TORONTO — Dans les grandes villes, où plusieurs personnes vivent avec un ou plusieurs colocataires, la propagation de la COVID-19 fait en sorte que les gens peinent à savoir quoi faire si quelqu’un doit s’isoler dans un logis partagé.
Pour Lebni Avitia, monteur vidéo à Toronto, la pandémie a aggravé le stress quotidien de vivre dans un espace confiné avec plusieurs personnes.
M. Avitia souffre d’une maladie cardiaque qui le met à un risque plus élevé de complications s’il contracte le coronavirus, mais il dit qu’il a tout de même fallu du temps pour marteler à ses colocataires de prendre la distance sociale au sérieux.
Au début de la semaine, ses colocataires sortaient toujours dans des restaurants bondés, malgré les avertissements de plus en plus sévères des responsables de la santé publique de rester à la maison.
«C’était gênant quand j’ai réalisé [qu’ils ne restaient pas chez nous], a dit M. Avitia. Quand ils m’ont dit cela, j’ai envoyé un message dans une conversation de groupe disant essentiellement: ‘Je prévois de rester à l’intérieur, j’espère que nous pouvons tous faire de même’.»
Ç’a n’a pas été trop difficile d’être franc avec ses deux colocataires, mais cela l’a été de le communiquer à une personne que le trio hébergeait. Celle-ci quittait l’appartement tous les jours pour voir sa copine et sa mère.
«Je comprends, mais qui sait ce que font les gens que vous visitez ?, demande M. Avitia. Si vous sortez et ensuite vous êtes ici avec nous tous, qui sait ce qui peut être transmis?»
Statistique Canada n’a pas de données précises sur le nombre de Canadiens vivant avec des colocataires, mais selon le recensement de 2016, il y avait environ 582 000 «ménages hors famille de deux personnes ou plus» au pays, soit environ 4,1 % de tous ménages.
À Toronto, ce taux s’élève à 6,1 %, et 7,3 % à Vancouver.
Un nettoyage permanent
Sur son site internet, Santé publique Ontario dit que pour s’auto-isoler correctement dans une résidence partagée, on doit rester autant que possible dans une pièce séparée et utiliser une salle de bain séparée des autres, ce qui n’est pas toujours une option.
L’agence recommande que les espaces partagés comme les cuisines doivent avoir une bonne circulation d’air. Les surfaces doivent être nettoyées après chaque utilisation — une pratique qu’Avitia a dit avoir déjà établie avec ses colocataires.
Elle indique également de garder une distance de deux mètres entre les personnes et de porter un masque facial, si possible.
M. Avitia n’a pas envisagé ce que lui et ses colocataires feraient si l’un d’eux devait s’isoler. À ce stade, il a dit qu’il prévoyait retourner temporairement chez ses parents, à Niagara Falls.
Ce ne sont pas toutes les personnes vivant dans des logements partagés qui trouvent l’organisation de l’auto-isolement difficile.
Vivian George, qui travaille dans l’industrie du film et de la télévision, à Toronto, trouve que la gestion de sa propre période d’auto-isolement a été assez simple, malgré le fait que son colocataire ait une soixantaine d’années.
Elle raconte que l’appartement est déjà trop petit pour qu’ils puissent utiliser les espaces communs comme la cuisine en même temps.
Mme George ajoute avoir passé presque tout son temps dans sa chambre au cours des 10 derniers jours, après avoir développé des symptômes pseudo-grippaux.
Elle ne quitte la pièce que pour prendre des articles d’épicerie que ses amis ont déposés ou pour aller utiliser le micro-ondes.
«Je m’assure qu’il n’est pas là. S’il est là, j’attends qu’il parte, souligne Mme George, qui essaie de retenir sa toux jusqu’à ce qu’elle soit de retour dans sa chambre.
Son colocataire, bien qu’il soit à risque en raison de son âge, n’est pas trop dérangé par la propagation de COVID-19, a déclaré Mme George.
Selon elle, le côté irritant est d’être confinée dans sa chambre, la plupart du temps.
«C’est comme vivre dans un autobus touristique ou quelque chose du genre et devoir rester dans son coin», a dit Mme George.