QUÉBEC — À deux reprises, une jeune fille de 18 ans de Sherbrooke, victime d’agression sexuelle, a tenté sans succès récemment d’obtenir une trousse médico-légale en se rendant à l’hôpital. Elle est repartie bredouille, les deux fois, faute de personnel pour l’accueillir.
En choeur, le gouvernement et les partis d’opposition ont dénoncé cette situation, mercredi, à l’Assemblée nationale.
La trousse médico-légale est un élément de preuve précieux, en cas d’agression sexuelle, quand la présumée victime décide de porter plainte et d’entreprendre un recours judiciaire. Elle doit être faite dans les jours suivant l’agression.
«Bris de service complètement inadmissible», a commenté la députée solidaire de Sherbrooke, Christine Labrie, en s’adressant au ministre Lionel Carmant.
«La victime aurait dû être accueillie, accompagnée, soignée, pas retournée chez elle deux fois», a renchéri la députée libérale de Verdun, Isabelle Melançon.
Sur la défensive, le ministre délégué à la Santé, Lionel Carmant, a convenu lui aussi que la situation était «inacceptable», s’engageant à la corriger et promettant d’«investir sérieusement en agressions sexuelles».
Interpellée à son tour, la ministre de la Condition féminine, Isabelle Charest, a jugé qu’il n’était «pas acceptable qu’une femme n’ait pas les ressources nécessaires pour pouvoir pallier à cette situation-là, ne puisse pas avoir ce qu’elle a besoin pour poursuivre son chemin».
Le gouvernement promet de demander des comptes au CIUSSS de l’Estrie pour savoir ce qui a pu se passer exactement.
Selon les informations obtenues, en septembre, la jeune femme s’est présentée au CHUS Fleurimont deux jours de suite pour obtenir une trousse et les deux fois on l’a renvoyée chez elle, parce qu’il n’y avait aucune infirmière sur place formée pour gérer ce genre de situations.
«Jamais, jamais, jamais nous n’avons fait de délestage au niveau des urgences» des hôpitaux, a assuré le ministre Carmant, se disant soucieux d’éviter les bris de services.
Le Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) de l’Estrie a soutenu qu’une telle situation s’était produite à quelques reprises au cours des derniers six mois.
Selon la députée Labrie, il ne fait pas de doute que la pénurie générale de personnel dans le réseau de la santé est la véritable cause du problème.
Il ne s’agit donc pas, a-t-elle fait valoir en entrevue téléphonique, de punir les gestionnaires du CIUSSS de l’Estrie et de s’en servir comme boucs émissaires, alors que le problème est bien plus profond.
«La faute, elle est bien en amont de ça, dans la pénurie de personnel» hospitalier, selon la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie n’est donc pas du tout rassurée par les réponses du ministre Carmant, qui n’a pas donné d’assurance à l’effet de proscrire toute pénurie de personnel à l’avenir, dont des infirmières.
Le ministre Carmant «n’a pas compris», selon elle. «Il nous parle de financement des CALACS, de trajectoires de services. Tout ça est bien beau, mais ça ne met pas plus de personnel sur le plancher, dans les hôpitaux», déplore-t-elle.
Elle estime que les bris de services dans le réseau de la santé sont de plus en plus fréquents dans sa région, alors que l’Estrie n’est même pas en zone rouge.