Turcotte: impossible de déterminer la quantité de lave-glace, dit un expert

SAINT-JÉRÔME, Qc – Il est impossible de déterminer la quantité de lave-glace qu’a bue Guy Turcotte avant de tuer ses enfants, ni le taux de méthanol qu’il avait alors dans le sang, a témoigné un expert au procès de l’homme accusé du meurtre des ses deux enfants.

L’expert en neuropharmacologie appelé par la défense a tenté vendredi d’expliquer aux 11 jurés l’effet qu’a eu sur l’accusé le lave-glace qu’il a bu.

Le professeur et chercheur Claude Rouillard a fait valoir que la consommation de lave-glace, qui contient du méthanol, un alcool toxique, peut entraîner des pertes de mémoire et de conscience.

Cette preuve est importante pour la défense car l’accusé dit ne pas avoir souvenir de tout ce qui s’est passé le soir du 20 février 2009 — ni comprendre tout ce qu’il a fait — lorsqu’il a poignardé à mort ses jeunes enfants Olivier et Anne-Sophie.

Guy Turcotte a témoigné qu’il a bu du lave-glace pour s’enlever la vie. Puis, il a décidé «d’emmener ses enfants avec lui», a-t-il déclaré au jury plus tôt cette semaine.

Le témoignage de l’expert Rouillard a souvent pris l’aspect d’un cours de chimie 101 quand il a expliqué l’effet du méthanol sur le cerveau.

En contre-interrogatoire, l’un des avocats de la Couronne, René Verret, a remis en question son expertise sur le méthanol ainsi que sa crédibilité.

Il lui a demandé s’il avait déjà lu sur cette substance avant le 15 septembre 2015 ou témoigné dans un procès au sujet du méthanol, ce à quoi le témoin expert a répondu par la négative.

«J’ai lu depuis le 15 septembre, avant cela, je ne me suis pas intéressé au méthanol», a convenu le témoin.

En fait , il base en bonne partie ses affirmations sur les recherches faites sur l’éthanol, l’alcool contenu dans le vin et la bière. Selon lui, l’éthanol et le méthanol sont similaires dans leurs effets parce qu’ils appartiennent à la même classe pharmacologique.

L’expert a convenu qu’il n’y avait pas d’études scientifiques réalisées sur le méthanol. Puisqu’il s’agit d’un alcool toxique et mortel, pas moyen de trouver des sujets humains volontaires pour participer à une étude clinique.

Puis, pressé de questions en contre-interrogatoire, M. Rouillard finira par dire qu’il n’est pas possible de déterminer le taux de méthanol dans le sang de Guy Turcotte avant et au moment où il a tué ses enfants. Il manque trop d’informations pour le déterminer.

Au mieux, l’expert a offert ses calculs d’hypothèses avec les données connues. L’exercice est toutefois périlleux, vu la preuve floue sur les heures où l’accusé aurait bu le lave-glace et sur la quantité consommée.

Car la preuve de faits n’a pas démontré la quantité de lave-glace bue par Guy Turcotte ni la période de temps sur laquelle il l’a consommée. Il a toutefois témoigné en avoir bu avant et après avoir tué ses enfants.

Vendredi, l’expert Rouillard a témoigné que le taux de méthanol de l’accusé dans son sang, calculé à 12h27 au lendemain du drame, était la concentration la plus faible qu’il a eue dans son corps.

À ce moment, il était de 310 mg de méthanol dans 100 ml de sang. Une grosse concentration et une dose mortelle, a témoigné la toxicologue Anne-Marie Faucher qui a effectué ce calcul.

Bref, M. Rouillard en déduit que sa concentration ne pouvait qu’être plus élevée avant 12h27.

L’accusé a témoigné cette semaine pendant près de trois jours.

Guy Turcotte a plaidé non coupable aux deux accusations de meurtre prémédité qui pèsent contre lui. Il a toutefois admis avoir tué ses enfants. Pour éviter de se retrouver en prison, il va présenter une défense de non responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux.

Des psychiatres devraient témoigner pour le défense la semaine prochaine.