Les Communes votent pour la fin de tout investissement fédéral dans les hydrocarbures

OTTAWA — Une majorité d’élus à la Chambre des communes se sont exprimés lundi en faveur d’une cessation de tout investissement d’Ottawa dans les énergies fossiles.

Une motion bloquiste en ce sens a été adoptée, libéraux et néo-démocrates l’ayant appuyée comme ils avaient signalé qu’ils allaient le faire la semaine dernière.

Le texte entériné à 210 voix contre 115 appelle à constater les effets des changements climatiques, comme les incendies de forêt, mais aussi à couper le robinet des fonds fédéraux envers l’industrie des hydrocarbures et à faire davantage d’investissements verts.

«On fait pression (…) pour que cesse toute subvention, toute aide financière, que ce soit crédit d’impôt, subvention ou autre aux pétrolières. Il faut que ça arrête», a dit lundi le leader parlementaire du Bloc québécois, Alain Therrien, quelques heures avant le vote des élus fédéraux.

Le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, avait expliqué à La Presse Canadienne, au cours d’une entrevue accordée la semaine dernière, que le gouvernement fédéral considère déjà qu’il est en voie de répondre à la composante de la motion concernant le financement à l’industrie fossile.

«On a éliminé l’an passé les subventions internationales aux combustibles fossiles. (…) (Au niveau) domestique, ça fait partie de notre entente avec le NPD (de le faire d’ici la fin de l’année). Nous allons respecter cet engagement», avait-il assuré.

Il avait affirmé que le gouvernement en est à «ses derniers milles» pour avoir pleinement rempli sa promesse.

Les libéraux de Justin Trudeau promettent de réduire les subventions à l’industrie des énergies fossiles jusqu’à les éliminer depuis la campagne électorale de 2015 qui a permis de les faire élire pour le premier de leurs trois mandats consécutifs.

Cet engagement, aussi pris par le Canada au G20, n’a pas été complété depuis. Avec leur plateforme de la plus récente campagne électorale, en 2021, les libéraux ont promis que ce sera chose faite d’ici la fin de 2023.

Or, les bloquistes sont en désaccord avec l’interprétation libérale de ce qu’est ou non une subvention fédérale à l’industrie des hydrocarbures.

«Par exemple les subventions à la capture et stockage de carbone, il y en a qui disent (que) c’est une subvention aux combustibles fossiles», avait reconnu de son propre chef M. Guilbeault la semaine dernière.

À cela, le ministre répond que le secteur des hydrocarbures doit être épaulé pour des projets verts. «Dans la mesure où on aide le secteur de l’aluminium, les cimenteries, l’acier, le secteur forestier à décarboner, d’un point de vue éthique, le gouvernement ne peut pas dire ‘’Eh bien, vous on vous aide, mais vous on ne vous aide pas’’, s’était-il défendu. Et je comprends que là-dessus tout le monde n’est pas d’accord.»

Questionné lundi quant à cet argumentaire, M. Therrien a rétorqué que «le pétrole ne sera jamais vert». À son avis, cela permet aux pétrolières de continuer à accroître leur production tout en s’engageant à avoir «un baril de pétrole qui pollue moins».

À ses yeux, il est aussi clair que le financement fédéral aux énergies fossiles ne va pas réellement en décroissance.

«Les faits sont têtus. Il suffit de regarder des chiffres, des budgets et on s’aperçoit rapidement que soit qu’il y a des subventions ou des crédits d’impôt qui vont à ces entreprises qui œuvrent (avec) des énergies fossiles. Tu n’as pas besoin d’avoir un doctorat en mathématiques pour comprendre ça», a-t-il tranché.

Les néo-démocrates sont sur la même longueur d’onde, ayant notamment rappelé l’acquisition par le gouvernement Trudeau de l’oléoduc Trans Mountain au cours du débat sur la motion.

«On est un pays producteur de pétrole et de gaz et on a un gouvernement libéral qui encourage, subventionne et paie avec notre argent public pour qu’on produise encore plus de gaz et de pétrole», a notamment dit le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice.

Les conservateurs ont fait bande à part lundi –  avec un député indépendant – en votant contre la motion bloquiste.

«Je suis entièrement pour notre secteur pétrolier dans l’Ouest canadien, avait mentionné jeudi dernier le chef conservateur Pierre Poilievre. C’est un très bon secteur qui finance nos services sociaux.»