Toutes les provinces intensifient leurs efforts pour dépister rapidement les personnes atteintes de la COVID-19, mais certains laboratoires sont dépassés à cause d’une pénurie de produits chimiques essentiels aux tests.
«Nous voulons tous plus de tests», admettait mardi la directrice de la santé publique du Canada, la docteure Theresa Tam. L’Organisation mondiale de la santé estime aussi que le dépistage à grande échelle permet de freiner la pandémie, mais la demande mondiale a dépassé l’offre de réactifs — des produits chimiques spécifiques nécessaires pour effectuer les tests de dépistage.
Les «Center for Disease Control» américains ont également déclaré que ces réactifs essentiels étaient «maintenant en nombre insuffisant», une inquiétude reprise par les associations médicales dans le monde entier. Toutes ces agences de santé publique s’arrachent les solutions chimiques en même temps et, par conséquent, certains laboratoires canadiens tentent de trouver d’autres chaînes d’approvisionnement.
Près de 120 000 Canadiens ont été testés jusqu’ici pour le nouveau coronavirus — une moyenne de 10 000 par jour. Lundi, le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a lié l’énorme bilan de cas dans cette province à une pénurie de réactifs.
Certains groupes sont prioritaires au Canada pour les tests de dépistage, notamment les personnes qui résident dans des établissements de soins de longue durée, les patients déjà hospitalisés et le personnel soignant.
De nouveaux tests ?
Agriculture Canada a fourni des réactifs au laboratoire provincial de l’Alberta en attendant l’arrivée d’une commande. Ce laboratoire travaille également avec les universités de Calgary, de l’Alberta et de Lethbridge pour dénicher tout approvisionnement disponible. «S’il y a pénurie de réactifs, des mesures de contingences garantiront que nous n’aurons pas à ralentir ou à arrêter les tests», a assuré le porte-parole du ministère de la Santé de l’Alberta, Tom McMillan.
Le directeur de la santé publique du Manitoba ne pouvait pas quantifier cette semaine la pénurie dans sa province, mais il admettait que c’était là un facteur majeur dans le ralentissement des tests de dépistage. Le laboratoire provincial du Manitoba songe même à fabriquer ses propres réactifs, a ajouté le docteur Brent Roussin. Santé Canada explore également d’autres tests et le laboratoire national de Winnipeg travaille à déterminer leur efficacité.
«Ce virus s’est propagé incroyablement rapidement», a expliqué Jason Kindrachuk, titulaire d’une chaire de recherche sur les virus émergents à l’Université du Manitoba. «Nous n’avons pas pu prévoir la rapidité avec laquelle il se propagerait à travers le monde.»
Lorsque le nouveau coronavirus a commencé à émerger, début janvier, certains pays ont acheté des quantités importantes de fournitures essentielles, explique le professeur Kindrachuk. Ces pays, dont l’Australie, la Corée du Sud et Singapour, ont pu effectuer du dépistage à grande échelle — et ils ont ainsi réussi à freiner l’épidémie.
La pandémie a également entraîné des pénuries critiques d’équipements de protection individuelle, de respirateurs et d’écouvillons — ces longs cotons-tiges utilisés pour les prélèvements dans le nez et la gorge. Le professeur Kindrachuk avait déjà assisté à de tels problèmes d’approvisionnement au Libéria lors de l’épidémie d’Ebola en 2014. Tous ceux qui auraient dû être testés ne l’ont pas été, de sorte qu’il a fallu mettre l’accent sur la distanciation sociale, se souvient-il.