois, qui cherche lui aussi à trouver le moyen d’éviter de devoir proclamer son allégeance au roi Charles III, qui est le chef d’État du Canada et le chef de l’Église anglicane.
En réponse à une requête en ce sens du chef péquiste, le secrétariat général de l’Assemblée nationale avait indiqué la semaine dernière qu’il n’était pas de son ressort de modifier les lois, et que les élus devaient, pour siéger, prêter les deux serments.
Jusqu’à nouvel ordre, malgré tout, M. St-Pierre Plamondon a dit que les trois élus péquistes avaient l’intention de s’en tenir eux aussi à un seul serment, celui au peuple québécois. L’assermentation des péquistes aura lieu vendredi.
Mardi, les 21 députés libéraux et les 90 caquistes ont tous affirmé solennellement leur allégeance à Charles III.
En 2018, les 10 élus solidaires avaient trouvé un subterfuge: prononcer leur serment à la reine Élisabeth II à l’abri des regards et des caméras, loin du Salon rouge.
En 2019, dénonçant un «reliquat du colonialisme britannique», le député solidaire Sol Zanetti avait déposé un projet de loi remettant en question le serment à la couronne britannique, dans le but de le rendre facultatif. Le projet de loi 192 avait été appelé par le gouvernement, mais seulement en toute fin de mandat, le printemps dernier. Les libéraux avaient voté contre et le projet de loi est mort au feuilleton.
«Nous sommes les seuls à vouloir régler le problème», a fait valoir M. Nadeau-Dubois.