QUÉBEC — Les esprits se sont échauffés au Salon bleu vendredi, au moment même où les députés lançaient un appel au calme aux manifestants anti-mesures sanitaires.
Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a dû s’excuser d’avoir déclaré que les oppositions cautionnaient la violence, des accusations «gratuites et infondées», selon Joël Arseneau du Parti québécois.
M. Dubé a fait un «raccourci très malhonnête», a dénoncé le député libéral Monsef Derraji, tandis que Vincent Marissal, de Québec solidaire, qualifiait les propos du ministre de «pas chics».
«Il n’y a pas personne ici qui va me dire que j’encourage la fomentation et la prise des armes, a-t-il fustigé. Je trouve qu’on est vraiment l’autre bord de la ligne.»
La journée avait pourtant commencé avec un appel au calme, à la veille d’une manifestation prévue à Montréal et dans le contexte où plusieurs manifestants s’agitent sur les réseaux sociaux.
M. Derraji a déclaré en point de presse comprendre que les Québécois veuillent exprimer leur fatigue. Mais «personne ne va gagner s’il y a une escalade de violence», a-t-il dit.
Le député faisait un appel au calme et à la prudence, quelques minutes avant le début de son interpellation avec le ministre Dubé sur la question de la gestion de la pandémie.
Une interpellation le vendredi est une occasion pour les députés de l’opposition de questionner, pendant deux heures au Salon bleu, un ministre sur un thème de leur choix.
M. Arseneau a fait valoir qu’il était possible de débattre de santé «de façon sérieuse». Il a déclaré qu’il fallait de manière générale «éviter de mettre de l’huile sur le feu et de stigmatiser certaines couches de la population».
Accrochages
M. Dubé a laissé entendre que pour lui, il était important dans le contexte actuel de demeurer «positif». Il a reproché à l’opposition officielle d’avoir choisi un mauvais sujet d’interpellation.
Le titre de l’interpellation se lisait ainsi: «Manque d’anticipation, incohérence et volte-face: les Québécois font les frais de la gestion de la pandémie de COVID-19 par le gouvernement caquiste».
«Le député de Nelligan doit assumer ses choix de mots, a lancé M. Dubé. J’espère dans les prochaines minutes qu’on va pouvoir voir un changement de ton.
«Les Québécois ont besoin de bonnes nouvelles (…) et j’aurais souhaité que les oppositions prennent une approche différente avec une critique beaucoup plus positive.»
Il a ensuite repris à son compte les accusations du premier ministre François Legault, selon qui les oppositions auraient cautionné les menaces de violence de la part des manifestants envers les élus.
«Il est irresponsable des oppositions de venir cautionner les gens qui menacent de prendre les armes contre les consignes sanitaires en insinuant que ça serait un peu la faute du gouvernement», a déclaré M. Dubé.
En toute fin de séance, le ministre a fait amende honorable.
«Si mes propos ont été blessants, ce n’était pas mon intention, a-t-il dit. Je m’excuse. Je pense que c’est important que les Québécois voient qu’on va travailler ensemble pour se sortir de cette foutue pandémie.»
Sur Twitter vendredi, le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a parlé d’accusations «odieuses et mensongères». Il a demandé au premier ministre Legault d’imiter Christian Dubé en s’excusant à son tour.
Passeport vaccinal
L’interpellation de vendredi aura aussi permis au ministre de la Santé de reconnaître que la gestion de la pandémie n’a pas été «parfaite».
Il en a profité pour revenir sur sa déclaration de mardi, selon laquelle le passeport vaccinal est «là pour rester».
M. Dubé évoque désormais la possibilité que le gouvernement suspende le passeport vaccinal pour le réintroduire à la prochaine vague.
«Est-ce que la Santé publique va nous recommander, j’espère dans quelques semaines, de (…) le suspendre parce que ça va mieux? Est-ce qu’on pourrait le rétablir si jamais on était pris avec une autre vague?
«C’est ça qu’il faut penser», a-t-il déclaré.