Les libéraux évoquent dans le discours du Trône les craintes de l’inflation

OTTAWA — Les libéraux fédéraux font face à une pression croissante pour expliquer comment ils prévoient remettre sur les rails une économie malmenée par la COVID-19 et juguler l’inflation, après un discours du Trône qui promet de freiner la hausse du coût de la vie.

Le taux d’inflation annuel a atteint en octobre un sommet en 18 ans, alimenté en grande partie par la hausse aux stations-service et dans les épiceries, sans compter les coûts du logement qui s’en viennent.

À ces pressions sur les prix à la consommation s’ajoute le problème des chaînes d’approvisionnement du monde entier, qui n’ont pas été en mesure de répondre à la demande croissante des consommateurs pour certains produits.

Le discours du Trône de mardi, qui expose les priorités des libéraux pour leur troisième mandat, note que les inquiétudes liées à l’inflation affectent les pays du monde entier, y compris le Canada, malgré ses performances économiques.

Le texte du discours évoquait la nécessité de lutter contre la hausse du coût de la vie et soulignait, comme éléments de solution, les promesses électorales des libéraux sur le logement et les mesures préélectorales pour un système national de garderies à 10 $.

Goldy Hyder, PDG du Conseil canadien des affaires, a salué l’engagement du gouvernement à bâtir «une économie plus résiliente, durable et compétitive», y compris les engagements à lutter contre le changement climatique et à stimuler l’investissement des entreprises.

Dennis Darby, président de Manufacturiers et exportateurs du Canada, a noté l’engagement du gouvernement pour des chaînes d’approvisionnement plus résilientes et espère voir plus de détails dans les lettres de mandat des ministres.

Pourtant, le discours du Trône n’a pas répondu à ce que les groupes d’entreprises et les partis d’opposition attendaient pour remédier au malaise économique et à une hausse du coût de la vie.

Les groupes d’entreprises espéraient également un plan visant à permettre de débloquer les goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement, mais aussi à freiner le plan de relance de 100 milliards $, craignant que des dépenses excessives à Ottawa ne stimulent l’inflation et entravent la reprise économique.

Réforme de l’assurance-emploi

«Il semble que tout soit une priorité, à l’exception de l’économie», a laissé tomber Perrin Beatty, président de la Chambre de commerce du Canada, ajoutant que plus de détails pourraient venir d’une mise à jour économique, prévue dans quelques semaines.

Le Conseil national des chômeurs et chômeuses (CNC) a déploré le silence du discours du Trône sur la réforme de l’assurance-emploi, malgré l’engagement des libéraux à ce sujet.

«Nous aurions souhaité un signal», a déclaré Pierre Céré, porte-parole du CNC. «La réforme de l’assurance-emploi est un enjeu majeur, mais on n’en entend pas encore parler (…) Nous espérons voir cette réforme se concrétiser le plus tôt possible, et se confirmer dans la lettre de mandat de la ministre.»

Le CNC déplore aussi que les mesures de soutien pour aider les travailleurs touchés par la pandémie demeurent temporaires — certaines sont même déjà terminées —, «laissant notamment les travailleurs et travailleuses autonomes sans filet social».

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, présentera bientôt un projet de loi qui apporterait un soutien aux industries encore en difficulté comme le tourisme et la restauration, et offrirait l’assurance-emploi aux travailleurs soumis à des reconfinements soudains. Cette décision fait partie de ce que le discours du Trône a appelé le virage du gouvernement vers «une aide plus ciblée et une gestion prudente des dépenses».

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a déclaré que son parti n’appuierait pas un projet de loi qui réduirait le soutien aux travailleurs. Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a manifesté son soutien, car la mesure pourrait aider les travailleurs du secteur culturel, durement touchés par la pandémie.

Le porte-parole conservateur en matière de finances, Pierre Poilievre, a laissé entendre que son parti pourrait soutenir un allégement ciblé, mais pas les mesures de relance prévues par les libéraux.

«Nous croyons que nous devrions revenir aux niveaux de dépenses normaux d’avant la COVID, a déclaré M. Poilievre. Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de créer de nouveaux programmes permanents de plusieurs milliards de dollars qui n’existaient pas avant.»