MONTRÉAL — Une association a conçu deux nouveaux outils pour aider les pharmaciens à traiter les patients qui se font prescrire des opioïdes et ainsi éviter que ceux-ci développent une dépendance à ces médicaments utilisés pour soigner la douleur.
Félice Saulnier, une pharmacienne spécialiste des dépendances qui a aidé à créer les outils, mentionne que les pharmaciens sont déjà vigilants lorsqu’ils gèrent ces cas, mais avec la crise actuelle de dépendance aux opioïdes, «il faut toujours en faire plus», estime-t-elle.
L’instigatrice du projet, l’Association des bannières et des chaînes de pharmacies du Québec (ABCPQ), propose d’abord un nouvel algorithme d’aide à la décision pour que ces professionnels de la santé effectuent une «évaluation exhaustive de chaque patient».
Les pharmaciens se verront offrir une formation sur cet algorithme divisé en sept étapes, qui représentera une sorte d’aide-mémoire quant aux questions qu’ils devraient se poser avant de servir le médicament au patient.
«Par exemple, on va essayer de valider la durée du traitement — on sait qu’elle doit être courte en douleur aiguë —, on va s’assurer qu’il y ait d’autres médicaments pour le traitement de la douleur qui ont été essayés, on va vérifier le risque de dépendance, le risque de surdose», a indiqué Mme Saulnier, qui a travaillé de concert avec Philippe De Grandpré, un pharmacien spécialisé en traitement de la douleur.
L’ABCPQ a aussi mis au point un formulaire de consentement éclairé qui servira à «faciliter des discussions parfaitement transparentes entre le pharmacien et son patient afin de favoriser un traitement optimal de la douleur tout en gérant les risques».
«On donne évidemment des conseils à nos patients lorsqu’on donne les opioïdes, mais c’est vraiment un formulaire qui va favoriser une discussion franche entre le patient et son pharmacien pour s’assurer qu’on vient couvrir l’ensemble des aspects lorsqu’on remet une ordonnance», a expliqué Mme Saulnier.
Ce formulaire permettra donc au pharmacien de se souvenir de tous les points qu’il devrait aborder avec le patient avant qu’il reçoive le médicament.
L’association précise dans un communiqué que les outils ont été conçus pour aider le pharmacien, et non se «substituer à son jugement».
«L’algorithme et le formulaire de consentement se veulent des mesures de prévention additionnelles et complémentaires aux pratiques régies par l’Ordre des pharmaciens, afin d’agir ensemble en amont dans la lutte contre la dépendance et les surdoses d’opioïdes», a déclaré Denis M. Roy, président de l’ABCPQ, dans un communiqué.
Peu de recours pour les pharmaciens
Félice Saulnier souligne que les pharmaciens sont encore très limités dans leur champ d’action pour intervenir auprès de patients vulnérables.
En ce moment, lorsqu’ils perçoivent un problème, ils vont tenter de joindre le prescripteur pour y remédier.
Mais il leur est impossible de diminuer les doses, même lorsque le patient est d’accord. Par exemple, si le pharmacien reçoit une ordonnance d’un médicament avec une dose de 2 milligrammes, il ne peut pas servir des doses de 1 milligramme.
De plus, ils n’ont généralement pas accès à l’objectif du traitement, qui n’est pas écrit sur l’ordonnance.
«Ce sont toutes des choses avec lesquelles on doit conjuguer. On veut en faire plus, mais on doit demeurer dans notre cadre réglementaire», a-t-elle soutenu.