MONTRÉAL – Dans le cadre de son interrogatoire de deux des enquêteurs de la Commission Charbonneau, lundi, l’avocat du Fonds de solidarité de la FTQ, Me André Ryan, a cherché à démontrer qu’aucun corps policier n’avait mis en garde le Fonds pour l’aviser qu’une entreprise ayant des liens avec des proches du crime organisé cherchait à obtenir du financement de sa part.
Me Ryan a notamment fait dire à l’enquêteur Nicodemo Milano que ni la Sûreté du Québec ni le Service de police de la ville de Montréal n’avaient prévenu le Fonds de solidarité que derrière l’entreprise Carboneutre se trouvait le caïd Raynald Desjardins.
La société de décontamination des sols Carboneutre cherchait à obtenir du financement du Fonds de solidarité, par l’intermédiaire de Jocelyn Dupuis, qui fut directeur général de la FTQ-Construction jusqu’en novembre 2008. Le Fonds n’y a pas investi.
«Donc, toujours dans le but de protéger des enquêtes en cours, on ne va pas notifier des tiers à l’effet qu’il y a cette possible activité en lien avec le crime organisé; c’est exact?» lui a demandé Me André Ryan.
«S’il y a un danger sur la vie, s’il y a des menaces, c’est certain que les agences policières vont aviser les personnes. Mais lorsqu’on est en cueillette d’informations, cueillette de preuves pour traduire des individus devant les tribunaux, certainement on ne va pas les aviser», a expliqué l’enquêteur Milano.
Devant la juge France Charbonneau qui ne voyait pas la pertinence de certaines de ses questions, Me Ryan a exposé sa théorie: «j’aimerais ça qu’il nous dise comment on fait pour se protéger quand on est un entrepreneur, quand on est une institution financière, contre des individus qui ont des liens avec le crime organisé, mais qu’on ne peut pas le savoir?»
Me Ryan a aussi invité l’enquêteur à formuler ses recommandations pour permettre à des institutions comme le Fonds de solidarité de se prémunir contre une possible infiltration du crime organisé «compte tenu du fait que la police _ pour des raisons qu’on comprend _ choisit de ne pas divulguer, pour protéger ses enquêtes, la présence du crime organisé dans des entreprises qui appliquent chez nous».
M. Milano a évoqué ce qu’il a appelé «les trois C», à savoir les connaissances, les communications et le courage de dénoncer.
Avec le second témoin enquêteur à la commission, Stephan Cloutier, Me Ryan a adopté la même approche, cherchant à démontrer que même s’il était clair pour les policiers que certaines personnes avaient des relations avec des membres du crime organisé, les gens d’affaires et le Fonds, eux, l’ignoraient.
En après-midi, la commission devait entendre des requêtes frappées d’un interdit de publication. L’une d’elles vise à faire casser l’assignation à comparaître reçue par Louis-Pierre Lafortune, ancien vice-président des Grues Guay, et une autre vise à ce qu’il soit entendu à huis clos _ et non en non-publication _ par la commission.