MONTRÉAL – Une étude menée à l’Université de Montréal démontre que suite à une importante vague de fusions et d’acquisitions, la part de marché des cinq maisons de publication de recherche les plus importantes serait passée à 50 pour cent dès 2006, alors qu’elle n’était que de 30 pour cent en 1996, et de 20 pour cent en 1973.
Globalement, les grands éditeurs contrôlent plus de la moitié du marché des articles scientifiques tant dans les sciences naturelles et médicales que dans le domaine des sciences sociales et humanités, explique le professeur Vincent Larivière de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information, qui a mené l’étude.
De surcroit, ces grands éditeurs commerciaux réalisent des chiffres d’affaires énormes, avec des marges de profits de près de 40 pour cent, a ajouté le professeur Larivière.
Le professeur Larivière et ses collègues ont obtenu leurs résultats en analysant l’ensemble des articles scientifiques publiés entre 1973 et 2013 et indexés dans la base de données Web of Science.
Puis, afin de retracer l’évolution de la propriété des revues dans le marché complexe et dynamique de la publication savante, les chercheurs ont passé en revue un historique des fusions et acquisitions, les communiqués de presse diffusés sur les sites des éditeurs, ainsi que les profils d’entreprise de ces derniers.
Ils ont constaté que Reed-Elsevier, Springer, Wiley-Blackwell, Taylor & Francis et Sage publient désormais plus que 50 pour cent des articles savants, tous domaines confondus.
Plusieurs facteurs contribuent à expliquer la profitabilité exceptionnelle de cette industrie, disent les chercheurs. Notamment, les éditeurs n’auraient pas à payer pour les articles ni pour le contrôle de leur qualité, qui sont fournis gratuitement par la communauté scientifique. De plus, l’éditeur jouirait d’un monopole sur le contenu des revues qui, avec le numérique, peuvent être publiées en un seul exemplaire dont l’accès sera vendu à de multiples acheteurs.
La communauté scientifique a commencé à protester contre les pratiques commerciales agressives des grands éditeurs, indique le professeur Larivière. L’ampleur d’un tel mouvement est cependant limitée par le fait que les revues servent toujours à l’attribution du capital scientifique aux chercheurs.