MONTRÉAL — Tomas Jirousek, l’étudiant qui a convaincu l’Université McGill d’abandonner le nom «Redmen» — jugé offensant — pour identifier ses équipes sportives masculines, a été nommé major de promotion et a appelé les autres diplômés à combattre la discrimination systémique.
Le jeune homme de 22 ans, d’origine autochtone, a été nommé major de promotion de la faculté des arts, se joignant à une poignée d’autres diplômés des Premières Nations et des Inuits à recevoir un tel honneur.
Bien que la cérémonie de collation des grades ait été raccourcie, et surtout célébrée virtuellement en raison de la pandémie de la COVID-19, Tomas Jirousek a utilisé son discours pour faire référence au mouvement «Black Lives Matter» et aux autres luttes contre les injustices.
«Je crois que les étudiants de McGill en particulier sont très bien placés pour lutter contre le racisme systémique et l’oppression systémique qui persistent dans nos communautés», a commenté le jeune homme en entretien téléphonique.
Il a confié que tout en étant fier d’être choisi, il s’est senti triste en pensant à tous les autres étudiants brillants qui n’ont pas eu droit à la même reconnaissance.
«Il y a quelques décennies, la Loi sur les Indiens n’aurait pas permis à un étudiant autochtone d’être admis à McGill sans perdre son statut», a rappelé celui qui est membre de la nation Kainai, appartenant à la Confédération des Pieds-Noirs, en Alberta.
Tomas Jirousek, membre de l’équipe d’aviron, était en première ligne du mouvement étudiant ayant réclamé l’abandon du nom «Redmen» qui désignait autrefois les équipes masculines de l’université anglophone montréalaise.
Pour les Autochtones de la communauté étudiante, cette appellation était perçue comme offensante et aliénante.
L’an dernier, l’Université McGill a annoncé qu’elle abandonnait le nom ayant identifié ses équipes sportives pendant près de cent ans au terme d’un furieux débat entre ses défenseurs et ses détracteurs.
Bien que l’origine du nom puisait son inspiration de la couleur rouge identifiant les équipes et l’université, une référence aux Peuples autochtones est apparue dès les années 1950 quand les athlètes étaient visés par des insultes racistes.
«Le mot « Redmen » est largement reconnu comme un terme offensant par les Peuples autochtones, tels que l’indiquent d’importants dictionnaires anglais», a écrit la principale et vice-chancelière Suzanne Fortier dans sa décision favorable à la demande du mouvement d’opposition.
«Bien que cette définition raciste du mot ne reflète pas les croyances des générations d’athlètes ayant fièrement représenté les couleurs de McGill, nous ne pouvons pas ignorer cette interprétation contemporaine.»
Depuis l’abandon de leur nom, les équipes sportives masculines de l’université ne sont identifiées que par le nom McGill jusqu’à ce qu’une nouvelle appellation soit choisie.
Tomas Jirousek, qui va poursuivre son parcours à la faculté de droit de l’Université de Toronto à l’automne, souligne que cette expérience lui a permis d’apprendre que le racisme demeure bien présent, mais aussi qu’il y a des gens biens qui sont prêts à le combattre.
Au cours de sa campagne de mobilisation, il admet avoir été bouleversé de lire des messages contenant des insultes racistes et prétendant qu’il avait été admis à McGill uniquement parce qu’il est autochtone.
«Ce genre d’attaque personnelle sur mon intelligence en tant qu’Autochtone, sur la capacité d’une personne autochtone comme moi d’accéder à McGill, c’est blessant», a-t-il partagé.
Mais de manière tout aussi importante, le jeune militant dit avoir été encouragé par l’impressionnante vague de soutien que ses collègues étudiants autochtones et lui-même ont reçu de la part d’alliés non autochtones sans qui le changement de nom n’aurait pas été possible.
«On a fait un grand pas vers la réconciliation et cela me rend fier», lance-t-il.
L’Université McGill prévoit tenir une véritable collation des grades l’an prochain, ce qui devrait lui permettre de prononcer la version complète de son discours à titre de major de promotion.