Marier l’art et la science pour rendre hommage à des pionnières

MONTRÉAL — Elles ont changé le monde à leur façon, et pourtant, la reconnaissance qu’elles auraient méritée n’est jamais venue. Pour corriger cette injustice vécue par sept femmes scientifiques «que l’Histoire a effacées», l’artiste multidisciplinaire féministe MissMe leur consacre l’exposition nobELLES.

Nichée à Espace pour la vie, au Planétarium de Montréal, nobELLES vise à susciter une réflexion sur la place des femmes dans le milieu scientifique et sur les enjeux auxquels elles sont confrontées en raison de leur genre. 

Le projet est le fruit d’une rencontre entre MissMe et l’actuel directeur du Planétarium, Olivier Hernandez, qui a eu lieu en 2016. Ayant repris contact plus récemment, ils ont décidé de réaliser une exposition féministe qui célébrerait l’apport de ces scientifiques féminines.

Les physiciennes Lise Meitner et Donna Strickland, l’astrophysicienne Jocelyn Bell, l’astronome Vera Rubin, ainsi que les mathématiciennes Katherine Johnson, Mary Jackson et Emmy Noether sont mises en lumière par le crayon, le fusain, les pinceaux et les découpages de MissMe.

Ces femmes ont été choisies en raison de leur discipline, complémentaire ou connexe à l’astronomie et à ce qu’on peut apprendre en visitant le Planétarium, explique la principale intéressée.

«Pour moi, il y avait un souci de diversité et d’aller chercher des femmes d’un peu partout. On a parfois eu beaucoup de mal à les trouver ou à en apprendre sur elles parce qu’elles n’ont justement pas eu la reconnaissance à laquelle elles avaient droit», relève l’artiste, qui dit avoir beaucoup appris sur ses sujets en cours de route.

«Je n’en connaissais quasiment aucune d’elles, […] c’est honteux!» lâche-t-elle candidement. 

Mais même certaines personnes qui travaillent au Planétarium et qui sont diplômées en science ne les connaissaient pas toutes, ajoute MissMe, qui y a vu une validation de la pertinence de sa démarche.

«La société, à cette époque, a empêché la reconnaissance de certaines personnes à cause de leur genre, de leur ethnicité, et cela reflète la société et non leurs capacités», dénonce-t-elle.

Marier des antagonistes

Et si l’art et la science ont été traditionnellement antagonisés, comme si l’un était l’opposé de l’autre, MissMe, elle, a officié leur mariage à coups de crayon pour en démontrer la symbiose.

«En fait, cet antagonisme est un non-sens pour moi, dit-elle. Les scientifiques sont des gens de découvertes, mais pour découvrir, il faut se poser des questions, il faut questionner son environnement, il faut réfléchir différemment que tout le reste du monde, et c’est commun avec l’art. Ça prend de la créativité, dans l’art comme dans la science.

«L’art, c’est quelque chose qui va [contourner] certains niveaux de résistance qu’on a tous par l’émotion», ajoute-t-elle.

L’artiste montréalaise de renommée internationale a d’ailleurs choisi d’écrire des mots sur leur visage pour donner à ces femmes une parole qu’elles n’ont pas toujours eue.

«C’est essayer tant bien que mal d’incarner un peu plus la personne, parce qu’on a tendance à se limiter au physique et quand on fait un portrait, on se limite à un physique, concède MissMe. J’ai essayé, en mettant des mots, en mettant leurs mots, de montrer qui elles étaient, de faire comme si elles exprimaient leurs pensées, leurs réflexions intellectuelles et leur contexte.»

En images et en mots

En plus des sept oeuvres à l’effigie de ces égéries de la science, une baladodiffusion, produite, réalisée et animée par la journaliste Lili Boisvert, s’est greffée au projet.

Les sept premiers épisodes raconteront l’histoire de chacune des femmes faisant l’objet d’un portrait, puis le dernier de la série s’attardera au parcours et à la démarche artistique de MissMe.

«Ça peut ajouter une dimension à l’exposition, mais ça peut aussi être une expérience totalement différente si on écoute la balado à part, explique l’artiste. C’est un superbe complément, parce qu’un portrait, ça reste limité malgré les textes qui les accompagnent. Le Planétarium et Lili Boisvert ont fait un travail extraordinaire.»

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Cette dépêche a été rédigée avec l’aide financière de la Bourse de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.

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