OTTAWA – Le gouvernement conservateur veut prolonger la mission canadienne contre le groupe armé État islamique (ÉI), et il n’est pas exclu que son champ d’action s’étende à la Syrie, a indiqué mercredi le premier ministre Stephen Harper.
«La semaine prochaine, je présenterai au Parlement une proposition pour l’expansion et la prolongation de cette mission», a déclaré M. Harper en marge d’une annonce à Mississauga, dans la région de Toronto.
Le premier ministre n’a pas exclu que la mission canadienne puisse dépasser les frontières de l’Irak et se transporter en Syrie au besoin.
«La motion actuelle ouvrait la porte à cette possibilité d’intervenir en Syrie, mais nous ne l’avons pas fait», a-t-il soutenu.
«Nous discuterons d’enjeux comme celui-ci la semaine prochaine lorsque je ferai ma proposition à la Chambre des communes», a conclu le premier ministre Harper.
Il a ainsi confirmé les rumeurs qui bruissaient depuis quelques jours à Ottawa quant à l’avenir de cette mission militaire, dont l’évolution a été vigoureusement critiquée par l’opposition, tout particulièrement par les néo-démocrates.
Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Thomas Mulcair, a laissé planer peu de doutes sur les intentions de ses troupes en ce qui a trait à la «proposition» évoquée par Stephen Harper, même si celle-ci reste à définir.
De passage en Colombie-Britannique, il a accusé le chef conservateur de réaliser un «vieux souhait» en menant aujourd’hui une guerre en Irak à laquelle il aurait voulu participer en 2003 aux côtés des Américains sans mandat des Nations unies ou de l’OTAN.
«Au NPD, nous avons voté contre (la mission), et je peux vous garantir qu’encore une fois, nous nous opposerons à toute implication de soldats canadiens dans une guerre qui n’est tout simplement pas la nôtre», a-t-il martelé avec vigueur en mêlée de presse.
«Nous ne devrions pas faire partie de cette coalition, a tranché M. Mulcair. Le Canada fait partie de l’OTAN. Contrairement à l’Afghanistan, ceci n’est pas une mission de l’OTAN.»
Le fait que le premier ministre ouvre la porte à une intervention en Syrie ravive par ailleurs les inquiétudes des néo-démocrates quant à la possibilité que le Canada puisse avoir à négocier avec l’homme fort de Damas, le président Bachar Al-Assad.
«Là, écoutez, on se retrouverait dans la situation où il faudrait travailler de concert avec un régime qui est à l’origine d’exactions, à l’origine d’une crise terrible, et que le gouvernement condamne de manière véhémente depuis quatre ans», a dénoncé la porte-parole adjointe du parti en matière d’affaires étrangères, Hélène Laverdière.
Le deuxième parti d’opposition aux Communes, le Parti libéral du Canada (PLC), avait lui aussi voté contre la motion présentée en octobre dernier par le gouvernement. Il s’est depuis montré moins critique que les néo-démocrates.
«Les libéraux estiment que le Canada a un rôle à jouer dans l’effort international contre l’ÉI», a écrit dans une déclaration la porte-parole libérale en matière de défense, Joyce Murray.
«Nous ne pouvons pas spéculer sur une motion qui n’a pas été présentée au Parlement. Jusqu’ici, le premier ministre n’a pas été transparent ni honnête sur le rôle de nos troupes en Irak», a-t-elle poursuivi.
En vertu de la motion initiale d’une durée de six mois approuvée aux Communes, où les conservateurs sont majoritaires, Ottawa a envoyé dans la région six chasseurs CF-18, un appareil de ravitaillement, deux aéronefs de surveillance et environ 600 membres des Forces armées.
Il y a un peu moins de deux semaines, la mission a fait une première victime: le sergent Andrew Joseph Doiron, qui a été abattu par un tir fratricide.
Les circonstances entourant sa mort sont encore nébuleuses. Trois enquêtes séparées seront menées pour les éclaircir, a indiqué le ministre de la Défense, Jason Kenney.