HALIFAX — L’opposition libérale de Nouvelle-Écosse tire la sonnette d’alarme sur le manque de ressources judiciaires après qu’un homme de 38 ans accusé de pornographie infantile ait vu son procès suspendu en raison de retards.
La semaine dernière, la juge Bryna Hatt du tribunal provincial d’Antigonish a abandonné les poursuites engagées contre Nathaniel Matheson pour deux chefs d’accusation de distribution présumée de pornographie juvénile.
Elle a cité l’arrêt Jordan de 2016 de la Cour suprême du Canada, qui stipule que les défendeurs ont le droit d’être jugés dans les 18 mois suivants leur inculpation devant les tribunaux provinciaux.
Dans sa décision du 12 avril, la juge Hatt a noté que M. Matheson avait été inculpé en janvier 2021 et que la majeure partie du retard dans son affaire était due au fait qu’aucun juge n’était disponible pour diriger le procès.
Les données du service des poursuites pénales de la province indiquent qu’il y a eu 71 demandes de sursis en vertu des règles de l’arrêt Jordan depuis 2017. Au 20 mars, 24 de ces demandes avaient abouti à un sursis. Une demande d’arrêt Jordan est présentée par la défense si elle estime que le retard est imputable à la Couronne.
Chris Hansen, porte-parole du service des poursuites, a déclaré dans un courriel que l’arrêt Jordan prévoit des exceptions. Par exemple, le ministère public a réussi à faire valoir dans certains cas que les retards étaient imputables à la pandémie. Mais c’est au juge qu’il revient de décider quelles exceptions sont autorisées.
Le 14 avril, le juge Patrick Murray de la Cour suprême de Nouvelle-Écosse a suspendu les poursuites engagées contre Raymond LeRoy à Sydney, en Nouvelle-Écosse, dont l’affaire ne respectait pas le délai maximal de 30 mois fixé dans l’arrêt Jordan pour les affaires relevant des cours supérieures.
«J’estime que le droit de M. LeRoy à un procès dans un délai raisonnable a été violé. Il a enduré le stress de l’attente de son procès et l’impact que cela a eu sur lui», a écrit M. Murray.
M. LeRoy a été accusé d’incendie criminel le 21 août 2018 et son procès devait commencer le 28 avril de cette année.
M. LeRoy reste en détention en raison des procédures relatives à d’autres accusations, y compris les voies de fait graves, la profération de menaces, l’enlèvement et les accusations d’armes, avec un procès prévu l’année prochaine.
Les libéraux ont déclaré dans un communiqué de presse mardi que l’affaire de pornographie juvénile démontre que le gouvernement progressiste-conservateur n’a pas agi assez rapidement pour nommer de nouveaux juges et trouver des moyens de réduire les retards dans les tribunaux.
«Le gouvernement a pris encore plus de retard dans ce dossier, et l’arriéré des affaires devient de plus en plus difficile à contrôler», a soulevé Iain Rankin, porte-parole du parti en matière de justice.
«Les Néo-Écossais méritent un système judiciaire sur lequel ils peuvent compter, mais à cause de l’étroitesse d’esprit du gouvernement de Tim Houston, le système est en train d’échouer», a-t-il ajouté.
Une porte-parole du ministère de la Justice a indiqué, dans un courriel envoyé mercredi en soirée, que de réduire les arriérés et d’améliorer les processus judiciaires demeurait une «priorité».suiv
«Nous avons aussi embauché du personnel et construit deux salles d’audience dédiés aux procès criminels afin d’accélérer et d’améliorer notre service», a indiqué Deborah Bayer.
Celle-ci a précisé qu’il n’y a pas de vacances dans la magistrature provinciale, même si un juge est présentement absent pour cause de maladie longue durée.
Deux juges prendront leur retraite dans les semaines à venir.