OTTAWA – Le gouvernement conservateur espérait probablement se refaire une beauté en 2014 en parlant oléoducs, commerce international et aide aux victimes d’actes criminels; il devra plutôt réécrire la loi sur la prostitution.
La Cour suprême du Canada a rendu vendredi un jugement historique, en déclarant inconstitutionnels les articles sur la sollicitation, la tenue d’une maison de débauche et le proxénétisme de la loi sur la prostitution.
La cour a donné un an au Parlement pour écrire une nouvelle loi avant que l’actuelle ne soit plus valide.
Alors que des prostituées ont applaudi le jugement unanime de la Cour suprême, dans l’espoir qu’il mène à la décriminalisation complète de leur métier, il semble y avoir peu de chances que le gouvernement Harper en arrive là.
En mars 2012, le premier ministre disait à la Cour d’appel de l’Ontario que son gouvernement percevait la prostitution comme étant mauvaise pour la société, les communautés et les femmes, particulièrement les femmes vulnérables. Il a assuré qu’il continuerait de s’y opposer.
Le mois dernier à Calgary, l’assemblée politique conservatrice a adopté une résolution visant à élaborer un plan qui ciblerait «les acheteurs des services de la prostitution et le marché du trafic humain en criminalisant l’achat d’actes sexuels et ainsi que toute tierce partie tentant d’en profiter».
Vendredi, le ministre de la Justice Peter MacKay a publié une déclaration dans laquelle il disait que le gouvernement étudiait «toutes les options possibles pour faire en sorte que les lois criminelles continuent d’enrayer les torts considérables que cause la prostitution aux collectivités, aux personnes qui se livrent à la prostitution et aux personnes vulnérables».
La ministre du Patrimoine Shelley Glover et le ministre de l’Emploi et du Développement social Jason Kanney y sont aussi allés de leur déclaration, affirmant qu’ils allaient continuer à protéger les travailleuses du sexe.
M. MacKay et la Cour suprême semblent au moins s’entendre sur un point: l’enjeu est complexe et délicat.
Le gouvernement pourrait repartir à zéro, mais faire des consultations publiques et rédiger un projet de loi est une entreprise ambitieuse avec une limite d’un an.
Le vice-président du groupe évangélique Evangelical Fellowship of Canada, Don Hutchinson, a affirmé vendredi que son groupe avait déjà fait des propositions et discuté avec le ministère de la Justice «et d’autres au gouvernement du Canada».
Le groupe souhaite que le Canada adopte le modèle scandinave, dans lequel les accusations sont portées aux proxénètes et aux clients, et non aux travailleurs du sexe. D’autres groupes partagent cette vision.