MONTRÉAL – La question constitutionnelle a continué d’occuper une grande partie de l’avant-scène de la campagne électorale, samedi, sinon la totalité.
Venu présenter des facettes de son «Plan Nord+», le chef du PLQ, Philippe Couillard, a dû tempérer ses propos sur une éventuelle adhésion de la province dans la Constitution en rappelant à plusieurs reprises qu’il n’y avait «aucune urgence» d’agir.
La veille, à Val-d’Or, M. Couillard avait pourtant indiqué qu’il désirait entreprendre une tournée canadienne afin de convaincre les provinces ainsi que le gouvernement fédéral d’entamer des démarches pour que le caractère spécifique de la nation québécoise soit reconnu dans la Constitution canadienne.
Questionné de nouveau sur le dossier, le chef libéral a laissé entendre qu’il allait plutôt laisser venir ses homologues. «On va voir si les gens veulent venir à nous (…), a-t-il dit. Ça ne sera pas le but de mes visites. Est-ce que nos libertés sont menacées actuellement? Personne n’est malheureux au Québec.»
Même si tout amendement constitutionnel nécessite entre autres l’accord de l’ensemble des provinces et territoires en plus de celui du gouvernement fédéral, le chef du PLQ ne croit pas que d’autres discussions entourant l’adhésion du Québec à la Constitution pourraient semer la zizanie dans le Canada. «Ma position d’unir le Canada et d’unir le caractère spécifique du Québec est bien reçue partout», a assuré M. Couillard.
La leader du Parti québécois, Pauline Marois, a beau marteler que l’enjeu du scrutin du 7 avril ne porte pas sur la question nationale mais sur l’élection d’un gouvernement «responsable» à la tête du Québec, elle a exigé en revanche que Philippe Couillard s’engage à soumettre tout changement constitutionnel à un référendum.
Au 11e jour de la campagne électorale, la chef péquiste a sonné la charge contre son adversaire libéral qu’elle soupçonne de vouloir réintégrer le Québec dans le giron constitutionnel sans consulter la population.
Selon la leader péquiste, M. Couillard doit garantir aux Québécois qu’ils seront consultés par voie de référendum avant de signer la constitution de 1982.
«Il est temps que le chef soit honnête et franc. Il doit garantir que les Québécois auront le dernier mot, il doit nous garantir qu’avant de signer la constitution canadienne, il consultera les Québécois au moyen d’un référendum. Il est temps que M. Couillard réponde à ces questions», a soutenu la leader péquiste.
«C’est quand même incroyable de penser que dans la tête de Philippe Couillard, les Albertains pourront se prononcer sur l’avenir du Québec mais pas les Québécois. Moi, je me suis engagée à consulter les Québécois qui auront le dernier mot quoi qu’il arrive», a-t-elle dit.
Plus tard samedi, Mme Marois s’est livrée à un bain de foule dans un centre commercial de Boucherville où elle est tombée nez à nez avec une jeune femme opposée à la charte des valeurs.
Étudiante en droit international, Samar Assoum a reproché sans détour à la chef péquiste de diviser les Québécois avec le projet de charte et d’occulter les «vrais» problèmes que sont entre autres le décrochage scolaire et le manque de médecins.
Mme Marois, qui avait jusque-là reçu bon accueil, a écouté poliment et fait valoir que son parti était «respectueux de toutes les religions».
La CAQ en difficulté
De son côté, le chef de la CAQ, François Legault, a refusé de se laisser démonter par les piètres résultats de son camp dans un sondage publié samedi. Son parti ne recueille que 14 pour cent d’appuis chez les répondants. Le Parti québécois et le Parti libéral obtiennent chacun 37 pour cent des intentions de vote.
«On est dans une situation, où il y a une côte à remonter. Je suis serein, je n’oublie jamais que j’ai été choyé par la vie. Je ne viendrai pas me plaindre», a-t-il fait savoir, alors qu’il était pressé de questions par les médias.
Il a donné un aperçu de l’attitude qu’il entend adopter d’ici au 7 avril, affirmant vouloir «continuer de se battre jusqu’à la fin pour dire aux Québécois [que] ce n’est pas vrai qu’on est condamné à ne parler que d’un référendum dont la plupart des Québécois ne veulent pas».
M. Legault mise énormément sur les débats télévisés pour faire passer son message, ce qu’il peine à faire dans un contexte actuel, fort polarisé entre péquistes et libéraux. «Il y a une bonne partie du vote qui se décide à ce moment-là. Il y a encore beaucoup d’indécis. Je ne baisse pas les bras et je vais me battre pour l’or», a-t-il dit.
Loin du tumulte référendaire, Québec solidaire a dit compter sur une hausse des redevances minières pour créer un nouveau fonds de diversification économique pour les régions.
De passage en Abitibi-Témiscamingue, le député sortant de Mercier, Amir Khadir, a affirmé ce fonds pourrait disposer d’environ 200 millions $ par année.
Pour y arriver, un gouvernement solidaire imposera une nouvelle formule pour calculer les redevances que doivent payer les sociétés minières. Selon la formation, l’État devait avoir droit à au moins cinq pour cent de la valeur brute du minerai extrait.
Québec solidaire veut élaborer une formule de péréquation afin que toutes les régions de la province puissent avoir droit à une partie du pactole. Selon M. Khadir, «les régions mono-industrielles qui souvent produisent les ressources [minières sont celles] qui ont le plus besoin [d’aide]» et elles auraient droit à de plus importantes tranches du gâteau que les autres.