OTTAWA – Le gouvernement fédéral n’a vraisemblablement pas l’intention d’invoquer la clause nonobstant pour se soustraire au jugement de la Cour suprême du Canada sur l’aide médicale à mourir.
«Je ne compterais pas là-dessus», a simplement indiqué mardi le ministre fédéral de la Justice, Peter MacKay, lorsque La Presse Canadienne lui a demandé quelle suite le gouvernement comptait donner à la décision historique de vendredi dernier.
Dans un jugement unanime, le plus haut tribunal au pays a invalidé les articles du Code criminel qui interdisent à un médecin d’aider l’un de ses patients gravement malade à mourir, les jugeant inconstitutionnels.
Le gouvernement aurait pu avoir recours à la clause dérogatoire pour s’y soustraire pendant une période maximale de cinq ans, mais il semble qu’Ottawa n’ira pas dans cette direction, selon les propos de M. MacKay.
Il reste à savoir laquelle des deux options restantes le gouvernement privilégiera: il a le choix de réécrire sa loi d’ici 12 mois, ou encore de ne rien faire, ce qui rendrait légale l’aide à mourir fournie par un médecin, dans les limites des paramètres établis par la Cour.
Le ministre MacKay n’a pas voulu ouvrir son jeu davantage, mais il a plaidé qu’il fallait «prendre le temps» d’analyser la décision en profondeur et «déployer des efforts considérables» à consulter divers regroupements et associations de médecins.
Le hic, c’est que le gouvernement dispose de peu de temps — et à moins de neuf mois des élections générales, certains prédisent qu’il ne voudra pas s’attaquer à l’épineux dossier de l’aide médicale à mourir.
Mais «le processus (de consultation) était déjà bien entamé» et il «l’était avant même que la décision ne tombe», a assuré mardi l’élu conservateur en marge de la cérémonie d’accueil de la nouvelle juge québécoise à la Cour suprême, Suzanne Côté, qui se tenait dans la salle du plus haut tribunal au pays, à Ottawa.
Peter MacKay a spécifié que le personnel du ministère fédéral de la Justice se pencherait sur des projets de loi privés existants, mais aussi sur ce qui s’était fait du côté de Québec, qui a adopté en juin dernier sa loi sur les soins de fin de vie.
L’adoption de cette loi ne s’est pas faite du jour au lendemain. Créée en décembre 2009, la commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité aura déposé son rapport en mars 2012, après avoir notamment mené une série de consultations aux quatre coins du Québec.
Quoi qu’il advienne du côté d’Ottawa, le gouvernement fédéral doit s’assurer que le jugement de la Cour suprême du Canada soit respecté, mais il a également «l’obligation de protéger l’ensemble des intérêts des Canadiens», a précisé M. MacKay.
Il a dit avoir des «inquiétudes particulières» pour les personnes vivant avec un handicap, et souhaite prendre le temps de prêter une oreille attentive à leur point de vue.
«C’est un enjeu profondément émotif et personnel pour plusieurs, et il a des impacts d’une portée considérable, c’est le moins qu’on puisse dire», a dit le ministre.