OSHKOSH, Wis. — Gabe Loiacono est le type d’électeur que le président Donald Trump ne peut pas vraiment se permettre de perdre.
Il habite un comté crucial d’un État chaudement disputé et qui compte parmi ceux qui décideront de la présidence.
Le professeur d’histoire à l’université n’a pas voté pour un candidat démocrate en plus de 20 ans. Mais cette année, il votera pour Joe Biden parce qu’il considère que M. Trump a complètement bâclé la gestion de la pandémie de coronavirus.
« Le président Trump ne semble toujours pas prendre la pandémie assez au sérieux », a déploré M. Loiacono. Il ajoute ne jamais avoir pensé que M. Trump était « entièrement mauvais », mais il « rêve trop en couleurs et il n’y a pas assez de conseils clairs ».
Et maintenant, le virus prend de l’ampleur dans ces États dont le président sortant a le plus besoin, au pire moment pour lui. Les nouvelles infections se multiplient au Wisconsin et ailleurs dans le Midwest. Dans l’Iowa, un sondage place M. Trump au coude à coude avec M. Biden, même s’il a balayé l’État avec une avance de près de dix points de pourcentage il y a quatre ans.
La réponse de M. Trump à la pandémie menace sa mainmise sur le Wisconsin, qu’il a remporté par moins de 23 000 voix en 2016, selon le directeur des sondages de la faculté de droit de l’université Marquette.
« Une approbation de sa gestion de la COVID est le deuxième indicateur le plus puissant du choix des électeurs, dit Charles Franklin. Et ce n’est pas seulement une anomalie dans un seul sondage. »
Ce critère arrive derrière l’affiliation politique et l’approbation générale de la performance de M. Trump en tant que président.
Les Centers for Disease Control and Prevention ont indiqué dimanche que, parmi les États américains, le Wisconsin avait le troisième taux le plus élevé de nouvelles infections sur sept jours. L’Iowa arrivait en dixième place.
Le comté fortement col bleu de Winnebago, dans le Wisconsin, englobe la ville d’Oshkosh. M. Trump l’a ravi aux démocrates en 2016. Mais aujourd’hui, Winnebago compte parmi les dix pires comtés du Wisconsin au chapitre des nouvelles infections, selon les données de l’université Johns Hopkins compilées par l’Associated Press.
La tendance est similaire dans l’Iowa. Un autre comté col bleu, celui de Dubuque, est l’un des dix où le nombre d’infections par personne progresse le plus rapidement depuis deux semaines. M. Trump a remporté une courte victoire il y a quatre ans dans ce comté qui votait démocrate depuis les années 1950.
Dans le Wisconsin, où les sondages donnent à M. Biden une avance mince mais stable, l’approbation de la gestion de la pandémie par M. Trump est passée de 51 % en mars à 41 % en octobre, selon un sondage Marquette. Cette chute est intéressante, quand on sait que l’approbation générale de la performance de M. Trump est restée stable autour de 45 %.
Des sondages dans l’Iowa montrent que là aussi, la perception de la gestion de la crise sanitaire par le président est plus négative que positive. La course y demeure serrée, et il semblerait que le coronavirus arrive en tête de liste des critères sur lesquels les électeurs baseront leur choix.
Au moment où M. Trump entame une dernière semaine de campagne endiablée, il continue d’organiser des événements qui défient souvent les règles sanitaires locales. Sa campagne répond que ses partisans ne font qu’exercer leurs droits en vertu du premier amendement.
Le président répète aussi que la pandémie «tire à sa fin», ce qui lui a valu d’être réprimandé par des experts comme le docteur Anthony Fauci, le plus éminent spécialiste des maladies infectieuses du pays. Il blâme aussi les médias pour leur couverture de la crise.
ALL THE FAKE NEWS MEDIA WANTS TO TALK ABOUT IS COVID, COVID, COVID. ON NOVEMBER 4th, YOU WON’T BE HEARING SO MUCH ABOUT IT ANYMORE. WE ARE ROUNDING THE TURN!!!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) October 27, 2020
« LES MÉDIAS DES FAUSSES NOUVELLES VEULENT SEULEMENT PARLER DE LA COVID, COVID, COVID, a-t-il lancé sur Twitter mardi. LE 4 NOVEMBRE VOUS N’EN ENTENDREZ PRESQUE PLUS PARLER ! ON ARRIVE AU BOUT ! »
Lors de son débat avec M. Biden la semaine dernière, M. Trump a insisté que le virus, malgré la recrudescence de cas, « va s’en aller. Il s’en va ». Ces commentaires sont en opposition directe à ce qu’il a dit au journaliste Bob Woodward en février, à qui il a déclaré qu’il « cherche toujours à minimiser [la crise] » pour éviter de causer une panique.
Dimanche, le chef de cabinet de la Maison-Blanche, Mark Meadows, a dit au réseau CNN qu’« on ne contrôlera pas la pandémie ». La veille, on avait confirmé que son homologue dans l’équipe du vice-président Mike Pence, Marc Short, avait été infecté par le virus.
Le nombre d’infections est aussi en hausse depuis deux semaines dans des États du Midwest chaudement disputés comme le Michigan, le Minnesota et l’Ohio, même si la situation y est moins critique que dans le Wisconsin et l’Iowa, selon les données de Johns Hopkins.
La pandémie est importante parce qu’elle touche tous les Américains personnellement, et bien souvent économiquement, a rappelé Terry Madonna, un observateur de longue date de la politique en Pennsylvanie.
« C’est partout, a-t-il dit. Ce n’est peut-être pas dans votre famille. Mais vous connaissez quelqu’un qui l’a eu. On ne peut pas y échapper dans les nouvelles et dans notre propre vie. »
Et des électeurs comme M. Loiacono demandent des comptes au président.
« La responsabilité du gouvernement est de mener en temps de crise, a dit l’homme de 44 ans. Le président a reconnu qu’il en a parlé plus positivement parce qu’il pensait qu’il avait un rôle de meneuse de claque. Je comprends un peu, mais je pense que ce n’était pas la bonne décision. »