OTTAWA – Les procureurs de la Couronne n’ont pas à tenir compte du statut d’Autochtone d’un accusé lorsqu’ils décident s’il y a lieu de demander une peine minimale obligatoire pour alcool au volant, a tranché la Cour suprême du Canada.
La Constitution ne les oblige pas à le faire, a précisé le plus haut tribunal du pays dans son jugement unanime rendu vendredi.
Car si une peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction, le devoir d’infliger une peine proportionnée incombe aux juges, et non aux procureurs du ministère public.
Dans cette affaire, un homme de Terre-Neuve, un Autochtone, avait été reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies.
Frederick Anderson avait déjà été trouvé coupable de cette même infraction à quatre reprises.
Selon le Code criminel, une peine minimale de 30 jours d’emprisonnement est infligée pour une deuxième infraction de conduite avec facultés affaiblies, et pour une infraction subséquente, la peine minimale est de 120 jours de prison.
Le ministère public avait avisé l’accusé de son intention de demander une peine plus sévère, avant qu’il n’enregistre un plaidoyer, comme il doit le faire.
Mais le juge du procès a estimé qu’en signifiant l’avis à l’accusé sans prendre en considération son statut d’Autochtone, le procureur du ministère public avait contrevenu à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Frederick Anderson a donc été condamné à une peine de 90 jours d’emprisonnement. La Cour d’appel avait rejeté l’appel interjeté contre la peine.
Mais la Cour suprême a finalement décidé d’y substituer une peine de 120 jours.
La Cour a souligné que les procureurs de la Couronne ont une discrétion lorsqu’il s’agit de demander au juge une peine plus sévère.
«La décision du poursuivant est une question de pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites et les tribunaux ne peuvent contrôler cette décision que s’il y a eu abus de procédure», est-il écrit dans le jugement.