Demandes municipales: les maires exigent d’en faire un enjeu électoral

QUÉBEC – Assez parlé de souveraineté et de référendum, le temps est venu pour les chefs de parti de prendre des engagements clairs envers le monde municipal, ont dit en choeur, lundi, le maire de Montréal, Denis Coderre, et celui de Québec, Régis Labeaume, entourés de plusieurs maires bien déterminés à faire des problèmes municipaux un enjeu central de la campagne électorale.

Après une douzaine de jours de campagne, les maires commencent à s’impatienter. Ils craignent manquer de temps pour obtenir gain de cause avant l’échéance du 7 avril, jour d’élections générales.

Parrainés par l’Union des municipalités du Québec (UMQ), une vingtaine de maires ont donc décidé de faire front commun et de parler d’une seule voix, pour accroître la pression sur les chefs politiques et leur extirper des engagements précis d’ici là.

Ils demandent aux chefs des différents partis de se commettre sur deux enjeux en particulier: la loi attendue sur les régimes de retraite des employés municipaux et le partage de la facture de la mise à niveau des infrastructures municipales.

«C’est terminé le temps où on est considéré comme un gouvernement de deuxième classe», a fait valoir le président de l’Union des municipalités du Québec et maire de Rimouski, Éric Forest, en conférence de presse, flanqué de plusieurs élus municipaux réunis à l’hôtel de ville de Québec.

Les maires présents ont demandé aux leaders politiques d’annoncer leurs couleurs dès le premier débat télévisé des chefs, jeudi soir. «On a de grandes attentes par rapport au débat des chefs», a commenté M. Forest.

Mais quoi qu’il arrive au cours de ce débat les élus municipaux auront la chance d’exprimer leurs doléances le lendemain, au cours du sommet des municipalités qui réunira quelque 300 élus vendredi à Québec. Les chefs des trois principaux partis, Pauline Marois (PQ), Philippe Couillard (PLQ) et François Legault (CAQ), ont d’ailleurs confirmé leur présence à cet événement et devront jouer du coude pour séduire le monde municipal.

«On veut rien savoir d’une élection référendaire, alors ‘badrez’-nous pas avec ça», a résumé le maire de Montréal, Denis Coderre, excédé de voir que le début de la campagne électorale avait été monopolisé par les questions de statut politique du Québec. Il a dit que le monde municipal était à la recherche d’un nouveau type de «partenariat» avec le gouvernement du Québec.

Le maire Coderre a rappelé qu’à Montréal le déficit des régimes de retraites des employés atteignait 2,1 milliards $, grugeant quelque 12 pour cent du budget de la ville, soit 600 millions $ cette année.

Au sujet des infrastructures, il a dénoncé le fait que les villes payaient 76 pour cent de la facture contre 14 pour cent pour le gouvernement du Québec.

Les maires demandent donc au gouvernement d’ajouter 650 millions $ à son budget de soutien à la mise à niveau des infrastructures municipales.

Mais la pression sur le prochain gouvernement risque de venir surtout du côté des régimes de retraite des employés municipaux.

Le monde municipal réclame que le projet de loi d’entente-cadre sur le sujet déposé par la ministre Agnès Maltais juste avant le déclenchement des élections, en février, donc mort au feuilleton, soit déposé à nouveau, en priorité, dès la reprise des travaux et adopté avant l’ajournement du mois de juin.

Le maire Régis Labeaume a insisté pour ajouter un volet au projet de loi, soit le partage négocié des déficits accumulés dans le passé dans ces régimes _ un total de près de 5 milliards $ pour l’ensemble des villes. Les maires veulent un partage moitié-moitié de la facture entre municipalités et employés.

Le projet de loi de Mme Maltais prévoyait une période de 18 mois pour prendre les mesures nécessaires à la survie des régimes de retraite à prestations déterminées. Employeurs et travailleurs avaient six mois pour s’entendre. À défaut d’un accord, le ministère du Travail devait nommer un conciliateur. Si aucune entente n’était possible, la Commission des relations du travail devait trancher. Le projet de loi obligeait tous les régimes à intégrer un partage des coûts à parts égales entre employés et employeurs.

Tout délai retardant l’adoption d’une loi se traduira par des augmentations de taxes pour les contribuables, a prévenu le maire Labeaume.