Dépôt d’un projet de loi en Ontario pour accroître le recours au privé en santé

TORONTO — Le gouvernement de l’Ontario a déposé mardi son projet de loi qui permettrait à davantage de cliniques privées d’offrir certaines chirurgies et procédures financées par l’État. 

Cette mesure s’accompagne, selon la ministre de la Santé, de plusieurs garanties pour assurer la sécurité des patients, bien que le gouvernement ne sache pas encore qui exactement inspectera ces cliniques privées.

La ministre Sylvia Jones a déclaré que le projet de loi permettra au gouvernement ontarien de désigner des «organisations d’experts» pour inspecter ces cliniques privées, mais le gouvernement Ford n’a pas encore décidé quelles seront ces organisations. 

«Il y a plusieurs options sur la table, a déclaré mardi la ministre Jones en conférence de presse. Nous veillerons, par le biais de la réglementation, à ce que le régulateur approprié, qu’il s’agisse d’un régulateur externe ou interne, soit impliqué.» 

Le projet de loi prévoit également de nouvelles règles «de plein droit», selon lesquelles les titres de compétence des travailleurs de la santé inscrits dans d’autres provinces et territoires seraient automatiquement reconnus en Ontario, sans qu’il soit nécessaire de s’inscrire immédiatement auprès d’un ordre professionnel ontarien.

Le projet de loi prévoit un processus de plainte, place les nouvelles cliniques sous la responsabilité de l’ombudsman des patients et établit un processus de renouvellement des inspections, de sorte que les cliniques ne seront pas agréées «une fois pour toutes», a déclaré Mme Jones.

La ministre de la Santé assure que les patients des cliniques privées, y compris les nouvelles installations qui effectueront des chirurgies de la hanche et du genou, n’auront pas à payer de leur poche: ces procédures continueront d’être financées par l’État, a-t-elle promis.

Sylvia Jones avait évoqué le mois dernier le dépôt prochain de ce projet de loi; depuis, les partis d’opposition et certains défenseurs des soins de santé publics ont critiqué le rôle accru des cliniques à but lucratif dans le réseau.

Plusieurs ont fait part de leurs inquiétudes au sujet des cliniques qui voudraient presser les patients de choisir des services qui coûtent plus cher que ce qui est couvert par le régime public. 

En vertu du projet de loi, les cliniques ne seraient pas autorisées à refuser des services à un patient qui opte pour le service exclusif du régime d’assurance maladie, et elles ne seraient pas autorisées à facturer des frais supplémentaires aux patients pour obtenir des services plus rapidement que les autres, assure le gouvernement.

«Notre plan audacieux et innovant réduira considérablement les temps d’attente pour les chirurgies et les diagnostics, améliorera la collaboration dans l’ensemble du système de santé et garantira que la sécurité des patients continuera d’être primordiale», a déclaré Mme Jones.

Les cliniques privées seraient tenues de fournir au gouvernement des détails sur les politiques de prévention et de contrôle des infections, ainsi qu’un plan de dotation en personnel «pour protéger la stabilité des médecins, des infirmières et des autres travailleurs de la santé dans les hôpitaux publics».

Les médecins de ces cliniques devront également avoir des «privilèges hospitaliers» — pouvoir faire admettre des patients dans un hôpital. Mme Jones a déclaré qu’il n’y aura pas de plafond sur le nombre de nouvelles cliniques que le gouvernement pourra autoriser.

La nouvelle cheffe néo-démocrate, Marit Stiles, a déclaré que ce plan n’était pas suffisamment transparent ou responsable, contestant le fait que le gouvernement présente le projet de loi sans savoir qui inspectera et réglementera les cliniques privées.

«Pour autant que je sache, il n’y a pas de surveillance – il y a la promesse d’une certaine surveillance, parfois, quelque part, à déterminer», a-t-elle déploré.

Ce projet de loi était le premier présenté par le gouvernement de Doug Ford alors que la législature reprenait mardi ses travaux après une pause hivernale.

Une fête de famille

Le premier ministre Ford a par ailleurs dû faire face mardi matin à un barrage de questions sur ses liens avec des promoteurs immobiliers. 

M. Ford a assuré qu’il n’avait rien fait de répréhensible lorsque des promoteurs immobiliers, qui sont des amis de longue date de sa famille, ont assisté l’été dernier à une fête, à 150 $ le billet, en l’honneur de sa fille qui allait se marier. 

Ce genre d’événement social est généralement organisé afin de recueillir des fonds pour les futurs mariés. 

L’examen minutieux des relations de M. Ford avec les promoteurs intervient après que son gouvernement a annoncé, en novembre, que pour construire 50 000 unités d’habitation, il retirait environ 7400 acres de 15 zones différentes de la «Ceinture de verdure protégée», tout en ajoutant plus de parcelles ailleurs.

Les médias citent des sources selon lesquelles des sociétés de lobbying et de relations gouvernementales ont été invitées à acheter des billets pour la fête.

Le Bureau du commissaire à l’intégrité de l’Ontario a conclu, sur la base des informations fournies, que M. Ford n’avait aucune connaissance des cadeaux offerts à sa fille et à son gendre. Il a aussi conclu qu’il n’y avait eu aucune discussion sur les affaires du gouvernement lors de cette fête.

La cheffe néo-démocrate a inauguré ses fonctions mardi matin en posant à M. Ford plusieurs questions sur cette fête. «Le premier ministre peut-il expliquer aux Ontariens comment ils devraient croire que ces promoteurs n’ont pas été informés de ses plans pour la Ceinture de verdure?», a demandé Mme Stiles.

M. Ford n’a répondu qu’à une seule des questions – c’est le leader du gouvernement en Chambre, Paul Calandra, qui a pris le relais. Le premier ministre a simplement réitéré que sa famille était séparée du processus politique et qu’elle n’était pas impliquée.

Mme Stiles a déclaré que le problème ne concernait pas la famille de M. Ford, mais plutôt le comportement du premier ministre et l’intégrité de son bureau. Elle a demandé si le premier ministre ou des membres du personnel du gouvernement avaient joué un rôle dans l’établissement de la liste des invités à la fête.

Commission Rouleau 

M. Ford a également esquivé les questions sur son refus de témoigner lors de l’enquête sur le recours, par le gouvernement fédéral, à la Loi sur les mesures d’urgence lors des manifestations du «convoi de la liberté» l’année dernière à Ottawa, dans sa province. 

Le juge Paul Rouleau, qui a présidé la commission d’enquête publique, a qualifié de «troublante la réticence de la province de l’Ontario à participer pleinement aux efforts visant à dénouer la situation à Ottawa».

Le juge Rouleau a déclaré que la province avait «abandonné» les habitants d’Ottawa en ne les aidant pas plus tôt. Il a noté que l’Ontario ne s’est pleinement impliqué que lorsque les manifestants ont bloqué le pont Ambassador à Windsor, une importante route commerciale entre le Canada et les États-Unis.

«Qu’est-ce que le premier ministre a à dire à Ottawa maintenant que nous connaissons l’ampleur de l’inaction de son gouvernement?», a demandé Mme Stiles mardi.

M. Ford n’a pas répondu, mais M. Calandra a loué le travail de la Police provinciale de l’Ontario avant et pendant les manifestations. Il a déclaré que le gouvernement ontarien travaillera à une meilleure coordination entre les forces de police, un autre problème que le juge Rouleau a souligné dans son rapport de 2000 pages.

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