L’ex-juge Jacques Delisle aurait menti à la police sur la mort de sa femme

MONTRÉAL – L’ex-juge québécois Jacques Delisle, reconnu coupable du meurtre de sa femme, dit avoir menti sur les circonstances de sa mort et soutient maintenant l’avoir aidée à s’enlever la vie, selon ce que rapporte Radio-Canada.

Jacques Delisle n’avait pas témoigné à son procès. La thèse présentée par son avocat était que son épouse s’était suicidée. Le procureur de la Couronne avait pour sa part plaidé que Jacques Delisle s’était débarrassé de sa femme pour vivre avec sa maîtresse et éviter un coûteux divorce.

L’homme a été condamné à la prison à vie en 2012. Ses tentatives pour faire renverser cette décision, d’abord en Cour d’appel puis à la Cour suprême du Canada, ont échoué.

Dans une entrevue accordée à l’émission «Enquête» de Radio-Canada, l’ex-magistrat de la Cour d’appel admet avoir aidé Nicole Rainville à se suicider avec une arme.

Selon cette nouvelle version, sa femme lui aurait demandé un jour de novembre 2009 d’aller chercher son pistolet, caché sur le dessus d’une bibliothèque. Dépressive et paralysée du côté droit, elle lui aurait dit ne plus vouloir vivre. Jacques Delisle aurait chargé lui-même l’arme avant de la lui remettre. Il soutient dans cette entrevue avoir tenté de la dissuader, avant de quitter leur résidence. Nicole Rainville, âgée de 71 ans, a ensuite été retrouvée sans vie avec une balle dans la tête.

De sa prison de Sainte-Anne-des-Plaines, il aurait confié avoir menti aux policiers en disant qu’il s’agissait d’un suicide — sans plus — parce qu’il avait peur de la réaction de sa famille.

Aider une personne à se suicider est par contre aussi un acte criminel, passible d’un emprisonnement maximal de 14 ans.

Le nouvel avocat de M. Delisle, James Lockyer, de Toronto, devrait présenter une demande de révision de son cas au ministre fédéral de la Justice, Peter MacKay, rapporte aussi le diffuseur public. Il s’agit d’une procédure rare, prévue au Code criminel, utilisée dans les cas d’erreur judiciaire.

Lorsqu’une telle demande de révision est présentée et que le ministre a des motifs raisonnables de croire qu’une erreur judiciaire a été commise, il peut ordonner un nouveau procès ou référer toute l’affaire en Cour d’appel.

Me Lockyer a refusé la demande d’entrevue de La Presse Canadienne et ne veut pas dans l’immédiat fournir plus de détails au sujet des démarches entreprises par son client. Il prévoit toutefois une conférence de presse vendredi matin à Québec.

L’avocat torontois a fondé l’Association pour la défense des personnes condamnées à tort. Spécialisé dans cette branche, il a notamment participé aux efforts qui ont réussi à faire innocenter David Milgaard, une victime d’erreur judiciaire qui a passé 23 ans derrière les barreaux pour un viol et un meurtre qu’il n’avait pas commis.

L’avocat précédent de Jacques Delisle, Me Jacques Larochelle, avait déjà fait savoir en janvier 2014 qu’il allait formuler une telle requête au ministre de la Justice. Il se disait alors convaincu que son client était innocent et avait été «victime d’une grave erreur judiciaire».

Me Larochelle estimait que la preuve balistique sur laquelle reposait toute cette affaire était complexe et n’avait pas été analysée correctement. Et selon lui, «la faiblesse des jurés pour apprécier la preuve scientifique est notoire». C’est pourquoi il avait requis un procès devant juge seul, ce que la Couronne lui avait refusé, avait-t-il alors souligné.

L’an dernier, le ministre MacKay avait refusé de commenter cette possibilité de recours qui lui serait adressée Son attachée de presse, contactée à ce sujet en 2014, avait toutefois souligné que la Cour suprême avait refusé d’entendre l’appel de Jacques Delisle.