OTTAWA — Une affirmation des autorités sanitaires chinoises selon laquelle un résidant de Pékin a été contaminé au variant Omicron par l’entremise d’un courrier en provenance du Canada a été qualifiée de ridicule et comique lundi.
Un média chinois contrôlé par l’État a d’abord soutenu que l’infection d’un résidant de Pékin le 7 janvier avait été le résultat de la réception d’une lettre ou d’un colis en provenance du Canada qui avait transité par Hong Kong.
L’article a attribué la possibilité que cela se soit produit au directeur adjoint du Centre de contrôle des maladies de Pékin, même si des organisations telles que l’Organisation mondiale de la santé et Postes Canada affirment que le risque de contracter un coronavirus à partir d’un envoi postal est faible.
Margaret McCuaig-Johnston, une spécialiste de la Chine à l’Université d’Ottawa qui a passé plus de trois décennies dans la fonction publique fédérale à travailler sur les questions chinoises, a déclaré que les responsables chinois doivent lire les plus récents documents scientifiques sur la propagation du virus de la COVID-19.
«Contrairement aux premiers jours, les scientifiques ont précisé qu’il ne restait pas sur les surfaces. Suggérer que ce serait sur du courrier venu du Canada après plusieurs jours est ridicule», a-t-elle déclaré.
Postes Canada affirme que l’Organisation mondiale de la santé et l’Agence de la santé publique du Canada ont déclaré que les risques associés au traitement du courrier, y compris le courrier international, sont faibles.
«Selon l’ASPC, il n’y a aucun risque connu que des coronavirus entrent au Canada sur des colis. En général, en raison de la faible capacité de survie des coronavirus sur les surfaces, il existe un faible risque de propagation à partir de produits ou d’emballages expédiés sur une période de jours ou semaines», indique une déclaration de Postes Canada.
«Actuellement, il n’y a aucune preuve que le COVID-19 soit transmis par des marchandises ou des colis importés», ajoute la société de la Couronne.
Selon Mme McCuaig-Johnston, l’allégation chinoise montre que ses dirigeants sont toujours en colère contre le Canada après son différend de longue date sur l’arrestation de la directrice financière de Huawei, Meng Wanzhou, en 2018, une affaire d’extradition qui a été abandonnée l’année dernière, ce qui lui a permis de retourner en Chine.
Mme Meng a été arrêtée à Vancouver en décembre 2018 en raison d’un mandat d’extradition américain pour avoir prétendument violé les sanctions américaines contre l’Iran. Neuf jours plus tard, la Chine a arrêté deux hommes canadiens, Michael Kovrig et Michael Spavor, et les a accusés d’être des espions – des allégations que le Canada et des dizaines d’alliés occidentaux ont rejetées comme des représailles sans fondement.
L’affaire a plongé les relations Canada-Chine à un niveau historiquement bas. Les États-Unis ont abandonné leur demande d’extradition contre Mme Meng en septembre, et elle a été libérée et a pu retourner en Chine. MM. Kovrig et Spavor ont été rapatriés au Canada simultanément.
Il n’est pas clair si les relations entre le Canada et la Chine ont entamé une sorte de rebond significatif depuis que ce différend majeur entre les deux pays a été résolu.
Mme McCuaig-Johnston a déclaré que le président chinois Xi Jinping était personnellement irrité par l’arrestation de Mme Meng et qu’il choisissait probablement de cibler le Canada quand cela lui convenait. Elle a dit que cela pourrait expliquer cette dernière insinuation autour du système postal canadien.
«Le Canada est le pays ciblé, ce qui suggère que nous sommes toujours dans le collimateur de Pékin», a-t-elle tranché.
Le ministre de la Santé, Jean-Yves Duclos, a semblé ne pas être au courant de la polémique lorsqu’il a été interrogé à ce sujet lors d’une conférence de presse lundi.
Il a déclaré que bien qu’il puisse avoir sa propre opinion sur les raisons pour lesquelles la Chine faisait cette allégation, il s’en remettait aux experts quant à la façon dont la COVID-19 peut se propager.
«C’est une allégation extraordinaire, mais je ne suis pas un expert et donc j’ai demandé à des experts virologues et à la Santé publique du Canada de se prononcer là-dessus», a indiqué le ministre.
«Nous vérifierons auprès des responsables et de nos partenaires du monde entier, a ajouté M. Duclos en anglais. Je pense que c’est quelque chose non seulement de nouveau, mais aussi d’intrigant et certainement pas en accord avec ce que nous avons fait à la fois au niveau international et national.»
Le chef conservateur Erin O’Toole a qualifié l’affirmation chinoise de «comique» et a déclaré qu’il s’agissait d’un rappel que les informations émanant de Chine ne sont pas fiables.
M. O’Toole a réitéré les critiques de son parti à l’encontre du gouvernement pour ne pas avoir procédé à un examen complet de la sécurité nationale du projet d’achat d’une société de développement minier de lithium par une entreprise chinoise. Le chef conservateur a déclaré que le Canada doit protéger son accès au lithium, car il s’agit d’un ingrédient clé des batteries pour véhicules électriques.
«Le Canada doit protéger notre approvisionnement et notre accès aux minéraux essentiels comme le lithium pour protéger notre économie et notre avantage concurrentiel», a dit M. O’Toole.
Dans une déclaration, Innovation, Sciences et Développement économique Canada indique que toutes les acquisitions potentielles impliquant des minéraux critiques sont soumises à un examen par la communauté canadienne de la sécurité et du renseignement avant de décider si un examen de sécurité nationale à grande échelle est justifié.
Le ministère a déclaré qu’il était lié par la confidentialité commerciale et ne pouvait pas commenter l’affaire en cours. Mais en général, il a déclaré pouvoir évaluer des cas individuels en fonction de la «nature des gisements de minerais» et du fait qu’une entreprise exerce des activités à grande échelle au Canada ou est «principalement domiciliée ici pour des raisons réglementaires ou autres avec peu de personnel ou d’actifs locaux».
La société en question exploite une mine en Argentine et est enregistrée à Toronto.