INUVIK, T.N.-O. — Les changements climatiques affectent tous les domaines de la vie dans le Grand Nord et un plan de lutte doit ratisser aussi large, prévient l’organisation qui représente les Inuits du Canada.
«Pour nous, il s’agit bien plus que d’une affaire de politique publique, explique Natan Obed, chef de l’organisme Inuit Tapiriit Kanatami. C’est aussi une affaire de vie ou de mort pour des personnes qui sont encore inextricablement liées à leur environnement.»
Selon M. Obed, l’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, ce qui signifie que les Inuits doivent élaborer leur propre plan de lutte aux changements climatiques. Flanqué de la ministre fédérale de l’Environnement, Catherine McKenna, à Inuvik, dans les Territoires du Nord-Ouest, M. Obed a déposé vendredi un résumé de cette stratégie élaborée par l’organisme. Le document de 48 pages conclut qu’il est impossible de s’attaquer aux changements climatiques sans résoudre de nombreux autres problèmes auxquels sont confrontés les Inuits.
«Nous avons souvent été perçus comme le canari dans la mine, souvent mis en avant pour expliquer au monde comment l’Arctique change, mais ça s’arrête habituellement là», a déploré M. Obed en entrevue avant la publication du plan de lutte. «Les Inuits ont décidé de rechercher un partenariat avec le gouvernement du Canada et de commencer à s’adapter de toutes les manières possibles, au moyen d’une action coordonnée.»
La ministre McKenna, qui a promis une première contribution d’un million de dollars pour mettre en œuvre le plan, reconnaît que les Inuits doivent élaborer leur propre approche, plutôt que de se la faire imposer par Ottawa.
Le plan des Inuits parle de renouvellement des infrastructures — des bâtiments municipaux aux pistes d’atterrissage en passant par les installations de traitement des déchets — qui sont menacées par la fonte du pergélisol. Il recommande également de renoncer aux vieilles génératrices au diesel, à fortes émissions de carbone, qui alimentent en électricité les communautés du Nord.
La stratégie insiste par ailleurs sur le fait que les changements climatiques amplifient les problèmes sociaux et ne peuvent être considérés à part. Le plan comprend des recommandations spécifiques pour réformer les codes et les pratiques du bâtiment dans le Nord afin d’intégrer le savoir inuit. Il appelle également à des dépenses dans les transports aériens et maritimes, et à l’amélioration des télécommunications.
Le plan prévoit des services d’électricité conçus et contrôlés par les Inuits qui s’appuieraient sur des énergies renouvelables telles que l’hydroélectricité, le solaire et l’éolien. On suggère aussi de soutenir les chasseurs afin de réduire l’insécurité alimentaire, mais aussi d’accroître la sécurité de ceux qui se déplacent dans un paysage en mutation.
Selon M. Obed, il faudrait au moins une décennie pour donner suite à toutes les recommandations du plan. Mais certaines pages sont plus pressantes. «Les besoins en infrastructures et la modernisation (du logement) vont certainement être nécessaires dans les années à venir. Ces investissements coûteront beaucoup d’argent», a-t-il prévenu.
La ministre McKenna a indiqué que le gouvernement fédéral était conscient des besoins, mais elle n’a fait aucune promesse.